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La mort du Roi Arthur

La mort du Roi Arthur

Titel: La mort du Roi Arthur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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guéri. Mais, assurément, j’ai été fort mal et même en danger de mort, à ce que l’on m’a dit. C’est au tournoi de Caerwynt que j’ai été blessé par un chevalier, au cours d’une joute. La blessure était tellement plus mauvaise que je n’avais d’abord cru que je ne saurais encore monter sans difficulté. – Du moment que te voici convalescent, qu’importe ? repartit Gauvain. Dis-nous seulement quand tu penses être en état de reparaître à la cour ? – Le plus tôt possible, assurément ! » répondit Lancelot. Le médecin intervint alors : « Il sera complètement guéri dans une huitaine, je vous le promets. Il pourra alors monter à cheval et porter les armes aussi vaillamment que, naguère, à Caerwynt. » Et tous se réjouirent de cette nouvelle.
    Quand ils furent à table, Gauvain dit en riant à Lancelot : « À propos du chevalier qui t’a infligé cette grave blessure, sais-tu qui il était ? – Non, certes, répondit Lancelot, mais si je le connaissais et si je le rencontrais dans une joute, je m’empresserais, crois-moi, de le récompenser de sa vaillance comme il ne l’a jamais été, car je lui ferais volontiers sentir si mon épée est susceptible de trancher l’acier. Et s’il m’a tiré du sang en abondance, je lui en tirerai autant, sinon davantage. » À ces mots, Gauvain s’esclaffa et se mit à battre des mains, puis il dit à Bohort : « Eh bien, mon ami, prends garde ! Car celui qui te menace est loin d’être le plus mauvais chevalier du monde ! S’il m’avait ainsi menacé, je n’aurais de cesse, pour ma tranquillité, que je n’aie conclu la paix avec lui.
    — Comment ? s’écria Lancelot. Dois-je comprendre que c’est Bohort qui m’a ainsi blessé ? » Bohort baissait la tête et, tout penaud, ne savait que dire. À la fin, il se décida et avoua : « Oui, beau cousin, c’est moi. J’en suis vraiment désolé, mais nul n’a droit de m’en blâmer, car si tu es vraiment l’homme que j’ai blessé, ainsi que le prétend Gauvain, conviens toi-même que tu étais si bien déguisé que je ne pouvais certes pas te reconnaître. Toi qui portes les armes depuis au moins vingt ans, tu te présentais à moi sous l’aspect d’un débutant ! Et voilà pourquoi je n’ai pu te reconnaître. Aussi pensé-je que tu ne saurais sans injustice m’en vouloir. »
    Ils parlèrent encore longtemps de l’événement, et Gauvain, non par méchanceté, mais par pure ironie, maintenait d’autant plus volontiers la conversation sur ce sujet qu’il s’amusait davantage de voir Bohort aussi confus et attristé que s’il avait commis le plus grand forfait du monde. Ils séjournèrent là, tous ensemble, une semaine, et chacun se réjouissait grandement qu’à vue d’œil, Lancelot recouvrât force et santé. Mais aussi longtemps qu’ils demeurèrent chez la dame, Bohort n’osa pas souffler mot de ses conversations avec la reine, de peur que les tourments de Lancelot n’en fussent renouvelés.
    Au demeurant, la reine Guenièvre était de son côté plongée dans l’affliction et le désespoir. Outre l’absence prolongée de Lancelot, la liaison prétendue de celui-ci avec la Demoiselle d’Escalot l’avait précipitée dans des abîmes de mélancolie. Ne pouvant admettre qu’il demeurât si longtemps éloigné de la cour, elle était convaincue que sa maladie n’était qu’un prétexte pour demeurer dans les bras de la fille du vavasseur. Et elle en venait à le haïr, tant la jalousie la rongeait cruellement, et il n’était honte qu’elle n’eût voulu lui voir subir. Et que Bohort et ses compagnons eussent abandonné la cour dans l’espérance de retrouver Lancelot, elle en était si navrée, comme d’une perte définitive, qu’elle ne savait plus que devenir. Elle aurait bien aimé les voir revenir, car elle se plaisait en leur compagnie, qui lui tenait lieu de réconfort, et il n’était personne qu’elle appréciât autant qu’eux. Dans ses heures de solitude, elle se disait parfois qu’elle ne connaissait aucun chevalier plus capable que Bohort de régner sur un grand royaume.
    Cependant, dès que Lancelot, ayant recouvré forces et santé, se sentit suffisamment rétabli pour porter les armes, il dit au médecin : « Ne te semble-t-il pas que je puis maintenant disposer de moi-même sans rouvrir la maudite blessure qui m’a si longtemps immobilisé ? – Je peux t’assurer, répondit le médecin, que tu ne

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