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La mémoire des flammes

La mémoire des flammes

Titel: La mémoire des flammes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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affiches que vous leur avez permis d’imprimer, ils doivent quand même bien commencer à vous prendre pour un royaliste puisque, même moi, je me pose la question !
    Margont bouillonnait. « Ne pas répondre, ne pas répondre : il est sot de répondre aux imbéciles », se répétait-il.
    — Soit ils vous feront quérir à l’imprimerie. Dans ce cas, débrouillez-vous pour avertir Jelent. De toute façon, je vous l’ai dit, des agents surveillent les lieux et vous suivront tandis que d’autres iront alerter la troupe. Soit ils se rendront à votre domicile, que je fais pareillement espionner. Rassurez-vous, ma police sait y faire !
    Margont était de plus en plus inquiet. En même temps, il était forcé d’admettre qu’il n’avait pas repéré cette surveillance dont il était l’objet. Joseph poursuivit avec une assurance factice qui finissait par le berner lui-même :
    — De même, Catherine de Saltonges et M. de Varencourt sont maintenant eux aussi espionnés jour et nuit. Ah, Varencourt ! L’une des choses les plus sensées que vous ayez pu dire est que vous vous méfiez de lui. Nous aussi ! Il ne nous a jamais parlé de ce troisième plan, il nous réclame sans cesse de l’argent... Il ignore que nous avons décidé de procéder à une arrestation générale. Il ne sait pas non plus que nous faisons surveiller son domicile. Seulement son domicile, car il est impossible à suivre ! Pour qu’il ne se doute de rien, nous lui avons fait croire que nous voulions encore plus de renseignements sur ce groupe et nous lui avons promis une prime. Vingt mille francs. M. Natai m’a signalé qu’à l’annonce de ce montant Charles de Varencourt était aux anges. Corbeau ! Cette opération sera supervisée par le supérieur de Natai, M. Palenier, qui est au courant de toute l’affaire.
    Talleyrand se pencha vers Margont et susurra :
    — Lors de notre première rencontre, nous vous avions promis cinq mille francs. Vous, bien sûr, ce n’est pas l’argent qui vous motive... Et les finances impériales ne sont malheureusement plus ce qu’elles étaient. D’un autre côté, il serait injuste d’envisager d’offrir vingt mille francs à un traître et seulement cinq milles à un homme loyal. Donc nous vous posons la question : souhaitez-vous vous aussi vingt mille francs en cas de succès de votre part ? Il vous suffit de les demander.
    Cet homme tortueux se livrait à une étrange expérience dont le fin mot était de démontrer que les idéalistes étaient eux aussi corruptibles : leur prix était seulement plus élevé que celui de tout un chacun.
    — Votre Excellence, répondit Margont, je me contenterai plutôt de l’imprimerie Le Liseron et de l’autorisation de lancer un journal. Je vous propose d’utiliser cet argent pour me l’acquérir...
    — Encore ? Mais ce n’est plus une manie, c’est une maladie ! s’emporta Joseph. Soit, aidez-nous à les jeter tous en prison et vous les aurez, votre machine à faire des taches et votre journal !
    Margont dissimula sa joie. Mais, aussitôt, une nouvelle inquiétude chassa celle-ci.
    — Que leur arrivera-t-il, à ces prisonniers ?
    Talleyrand plissa les yeux.
    — Oh, des scrupules... Ils ne seront pas exécutés, ni torturés. Nos ennemis ont capturé autant des nôtres que nous des leurs, alors tout le monde traite au mieux ses captifs.
    C’était un point de vue très partisan. Autant c’était souvent vrai pour les « hauts personnages », autant les simples soldats, les sous-officiers et les officiers subalternes, eux, connaissaient parfois des conditions de détention épouvantables, en Espagne, dans les pontons anglais, dans les geôles humides du château d’Édimbourg, en Russie... Cependant, ni Joseph ni Talleyrand ne risquaient de faire condamner à mort ces royalistes. Pas alors que les Alliés avaient des chances de remporter la bataille. Les faire pendre, cela aurait été se pendre soi-même avec le même noeud coulant...
    — Il y a déjà bien assez de sang qui coule, surenchérit Joseph. Seuls celui ou ceux qui ont assassiné le colonel Berle et le comte Kevlokine sont passibles de la peine capitale, mais après un procès équitable.
    — Comment se passerait cette arrestation ? interrogea Margont. Même si, quand le comité directeur se réunit, tous les autres membres ne sont pas présents, on ignore combien d’entre eux font le guet aux alentours. Ils sont nombreux : une trentaine,

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