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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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se passait dans l’âme des deux jeunes gens, et il se repentait du mot imprudent qu’il venait de prononcer. Aussi, voulant écarter le nuage sombre qu’il remarquait sur le front de Keinec, s’empressa-t-il de changer le sujet de la conversation.
    – Où est ton prisonnier ? lui demanda-t-il brusquement.
    – En haut, répondit le jeune homme.
    – Montons alors, et hâtons-nous !
    Yvonne les suivit. La pauvre enfant, elle aussi, s’était aperçue des sentiments qui se peignaient sur le visage de son sauveur, et elle sentait le trouble et la crainte entrer de nouveau dans son âme.
    Pendant les quelques heures qu’ils étaient demeurés ensemble, Keinec avait raconté une majeure partie des événements qui s’étaient succédé depuis la nuit fatale où Raphaël avait enlevé la jolie Bretonne. Seulement, par un sentiment d’une délicatesse exquise, il ne lui avait pas fait part du serment échangé entre lui et Jahoua, lors de la fuite de Diégo, ce serment, qui avait pour but d’abandonner l’amour d’Yvonne à celui qui parviendrait le premier à retrouver la jeune fille et qui l’arracherait aux griffes de ses ravisseurs.
    Yvonne, ignorant cette circonstance et connaissant le caractère impétueux de Keinec, s’était donc sentie saisie par une terreur vague en remarquant l’altération des traits du jeune homme, et, à cette terreur, venait encore se joindre un autre sentiment. La pauvre enfant aimait toujours Jahoua ; elle venait d’entendre dire à Boishardy que son fiancé était blessé, et elle avait compris que, lui aussi, était demeuré fidèle. Elle voulait savoir et elle n’osait interroger. Son regard, en rencontrant celui de Keinec, arrêta subitement sur ses lèvres les questions prêtes à s’en échapper. Elle baissa la tête et comprima un soupir. Keinec alors se rapprocha d’Yvonne. Un violent combat avait lieu dans l’âme du Breton. Enfin, il passa la main sur son front et leva les yeux vers le ciel avec une expression de résignation infinie.
    Boishardy pénétrait dans le logement de Pinard. Keinec retint Yvonne prête à le suivre, et se penchant vers son oreille :
    – Jahoua sera guéri lors de notre arrivée, dit-il à voix basse, et il t’aime plus que jamais !
    Yvonne poussa un cri, ses yeux rayonnèrent d’un suprême éclat de joie, et, saisissant la main du jeune homme, elle la porta à ses lèvres avant que celui-ci eût pu deviner son intention et arrêter ce mouvement.
    – Sois béni ! murmura-t-elle ; tu es bon comme le Dieu de clémence !
    – Qu’y a-t-il ? fit Boishardy en se retournant.
    – Rien ! répondit Keinec. Entrons maintenant et hâtons-nous ! Marcof est peut-être en péril et j’ai besoin de me trouver en face d’hommes à combattre, de périls à braver, d’ennemis à frapper !
    Le jeune homme prononça ces derniers mots avec un tel élan de férocité sauvage, qu’Yvonne frissonna de tout son être. Boishardy comprit encore ce qui se passait dans le cœur du pauvre gars.
    – Ton cœur est aussi grand par la bonté que par le courage, dit-il. Viens ! ne pensons plus qu’à notre mission.
    – Ce n’est pas de la bonté, répondit Keinec en pressant la main que le gentilhomme lui tendait affectueusement, c’est encore de l’amour !
    Yvonne demeura dans la première pièce et les deux hommes passèrent dans celle où était attaché Diégo.

XXX – UN SOUPER CHEZ CARRIER
    Tandis que Boishardy reconnaissait l’infâme beau-frère du marquis de Loc-Ronan sous le costume de l’envoyé du Comité de salut public, Marcof et Carfor pénétraient dans la maison du citoyen proconsul. En passant devant le poste de la compagnie Marat, le marin se contenta de serrer davantage, en signe d’avertissement, le bras de l’ex-berger passé sous le sien. Le sans-culotte comprit à merveille. Les sentinelles, reconnaissant Pinard, lui livrèrent passage sans difficulté. La compagnie Marat savait que son lieutenant était attendu chez Carrier. Pinard marcha donc droit au cabinet du représentant.
    Carrier était alors chez Angélique, dont l’appartement était situé à l’étage supérieur. Lorsqu’on vint lui annoncer le retour de Pinard, il lâcha un juron énergique exprimant à moitié ce qui se passait en lui. Cependant faisant contre fortune bon cœur (au fond il craignait son lieutenant), il se hâta de descendre et pénétra dans son cabinet avec de grandes démonstrations de joie.
    Pinard, sous

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