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La Légion Des Damnés

La Légion Des Damnés

Titel: La Légion Des Damnés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sven Hassel
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paix. Nous témoignions, par la même occasion, contre les gardiens du camp qui durant quatorze mois avaient raillé et piétiné toute décence humaine. Nous voulions montrer à ces pauvres filles que la considération, la dignité et l'humanité existaient encore autrement qu'à l'état de mots vides. Même parmi des soldats barbus et dégueulasses.
    Nous les installâmes derrière une pile de paquetages. Puis le Vieux, Porta et moi-même allâmes nous rendre compte si l'alarme était déjà donnée, à l'intérieur du camp, pendant que les autres s'asseyaient sur le bord du plancher, dans l'encadrement des portes à glissières, pour interdire l'accès de notre wagon à quiconque n'y avait que faire.
    Notre train repartit avant que la triple évasion eût été découverte.
    Dans les jours qui suivirent, les meilleurs morceaux de tout ce que nous pouvions dénicher allèrent automatiquement à nos trois passagères clandestines. L'aînée, Rosita, était professeur de musique et Porta devint très rapidement son défenseur particulier. Jamais nous ne pûmes lui faire dire pour quelle raison elle avait été envoyée dans ce camp.
    Jeanne, la plus jeune — elle était tout juste majeure — avait suivi des cours à la Sorbonne au moment de son arrestation. Ses deux frères, lieutenants dans l'armée française, étaient prisonniers en Allemagne. Son père était recherché par la Gestapo qui l'avait déportée elle-même, à titre d'otage.
    Maria, la Juive, avait été appréhendée un soir, en pleine rue, et expédiée en Pologne sans autre formule de procès. Son mari était un homme d'affaires lyonnais et elle avait un fils de deux ans et demi. Son deuxième enfant — un autre fils — était né trois mois après l'arrivée de Maria dans ce camp de concentration, mais n'avait vécu que quinze jours.
    La semaine n'était pas écoulée que nous étions tous désespérément amoureux de nos trois femmes ; mais comme des gosses qui ont découvert un nid d'oisillons, nous n'avions aucune idée de ce que nous allions en faire. Nous passions le plus clair de notre temps à étudier et rejeter les suggestions les plus fantastiques, les plus irréalisables. Nous étions d'accord, cependant, sur un point : nous ne pouvions en aucun cas les traîner avec nous jusqu'en première ligne et tenter de leur fournir l'occasion de filer chez les Russes. C'était beaucoup trop aléatoire et si jamais elles avaient la déveine de traverser un secteur tenu par quelque détachement asiatique aux mœurs primitives, elles se feraient violer sur place par toute la troupe.
    Ce fut le frère de Fleischmann qui résolut le problème. Fleischmann arriva un jour en courant et nous dit que son frère était Oberfeldwebel à bord d'un train blindé garé à quelque distance de là, et qui se préparait à rentrer en France. Il avait mis son frère dans le coup et celui-ci était prêt à faire l'impossible pour rapatrier nos protégées. Elles ne comprirent pas immédiatement ce qui leur arrivait, crurent que la Gestapo avait retrouvé leurs traces, et Maria se mit à pleurer.
    Mais Porta leur expliqua :
    — Allons, allons, vous êtes simplement mutées dans l'artillerie lourde. Vous repartez pour la France dans un beau train blindé. Le frangin de Fleischmann va arranger ça...
    Nous traversâmes une quantité de voies de chemin de fer, entraînant et portant parfois les trois jeunes femmes à demi mortes d'anxiété, et finalement, nous atteignîmes le gigantesque train blindé, avec ses gros canons pointés vers le ciel. Le frère de Fleischmann avait déjà tout préparé, et deux de ses hommes montaient la garde. Il dédia un sourire résolu à Marie, Rosita et Jeanne, en leur serrant successivement la main.
    — Embarquez, les gosses, au galop, et qu'on ne vous voie plus après ça. Tenez-vous simplement peinardes dans votre planque ; on vous apportera tout ce dont vous avez besoin. Vous serez un peu à l'étroit mais on vous ramènera à bon port, vous verrez...
    Nous les aidâmes à s'installer. Elles disposaient d'une seule couchette pour elles trois, dans le coin le plus haut et le plus inaccessible d'un wagon blindé, rempli d'armes et de munitions. Elles nous embrassèrent toutes les trois sur la bouche. Porta, ému, les appela ses tourterelles et reçut pour sa peine un baiser supplémentaire.
    Un peu plus tard, et non sans serrement de cœur, nous regardâmes l'énorme convoi s'ébranler et disparaître vers l'ouest. Nos

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