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La Marque du Temple

La Marque du Temple

Titel: La Marque du Temple Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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et quelques essences de parfum suffiront à défaut de sous-vêtements de rechange. »
    Marguerite me regardait, bouleversée, mais elle n’osa pas intervenir lorsqu’elle lut une farouche détermination dans mes yeux. Je n’avais pas voulu la prévenir de la manœuvre pour mieux en faire accroire à la baronne.
     
    Perdant tout sang-froid, la châtelaine se jeta à mes pieds, enlaça mes jambes et me supplia de ne point la livrer. Elle jura, par tous les saints auxquels elle ne croyait pas, qu’elle était ma soumise et franche amie.
    Marguerite n’en croyait quant à elle, ni ses oreilles ni ses yeux. Sa fière maîtresse se traînait, griffait mes bottes de ses ongles, s’humiliait devant sa jeune écolière. Des larmes coulaient sur ses joues. Ses épaules s’affaissaient. Sa tête oscillait de senestre à dextre en proie à un grand émeuvement. La broche qui retenait ses beaux et longs cheveux noirs lâcha. Ils se répandirent sur sa poitrine, sur ses reins et balayèrent le sol tapissé de feuilles de laurier.
    J’eus honte de la sournoise façon dont je l’avais acculée à merci, mais ne bronchai pas.
    « Ma Dame, deux mots pourraient plaider votre cause. Mais je doute fort qu’ils suffisent. Nos chevaliers, leurs écuyers m’ont fait part de leur intention de vous livrer à nos ennemis.
    — Ces mots, ces mots, mon doux Bertrand, quels sont-ils ? » larmoya-t-elle en levant vers moi son visage baigné par les larmes.
    L’arrogante baronne était brisée. Son visage apeuré, ses traits creusés, son allure naturellement fendante, tout en elle se métamorphosait sous nos yeux. Son front, les fossettes de ses joues, sa bouche se fripèrent comme une vieille pomme qu’elle n’était pas encore. Je crus voir les traits de sa vieillesse, puis son masque mortuaire.
    L’insolente veuve du baron de Beynac s’abandonnait. Mais je savais devoir rester vigilant : le moment était venu de parvenir à mes fins.
     
    Avant de lui tendre la main pour l’aider à se relever, je tentai de lui faire avouer le peu qu’elle m’avait encore caché. Mais ce peu pesait lourd.
    Marguerite, sans dire mot, m’adressa une supplique du regard. La pauvrette n’avait jamais assisté à pareil tourment ; elle souffrait pour sa maîtresse. Par un froncement de sourcils, je lui fis comprendre que le moment n’était pas venu de se laisser porter par la mansuétude.
    « Deux mots, ma Dame, et votre sceau pourraient vous éviter la réclusion ou la mort. Et parlez sans crainte devant Marguerite. Je réponds de son silence et de sa discrétion. Reconnaissez que votre fils Arnaud de la Vigerie était bien instruit de l’existence et du pouvoir présumé des fioles !
    « Que vous aviez vivement insisté auprès du chevalier de Montfort pour qu’Arnaud l’accompagne en terre d’Orient ! Que vous l’aviez chargé de vous les remettre au retour de notre voyage outre-mer. À n’importe quel prix.
    — Non pas à n’importe quel prix ! Le Dieu du Bien m’en est témoin. Mais je reconnais, il est vrai, l’avoir informé du prix que j’attachais à la possession de ces fioles.
    — Vous en étiez-vous ouverte aussi au chevalier de Montfort ?
    — Oui, Foulques le sut avant Arnaud.
    — Connaissaient-ils le pouvoir légendaire de ces fioles ?
    — Non. Moi seule savais, comme tu l’as toi-même appris, qu’elles devaient, outre leur valeur propre, permettre de déclencher une mécanique secrète qui donnerait accès au trésor des Croyants.
    — Mais en connaissaient-ils la valeur pour nous autres chrétiens ? lui demandai-je, sans relever le tutoiement qu’elle n’avait jusqu’alors utilisé que dans l’intimité feutrée de nos brefs égarements charnels.
    — Oui, une valeur inestimable, l’eau et le sang du Christ, le Saint-Graal convoité par de nombreux partis. La vie ou la mort, selon d’aucuns.
    — Or donc, Foulques ou Arnaud auraient-ils pu tenter de les monnayer auprès des Juifs ou des Hachichiyyins ?
    — Ou le Saint-Siège. Oui, je le crains.
    — De Foulques ou d’Arnaud, sur lequel d’iceux se portent vos propres soupçons ?
    — Arnaud, répondit-elle sans hésiter. Ils devaient me les remettre. Mais Arnaud est tellement cupide ! »
    Marguerite écarquillait ses beaux yeux qui étaient passés de la couleur des châtaignes à celle des pêches bien mûres. Je la priai de sortir un instant. Les pupilles de la baronne étaient dilatées. La peur se lisait dans son

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