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LA LETTRE ÉCARLATE

LA LETTRE ÉCARLATE

Titel: LA LETTRE ÉCARLATE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nathaniel Hawthorne
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un esprit aussi sage, aussi élevé, aussi saint. Jamais non plus l’inspiration n’avait plus évidemment coulé de lèvres mortelles. On pouvait, autant dire, la voir descendre sur le prédicateur et s’emparer de lui et continuellement le détacher du discours écrit qu’il avait sous les yeux pour le combler d’idées qui devaient lui paraître aussi merveilleuses qu’à son auditoire. Son sujet avait, paraît-il, traité des rapports entre la divinité et les communautés humaines avec une référence spéciale à cette colonie de Nouvelle-Angleterre en train de s’ériger en plein pays sauvage. Aux approches de sa péroraison, un souffle prophétique l’avait visité et contraint de donner voix à ses révélations aussi puissamment qu’il y contraignit les vieux prophètes d’Israël ; avec seulement cette différence qu’alors que les prophètes juifs avaient dû annoncer condamnation et ruine à leur pays, la mission du Révérend Dimmesdale était de prédire une destinée haute et glorieuse au peuple nouvellement rassemblé du Seigneur.
    Mais une émouvante note de tristesse n’en avait pas moins cessé de vibrer en sourdine tout au long du sermon. Les fidèles ne pouvaient l’interpréter que comme un sentiment de regret naturel à quelqu’un qui bientôt quitterait ce monde. Oui, leur pasteur qu’ils aimaient tant – et qui les aimait tant qu’il ne pouvait, sans un soupir, les quitter pour aller au ciel – leur pasteur avait le sentiment qu’une mort précoce l’attendait et qu’il les laisserait bientôt à leurs larmes ! Cette idée de la brièveté du séjour qu’il lui restait à faire ici-bas élargissait d’une dernière touche d’ampleur l’effet produit par les paroles du Révérend Dimmesdale. C’était comme si un ange, traversant l’atmosphère terrestre pour gagner le ciel, avait, un instant, secoué ses ailes étincelantes au-dessus des gens – ombre et splendeur tout ensemble – et déversé sur eux une pluie de vérités d’or.
    Ainsi le Révérend Dimmesdale se trouvait atteindre – comme la plupart des hommes en leurs sphères diverses, encore que rares soient ceux qui s’en avisent sur le moment – à une période plus brillante et emplie de triomphe qu’aucune auparavant et qu’aucune à venir. Il se tenait en cet instant sur l’éminence de supériorité la plus fière que les dons de l’intelligence, l’érudition, l’éloquence, une réputation de sainteté sans tache pouvaient élever pour la glorification d’un clergyman en ces premiers temps de la Nouvelle-Angleterre où le sacerdoce était déjà en lui-même un imposant piédestal. Telle était la position d’Arthur Dimmesdale comme il inclinait en avant la tête sur les coussins de la chaire à la fin de son sermon du Jour de l’Élection. Pendant ce temps, Hester Prynne se tenait debout près de l’estrade du pilori, la lettre écarlate brûlant toujours sur sa poitrine.
    De nouveau, les sons métalliques de la musique, et le pas cadencé de l’escorte militaire, franchissant les portes de l’église se firent entendre. Le cortège allait se diriger vers l’hôtel de ville où un banquet solennel compléterait les cérémonies du jour.
    Une fois de plus le peuple s’écarta avec respect pour livrer largement passage au Gouverneur, aux prud’hommes, aux saints ministres du Seigneur, à tous les personnages éminents et en renom qui avançaient processionnellement. Quand le cortège eut bien atteint la Place du Marché, il fut interminablement salué par un tumulte de vivats. Ces acclamations, encore qu’empruntant sans doute une partie de leur force à la loyauté enfantine que cette époque vouait à ses chefs, donnèrent l’impression d’être un irrésistible transport d’enthousiasme soulevé par le flot d’éloquence sacrée dont l’écho résonnait encore aux oreilles des auditeurs du sermon. Chacun se sentit poussé par cet élan que tous avaient eu peine à contenir dans l’intérieur du temple et, en y cédant, sentit que tel était aussi le cas de son voisin. Ici, sous la voûte du ciel, le ravissement pouvait faire explosion, éclater en mille cris qui montaient retentir au plus haut des airs. Il y avait assez d’êtres humains, assez de sentiments portés au summum de la ferveur pour faire naître une symphonie, pour produire des sons plus impressionnants que ceux des orgues ou du vent, de l’océan ou du tonnerre. Ces clameurs d’une multitude de voix se

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