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La grande vadrouille

La grande vadrouille

Titel: La grande vadrouille
Autoren: Georges TABET , André TABET
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légumes écrasés comme sur des nappes d’huile.
    L’arme nouvelle se révélait efficace et même redoutable.
    Un des side-cars fit trois tonneaux et, complètement déséquilibré, quitta la route. Il alla s’aplatir dans une mare salué par de grandes gerbes d’eau verte, sous l’œil affolé des canards.
    — Á droite ! hurla Stanislas à Reginald qui, un peu désemparé tenait sa gauche. On n’est pas en Angleterre !
    — Hélas ! soupira le Squadron-Leader alors que le camion recevait une giclée de mitraillette dont les balles firent mouche dans la solide carrosserie. Il évita de justesse un télescopage avec une traction avant qui venait en sens inverse. Celle-ci, déportée par un brutal coup de volant, accrocha un des side-cars qui, sous le coup, se détacha de la moto, et se mit à tourner sur lui-même comme une toupie.
    Sœur Marie-Odile, Stanislas et Augustin catapultaient toujours les citrouilles sur la route. Mais c’étaient, si on peut dire, les dernières cartouches. Il n’en restait encore que trois…
    La première manqua son but.
    Mais la seconde atteignit de plein fouet le conducteur d’une moto. Cela provoqua une formidable embardée. Le side-car et sa moto furent projetés irrésistiblement vers un talus orné d’un arbre unique. Ce bouleau bien français coupa en deux l’attelage : la moto s’envola sur le terre-plein, et le motocycliste séparé de son engin fut gracieusement accroché à une haute branche. Le side-car continua son voyage tout seul, désorienté, comme fou. Dans la descente, il dépassa le camion à une allure vertigineuse et au bout d’une falaise, il décrivit une éblouissante parabole et alla se rafraîchir en plongeant dans l’Aube voisine.
    La dernière moto harcelait obstinément le camion. Á toute allure, respectant toutefois le code de la route, le conducteur avait les yeux fixés sur la ligne blanche médiane.
    Justement des ouvriers cantonniers français retraçaient cette ligne de circulation, effacée par le charroi des exodes. Quand ils virent le camion poursuivi par le motocycliste, ils comprirent aussitôt la situation et, par une complicité instantanée, toujours dessinant la ligne, ils la firent aboutir à un ravin.
    Le sens de la discipline routière et le respect du code furent fatals à l’homme sur sa moto. Suivant le tracé, il aboutit au ravin et dégringola dans le précipice où sa machine prit feu.

XXIV
    Bucolique et attentionné, avec des gestes d’une délicatesse exquise, le gros Achbach nourrissait les pigeons parisiens. Ces pauvres volatiles étaient amaigris et faisaient pitié.
    De sa fenêtre qui dominait le jardin des Tuileries, le Major avait le geste généreux du semeur.
    Un pli soucieux barrait toutefois son front.
    C’était un de ces officiers humanitaires qui trouvait nécessaire que, au cours d’un conflit, on massacrât proprement des milliers de Français, mais qui désapprouvait les méthodes nazies préconisant la torture préalable. Ce n’était qu’une nuance, mais qui faisait, selon lui, la différence entre l’homme et la brute. Il méprisait les fonctionnaires nazis criminels par obédience, les « assassins de bureau ».
    Il se sentait d’autant plus ennemi des hitlériens que l’un d’eux, et non des moindres, Otto Weber, lui avait virtuellement promis de l’envoyer sur le front russe s’il ne réussissait pas à mettre la main sur les Anglais et leurs complices en fuite.
    Il en était malade. Pour un peu, il serait devenu pacifiste. Le peintre et le chef d’orchestre, accompagnant les aviateurs, dansaient dans son cerveau une telle sarabande qu’il en avait la migraine.
    Du balcon, il entendit le téléphone sonner dans son bureau.
    — Qu’est-ce que c’est ? cria-t-il à sa secrétaire, une souris grise, à la croupe chevaline.
    Achbach l’entendit répondre à l’appareil :
    —  Hallo ? Ia… Ia… Moment !… Bitte !
    Puis s’adressant au Major :
    — C’est pour vous… de Meursault…
    Il prit le récepteur, étonné.
    — Achbach !… moi-même !… Quoi ? Non ? Pas possible ? Wunderbar !…
    Du bureau du chef de gare de Meursault, l’officier allemand amateur de jambon et de poèmes de Péguy donnait à Achbach de réjouissantes nouvelles :
    — Un hasard m’a permis de capturer cet Anglais. J’ai tout lieu de penser qu’il faisait partie de l’équipage du bombardier descendu au-dessus de Paris…
    Peter, sous la garde de deux soldats
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