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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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bâillonnait.
    Elle sentit la brûlure des larmes sur ses
joues.
    — Partir loin de vous.
    Hitler eut un instant d’hésitation, et elle
craignit qu’il ne la frappe, mais il continua comme si elle l’avait encouragé.
    — Tu voudrais retourner à Vienne ?
    Elle se sentit dans la peau d’une enfant à qui
on ferait choisir un cadeau. Elle dit oui.
    — Tu me laisseras faire ce que je veux ?
    Elle n’avait pas le choix. Elle acquiesça.
    Le 11 septembre elle
accompagna Hitler qui voulait passer rapidement à la Maison brune avant d’aller
voir à la séance de l’après-midi un film d’alpinisme intitulé L’Enfer blanc
de Piz Palü, avec Luis Trenkel et Leni Riefenstahl. Mais le Führer mettait
si rarement les pieds dans son bureau que Rudolf Hess et Franz Xaver Schwarz s’empressèrent
de profiter de sa présence pour lui faire enfin signer des documents et étudier
avec lui le planning des prochains événements.
    En l’attendant dans le couloir, elle examina
une aquarelle maladroite du putsch du Feldherrnhalle le 9 novembre 1923, montrant
un Hitler téméraire et plus grand que nature, le poing levé dans un geste de
défi, qui essuyait une fusillade des policiers en uniforme vert, tandis que ses
camarades tombaient à ses pieds. Les autres visages étaient difficiles à
reconnaître, à part l’homme petit et furtif derrière lui qui semblait bien être
Erich Ludendorff. L’intendant général d’armée et son oncle ne se parlaient plus,
elle le savait, et elle supposa que le tableau avait été accroché dans le
couloir pour modifier l’histoire, car à l’époque du putsch Ludendorff était le
héros, et certains correspondants étrangers appelaient son oncle « le
bruyant lieutenant de Ludendorff ». Pour son oncle, les faits n’étaient
tout bonnement que des instruments à diriger.
    Son porte-documents à la main, un Heinrich
Hoffmann jovial descendait des bureaux de l’étage supérieur avec Putzi
Hanfstaengl, qui lui avait posé la main sur l’épaule et avait l’air d’un géant
à côté de lui, mais leurs visages se fermèrent lorsqu’ils aperçurent Geli, qu’ils
ne daignèrent pas saluer, et Geli crut entendre Putzi murmurer « roulure
sans cervelle », lorsqu’ils sortirent du bâtiment.
    Un Rudolf Hess trop empressé vint la trouver
dans le couloir.
    — Nous avons de nombreuses transactions
et délibérations qui exigent l’indispensable sagesse de notre Führer. Il le
regrette profondément, et vous suggère d’aller au cinéma sans lui.
    — Certainement, répondit-elle en cachant
sa satisfaction.
    C’était lui qui voulait voir ce film. Elle
décida plutôt de profiter du beau temps pour se promener jusqu’aux étals des marchands
de fruits du marché aux victuailles et les centaines de boutiques tout autour
des pierres grises de l’hôtel de ville et de Marienplatz. Elle se régala du
spectacle des cracheurs de feu, jongleurs, joueurs d’accordéon, d’un vieil
homme qui avalait des tessons de bouteille en souriant, d’une femme blonde et
robuste qui, sous le nom de « Madame Personne », tordait des barres
de fer à mains nues pour dix pfennigs. Elle acheta à un kiosque le best-seller
pacifiste d’Erich Maria Remarque À l’ouest rien de nouveau, et le lisait
en buvant une chope de Franziskaner, installée à une terrasse de Neuhauserstraße,
juste en face de l’église Saint-Michel, lorsqu’une voix d’homme lui fit lever
la tête.
    — Quelle bonne surprise !
    Elle mit sa main en visière devant ses yeux
mais ne distingua pas tout de suite le visage de l’homme en question tant le
soleil brillait derrière lui. Alors il gagna l’ombre en boitant et elle vit un
grand prêtre à l’allure de soldat, la cinquantaine, vêtu d’un manteau et d’un
chapeau de lainage noir, le jésuite qu’elle avait rencontré sept ans auparavant
à la Hofbräuhaus, celui qui avait regretté de lui dire que son oncle était un
homme dangereux.
    — Vous êtes nazie à présent ? lui
demanda-t-il.
    Elle lui dit que non. Puis elle se souvint qu’il
s’appelait Rupert Mayer.
    — C’est votre bijou qui tend à le faire
croire, dit-il.
    Elle tripota la croix gammée en or qui ornait
son cou.
    — Un cadeau. Voulez-vous vous asseoir ?
    — J’ai des confessions dans peu de temps.
Un catholique ne peut être antisémite, reprit le jésuite d’un ton ferme. Vous
savez cela ?
    Elle répondit par l’affirmative sur un ton
amical, mais peu

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