La malédiction des templiers
d’accès.
— Par ailleurs, ajouta Ertugrul, n’oublions pas que nous aurions le même problème que les gars des aéroports : nous n’avons ni photo potable, ni nom ou pseudo à fournir aux barrages routiers. Il n’y a guère que Simmons qu’ils pourraient repérer.
— Ce n’est pas possible, conclut İzzettin. La région alentour est très appréciée des touristes. La Cappadoce est bondée à cette période de l’année. On ne peut pas se permettre d’arrêter tout le monde.
— Bon, fit Reilly avec un haussement d’épaules frustré, l’œil sombre.
La voix de Tess perça soudain l’atmosphère pesante qui s’était installée :
— Puisque vous dites qu’il travaille sans doute pour les Iraniens, ne pensez-vous pas que ceux-ci ont à Istanbul des gens susceptibles de lui donner un coup de main ? Ils pourraient tout à fait lui trouver une voiture. Un refuge discret. Des armes.
— C’est bien possible, admit Reilly.
Il s’était posé la même question, mais il savait le terrain glissant.
— De quel dispositif de surveillance disposons-nous autour de leur ambassade ? demanda-t-il à Ertugrul.
Ce dernier marqua une hésitation, puis éluda :
— L’ambassade ne se trouve pas ici, mais dans la capitale, Ankara. Ils n’ont qu’un consulat à Istanbul.
Il s’en tint là. Aucun responsable de services secrets n’aimait révéler les identités de ceux que lui et ses collègues surveillaient, ou ne surveillaient pas, devant des homologues étrangers, à moins d’avoir la certitude absolue qu’il pouvait leur faire confiance – autant dire jamais.
— Et ses membres sont sous surveillance ? insista Reilly.
— Je ne suis pas en mesure de te répondre. Ceci est du ressort de l’Agence, répondit l’attaché juridique, rappelant à son collègue que c’était la CIA qui avait la main en matière de collecte de renseignements à l’étranger.
Reilly comprit le message et laissa tomber. Toujours très mécontent, il se tourna alors vers l’un des responsables turcs assis à la table, un certain Mourat Çelikbilek, du MIT, le Milli İstihbarat Teşkilati, autrement dit l’Organisation nationale du renseignement turque.
— Et vos hommes ? lui demanda-t-il. Vous devez bien avoir mis en place un système de surveillance quelconque…
Çelikbilek le considéra un moment avec impassibilité avant de répondre :
— Ce n’est pas une question à laquelle on peut répondre comme cela, en particulier en présence de… d’un civil, conclut-il avec un mouvement du menton dédaigneux en direction de Tess.
— Ecoutez, je n’ai pas besoin de savoir dans le détail la façon dont vous êtes organisés, reprit Reilly avec un petit sourire désarmant. Mais si vous les tenez à l’œil, et en particulier si vous surveillez leur consulat, l’un de vos hommes a peut-être vu quelque chose à même de nous aider.
Il soutint un moment le regard de Çelikbilek. L’officier de renseignements finit par cligner des yeux avant d’adresser à Reilly un petit signe de tête.
— Je vais voir si on a quelque chose.
— Ce serait super. On doit agir vite, insista Reilly. Il a déjà tué trois personnes dans votre pays, et il pourrait bien ne pas en rester là. Il est sans doute déjà en route pour le monastère et, à moins qu’on ne découvre quel genre de voiture il conduit ou l’endroit précis vers lequel il se dirige, il a le champ libre.
Il fit une pause suffisamment longue pour être sûr que chacun autour de la table avait bien compris, puis, se tournant vers Ertugrul, dit en baissant le ton :
— Il va falloir qu’on ait une discussion avec les gars de l’Agence. Et pas plus tard que tout de suite.
24
Avec le soleil couchant qui transformait son rétroviseur en lampe à incandescence, Mansour Zahed se glissa dans le trafic, longues files de voitures quittant Istanbul pare-chocs contre pare-chocs à cette heure de pointe, et se concentra sur sa conduite.
Il jeta un coup d’œil vers sa droite : Simmons était assis sur le siège passager, la tête légèrement affaissée, le regard à peu près dénué d’expression, comme d’habitude désormais : les sédatifs avaient une fois de plus sapé sa vitalité et l’avaient transformé en créature docile. Zahed savait qu’il devrait le maintenir dans cet état un certain temps encore : un long trajet les attendait, bien plus long que celui qu’ils avaient couvert plus tôt dans la
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