La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours
de panique sont autolimitées. Le corps humain ne peut accepter indéfiniment un taux de panique très élevé, il ne peut produire très longtemps de l'adrénaline, de sorte que l'esprit doit s'adapter et faire la paix-tout au moins la trêve-avec ce qu'il redoute.
Dans le cas d'Ernie, la première étape du traitement consistait à rester quinze minutes dans le noir, Faye à ses côtés pour le soutenir et une zone éclairée à
proximité. Chaque fois qu'ils approchaient d'un lampadaire, elle le laissait reprendre courage puis ils repartaient.
Avec la deuxième étape, qu'ils n'entameraient que dans une ou deux semaines après de nouvelles séances avec le Dr Fontelaine, ils se rendraient en voiture dans un endroit obscur et marcheraient dans le noir absolu jusqu'à ce qu'Ernie n'en puisse plus. Faye allumerait alors une torche pour lui permettre de se ressaisir.
Au cours de la troisième et ultime étape, Ernie irait se promener seul dans un endroit totalement obscur.
Après quelques tentatives de ce genre, il serait certainement guéri.
Faye Block était femme à toujours penser de manière positive. Mais là, quelque chose qu'elle ne pouvait définir lui disait que les progrès d'Ernie étaient trop rapides et que tout cela allait se terminer mal. Très mal.
Boston, Massachusetts
Pablo Jackson avait beaucoup de succès dans les réceptions mondaines. Filleul de Picasso et artiste de music-hall pendant de nombreuses années, il avait aussi servi d'agent de liaison entre la Résistance fran-
çaise et l'espionnage britannique pendant la Seconde Guerre mondiale. Sa récente collaboration avec la police ne pouvait qu'ajouter à sa renommée. Il ne refusait jamais une invitation.
Le soir de NoÎl, Pablo assista donc à une soirée très chic donnée à partir de vingt-deux heures au domicile de M. et Mme Ira Hergensheimer, à Brookline. C'était une splendide demeure de style géorgien, aussi élé-gante et chaleureuse que les Hergensheimer eux-mêmes. Un barman officiait dans la bibliothèque, des serveurs en frac exécutaient un véritable ballet parmi les invités auxquels ils apportaient champagne et petits fours et un quatuor à cordes jouait dans le vesti-bule.
Parmi tous les invités, l'homme qui intéressait le plus Pablo était Alexander Christophson ancien ambassadeur à la cour de Saint-James ancien sénateur du Massachusetts et ancien directéur de la CIA.
Retiré du monde de la politique depuis une dizaine d'années il avait maintenant soixante-seize ans. Pablo le connaissait depuis un demi-siècle. Il était grand, distingué, avec très peu de rides sur son noble visage. Son esprit était plus vif que jamais. La véritable durée de son séjour terrestre ne se trahissait que par un début de maladie de Parkinson qui, malgré les traitements, lui causait parfois des tremblements dans la main droite.
Une demi-heure avant que le dîner ne f˚t servi, Pablo entraîna Alex loin des autres invités et le conduisit dans la bibliothèque d'Ira Hergensheimer afin d'avoir avec lui une conversation privée. Le vieux magicien referma la porte derrière eux et ils portèrent leurs fl˚tes de champagne jusqu'à une petite table flanquée de deux fauteuils de cuir.
Álex, j'ai besoin de tes lumières, dit Pablo. Hier, une jeune femme est venue me trouver. C'est une femme extrêmement charmante et intelligente qui a l'habitude de résoudre seule ses problèmes, mais qui se heurte aujourd'hui à quelque chose de très étrange.
Elle a vraiment besoin d'aide.
-Ainsi donc, les charmantes jeunes femmes viennent encore te solliciter, à quatre-vingt-un ans ?
J'avoue que je suis à la fois impressionné... et envieux, dit en riant Alex Christophson.
-quel vieil obsédé tu fais, il ne s'agit pas d'un coup de foudre ! ª
Sans révéler le nom ni la profession de Ginger Weiss, Pablo exposa le problème-les fugues inexplicables
- et raconta par le menu la séance d'hypnose à
laquelle il s'était empressé de mettre un terme. Élle semblait vraiment se retirer dans un coma très profond, peut-être même dans la mort, pour échapper à
mes questions. Naturellement, j'ai refusé de l'hypnotiser à nouveau et de risquer une autre crise, mais je lui ai promis d'effectuer des recherches pour tenter de découvrir un cas semblable. J'ai passé une grande partie de la nuit à feuilleter des bouquins o˘ l'on parlerait de blocages mnémoniques associés à une autodestruction. J'ai finalement trouvé un
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