Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
Vom Netzwerk:
une
grosse platelée de viande et de pain, et disait :
    – La bataille fera de toi potage, que me bailles-tu pour ma
pronostication, ô soudard chéri des sacres à grosse
gueule ?
    Quand un vieil homme, portant sans gloire sa tête chenue,
amenait à Ulenspiegel sa femme, jeune commère, celui-ci se cachant,
comme il avait fait pour le soudard, montrait dans le cadre un
petit arbuste, aux branches duquel étaient accrochés des manches de
couteau, des coffrets, des peignes, des écritoires, le tout en
corne, et s’écriait :
    – D’où viennent ces beaux brimborions, messire ? n’est-ce
point du cornier qui croît endéans le clos des vieux maris ?
Qui dira maintenant que les cocus sont des gens inutiles en une
république ?
    Et Ulenspiegel montrait dans le cadre, à côté de l’arbuste, son
jeune visage.
    Le vieil homme, en l’entendant, toussait de male rage, mais sa
mignonne le calmait de la main, et, souriant, venait à
Ulenspiegel.
    – Et mon miroir, disait-elle, me le montreras-tu ?
    – Viens plus près, répondait Ulenspiegel. Elle obéissait. Lui
alors, la baisant où il pouvait :
    – Ton miroir, disait-il, c’est roide jeunesse demeurant ès
braguettes hautaines.
    Et la mignonne s’en allait aussi, non sans lui avoir baillé un
ou deux florins.
    Au moine gras et lippu qui lui demandait de voir son être
présent et futur représenté, Ulenspiegel répondait :
    – Tu es armoire à jambon, aussi seras-tu cellier à cervoise car
sel appelle buverie, n’est-il pas vrai, grosse bedaine ?
Donne-moi un patard pour n’avoir pas menti.
    – Mon fils, répondait le moine, nous ne portons jamais
d’argent.
    – C’est donc que l’argent te porte, répondait Ulenspiegel, car
je sais que tu le mets entre deux semelles sous tes pieds.
Donne-moi ta sandale.
    Mais le moine :
    – Mon fils, c’est le bien du couvent ; j’en tirerai
toutefois, s’il le faut, deux patards pour ta peine.
    Le moine les donna, Ulenspiegel les reçut gracieusement.
    Ainsi montrait-il leur miroir à ceux de Damme, de Bruges, de
Blankenberghe, voire même d’Ostende.
    Et au lieu de leur dire en son langage flamand : «
Ik
ben u lieden spiegel
, je suis votre miroir, » il leur disait
abréviant : « 
Ik ben ulen spiegel
, » ainsi que
cela se dit encore présentement dans l’Oost et la West-Flandre.
    Et de-là lui vint son surnom d’Ulenspiegel.

XXI
     
    En grandissant, il prit goût à vaquer par les foires et marchés.
S’il y voyait un joueur de hautbois, de rebec ou de cornemuse, il
se faisait, pour un patard, enseigner la manière de faire chanter
ces instruments.
    Il devint surtout savant en la manière de jouer du
rommel-pot
instrument fait d’un pot, d’une vessie et d’un
roide fétu de paille. Voici comment il s’en servait : le soir
il tendait la vessie mouillée sur le pot, fixait au moyen d’une
cordelette le milieu de la vessie autour du nœud du fétu, qui
touchait le fond du pot, aux bords duquel il plaçait ensuite la
vessie tendue jusqu’à danger de crevaille. Le matin, la vessie
étant sèche rendait sous les coups le son du tambourin, et si l’on
frottait la paille de l’instrument, elle ronflait mieux qu’une
viole. Et Ulenspiegel, avec son pot ronflant et donnant le son
d’aboîments de molosses, allait chanter des noëls à la porte des
maisons en compagnie d’enfants dont l’un portait l’étoile de papier
lumineuse, le jour des Rois.
    Si quelque maître peintre venait à Damme pour y pourtraire,
agenouillés en une toile, les compagnons de quelque
gilde
,
Ulenspiegel, désirant voir comment il travaillait, demandait qu’il
lui permît de broyer ses couleurs, et ne voulait pour tout salaire
qu’une tranche de pain, trois liards et une chopine de
cervoise.
    S’occupant à broyer, il étudiait la manière de son maître. Quand
celui-ci s’absentait, il essayait de peindre comme lui, mais il
mettait partout de l’écarlate. Il s’essaya à pourtraire Claes,
Soetkin, Katheline et Nele, ainsi que des pintes et des coquasses.
Claes lui prédit, voyant ses œuvres, que s’il se montrait vaillant,
il pourrait un jour gagner des florins par dizaines, en faisant des
inscriptions sur les
speel-wagen
, qui sont des chariots de
plaisir en Flandre et en Zélande.
    Il apprit aussi d’un maître maçon à tailler le bois et la
pierre, quand celui-ci vint faire, dans le chœur de Notre-Dame, une
stalle construite de telle façon que, lorsqu’il le faudrait, le
doyen, homme

Weitere Kostenlose Bücher