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La mémoire des flammes

La mémoire des flammes

Titel: La mémoire des flammes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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cadence.
    — Tout est vraiment fini... se murmurait Lefine à lui-même.
    Les Alliés portaient tous un brassard blanc ou une écharpe blanche et les Parisiens croyaient qu’ils manifestaient ainsi leur soutien à Louis XVIII. En réalité, il s’agissait seulement d’un signe distinctif, afin de se différencier des soldats français, car la diversité des uniformes de tous ces pays semblait sans limites.
    Margont voulut penser à autre chose. Il devait penser à autre chose. La Romaine de la mosaïque lui revint en mémoire. Il décida d’assembler une nouvelle fois tous les indices en sa possession. Mais en commençant par ces deux points précis : le comte Kevlokine n’avait pas eu le visage brûlé et l’assassin avait laissé l’emblème des Épées du Roi sur sa dépouille.
    Des gens hurlaient : « Vive Louis XVIII ! Vive les Bourbons ! » et certains emboîtaient même le pas au défilé, suivant les derniers chevaliers-gardes. Mais lui ne les entendait plus, ne les voyait plus.
    Varencourt n’avait pas pu s’empêcher de brûler aussi la deuxième victime. Mais il avait épargné le visage, se contentant de brûlures au niveau des bras. Que se serait-il passé si ce visage avait été mutilé de la même manière que celui du colonel Berle ? Le comte Kevlokine n’aurait pas été identifié. Toutefois, Margont aurait probablement fini par être dépêché par Joseph sur les lieux du crime, en raison de la présence du symbole des Épées du Roi. Les deux éléments se combinaient donc pour aboutir à une même conséquence : que Margont soit amené à enquêter sur la mort du comte Kevlokine. Or Varencourt voulait usurper son identité. Pourquoi ce dernier avait-il besoin de devenir « l’homme qui enquête sur le meurtre du comte Kevlokine » ?
    Margont parvint enfin à relier entre eux tous les indices. Oui, cette fois, il avait bien inclus les deux éléments discordants qu’il avait mis de côté jusque-là. Mais, maintenant, le motif d’ensemble n’était plus le même. Seules quelques tesselles avaient changé de place et, pourtant, ce n’était plus le visage de Napoléon qui apparaissait. Il attrapa Lefine par le bras.
    — Varencourt va tuer le Tsar. Il a fait croire aux Épées du Roi que son plan était d’empoisonner Napoléon, car il avait besoin de leur aide. Mais, en réalité, il les a manipulés comme il m’a manipulé, moi ! Il a assassiné le comte Kevlokine pour approcher Alexandre !
    — Mais...
    — Le Tsar connaissait le comte Kevlokine. Il voudra savoir qui a tué son ami et l’a mutilé. Il n’est pas impossible qu’il accepte de recevoir lui-même une personne qui aurait des informations à ce sujet. Or, si Alexandre est assassiné par un « officier français », le « major Margont », muni d’un ordre de mission émanant de Joseph Bonaparte, tous les soldats russes croiront que leur Tsar a été exécuté sur l’ordre de Napoléon. Du coup, ils se déchaîneront contre Paris ! Ils mettront tout à feu et à sang ! Ce que veut Charles de Varencourt, c’est que l’Empereur erre dans Paris en cendres, au milieu des décombres des monuments qu’il a fait construire et des cadavres calcinés de personnes qu’il appréciait. Voilà le véritable visage de la vengeance de Varencourt : que Napoléon vive exactement ce que lui-même a vécu. Le principe de la loi du talion, c’est de se venger à l’identique. OEil pour oeil, dent pour dent, Paris pour Moscou !
    Lefîne cherchait une objection. Margont ajouta :
    — Le Tsar mort et Paris rayé de la carte par le feu car les Russes incendieront tout ! Une vengeance contre les deux responsables, parce que même si Alexandre ne voulait pas la destruction de Moscou, il a été incapable d’enrayer la succession d’événements qui a abouti à cette catastrophe. Tout a commencé à Moscou, tout va finir à Paris. Dès le désastre de la retraite de Russie, Charles de Varencourt a deviné que, tôt ou tard, l’Empire finirait par s’effondrer. Il est donc venu ici et il a préparé son plan tandis que, petit à petit, le Tsar et les autres têtes couronnées d’Europe se rapprochaient de la France, en rêvant de faire un jour leur entrée triomphale dans Paris, comme nous avons nous-mêmes défilé dans Vienne, Berlin, Madrid, Moscou. ... Il a progressivement adapté son plan aux événements et aux opportunités... Sa vie ayant été détruite, il n’y avait que le feu en lui. Le

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