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La naissance du roi Arthur

La naissance du roi Arthur

Titel: La naissance du roi Arthur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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inextricables
halliers d’une mythique forêt de Brocéliande. Cette complexité s’explique par
le fait que les légendes du Graal et du roi Arthur ont été transcrites du XI e au XV e siècle par des écrivains appartenant à la fois à divers
peuples, à diverses cultures, et à des systèmes de pensée parfois très éloignés
les uns des autres. De plus, ces légendes sont d’origines géographiques
multiples, et leur contenu idéologique réalise une sorte de synthèse entre une
tradition que, faute de mieux, on qualifiera de « païenne »
(notamment druidique), et un contexte judéo-romano-chrétien qui est celui de l’époque
charnière de l’histoire du christianisme occidental : c’est en effet le
moment où se définit le dogme de la transsubstantiation (1205), où s’affirment
les pratiques de dévotion à la Vierge Marie, héritière des anciennes croyances
en la Mère universelle, où se manifeste, notamment à Fécamp et à Bruges, le
culte du Précieux Sang de Jésus, moment où, hélas, débute une impitoyable
répression contre tous ceux qu’on appelle des hérétiques, moment également de
la formulation théologique de Thomas d’Aquin et du passage fort inquiétant de
l’idéologie inhérente au style roman à celle qui prévaut dans l’art gothique [1] . C’est donc dans un contexte
tourmenté, riche en débats de toutes sortes, en remous politiques,
intellectuels et spirituels, que s’élaborent les fameux Romans de la Table
Ronde. On comprend alors comment l’Arthur primitif, de simple chef de clan
romano-breton qu’il était historiquement [2] ,
soit devenu un puissant roi cristallisant autour de lui d’innombrables éléments
empruntés ici et là, tous greffés sur des schémas archaïques – et très
celtiques – concernant le « Roi du Monde », roi de type sacré et
pivot obligatoire d’une société d’hommes libres et responsables.
    Arthur est en effet un personnage historique des environs de
l’an 500 de notre ère. Il était, d’après les documents fiables (en latin) qui
le concernent, un dux   bellorum , c’est-à-dire un « chef de
guerres », louant ses services aux rois bretons qui avaient besoin de
guerriers pour repousser les invasions saxonnes dans ce qui était alors l’île
de Bretagne, autrement dit la Grande-Bretagne actuelle. L’époque était celle de
la fin de l’Empire romain et du début de la civilisation mérovingienne, du
moins sur le continent, et il est plus vraisemblable d’imaginer cet Arthur
revêtu d’un uniforme romain du Bas-Empire que de le décrire sous l’aspect d’un
roi Plantagenêt du XII e siècle. Et son champ d’action a été
essentiellement le comté de Cornwall, avec la fameuse forteresse de Tintagel,
le Devon (où l’on retrouve le nom du peuple gallo-breton des Dumonii ), le Somerset, avec Glastonbury, qui
deviendra le haut lieu du Graal, la fameuse île d’Avalon de la mythologie, le
sud du Pays de Galles, avec le camp romain de Caerlion-sur-Wysg, et le pays dit
des Bretons du Nord, autour de Carlisle, le Carduel des romans arthuriens. Les succès obtenus par Arthur contre les envahisseurs
germaniques semblent avoir été d’une réelle importance et avoir reculé d’une
cinquantaine d’années la prise de possession, par les Saxons, de la plus grande
partie de l’île. Mais les victoires d’Arthur, jointes à sa fin tragique en face
d’un rival (le Mordret de la version dite cistercienne), ont provoqué
l’imaginaire des Bretons soumis aux Saxons ou réfugiés dans les régions les
plus occidentales de l’île, Cornwall et Pays de Galles ( Cymru ). Le personnage s’est vu gratifié d’une
véritable auréole de sainteté et de nationalisme, et il est devenu au cours des
siècles suivants le symbole de la résistance bretonne contre l’oppresseur
germanique, le grand roi mainteneur des traditions celtiques, le puissant
« empereur » seul capable de s’opposer aux forces du désordre. Et
dans ce cheminement imaginaire, le héros réel ne pouvait que rencontrer des
figures mythologiques très anciennes et les intégrer dans son propre
personnage. Sait-on que le nom d’Arthur provient d’un terme celtique ( arth en gallois, arz en breton) qui désigne l’ours ? Or, dans la symbolique celtique, l’ours
représente la caste royale issue de la classe des guerriers. De plus, il est
certain que cette image de l’ours, en dormition pendant l’hiver et se
réveillant aux beaux jours,

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