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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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ce
que tu veux faire ?
    — On m’a déjà offert un poste à Linz pour
l’an prochain, quand j’aurai mon diplôme.
    — Bravo !
    — Merci. Tu fais toujours médecine ?
    — Je n’ai pas entièrement abandonné l’idée.
    — Donc, tu as arrêté.
    — J’ai d’autres préoccupations.
    Il eut un sourire entendu et lui dit qu’en ce
qui le concernait, son « autre préoccupation » était une Française
prénommée Anne avec qui il espérait bien se fiancer, même si c’était une
mésalliance aux yeux d’oncle Adolf.
    — Tu fréquentes quelqu’un ? demanda-t-il
à sa sœur.
    — Oui.
    — Qui est-ce ?
    — Devine.
    — Il est ici ?
    — Tu es très observateur !
    Le frère de Geli posa son menton sur un poing
et se mit à réfléchir, plissant les yeux en aspirant la fumée et en faisant
tomber sa cendre.
    — Emil Maurice ? finit-il par
demander.
    — Ce n’est pourtant pas bien difficile.
    — Tu sais, ce n’est pas si évident.
    — Vous n’avez pas parlé tous les deux ?
    — Il ne t’a pas mentionnée.
    Elle lui donna une tape sur l’épaule.
    — C’est vrai.
    — Tu n’es pas obligé de le dire, même si
c’est vrai.
    — Tu l’aimes ?
    — Je n’en suis plus si sûre.
    — Ne fais pas la mauvaise tête !
    — On aurait pu penser qu’il aurait des
milliers de choses à demander à un grand frère.
    — C’est Adolf qui a parlé de toi. « Un
amour. Vraiment délicieuse. »
    — Décidément, il m’adore, soupira Geli.
    — L’oncle était ma deuxième idée.
    — Tu ne trouves pas ça bizarre ?
    — D’abord, il n’est que ton demi-oncle. Les
Schicklgruber ne sont de notre sang que pour un quart.
    — Et il a dix-neuf ans de plus que moi.
    — Oh, la différence d’âge ! dit Léo.
On s’en moque !
    Des rayons blancs acérés traversèrent un
palais de nuages. Au loin, l’Île-aux-Femmes et ses bateaux de pêche furent
repeints avec leur ombre.
    — J’ai la nette impression que tu n’aimes
pas Emil, dit Geli.
    Son frère écrasa son mégot dans le sable.
    — Mais si je l’aime bien ! Et je
crois bien que toi aussi, d’ailleurs.
    Le soir tomba. Putzi
Hanfstaengl s’endormit dans un hamac venant de Bombay, qu’il avait installé
entre deux arbres, pendant qu’Henny, son père, Emil, Schaub et le frère de Geli,
disposés en étoile dans une clairière, se faisaient des passes avec un ballon
de football blanc tout éraflé, les hommes le torse et les pieds nus, buvant des
Spaten qu’ils tenaient par le goulot, fumant les cigares Palo d’Hoffmann, critiquant
les fautes ou les imperfections de jeu. Hitler criait ses propres commentaires,
languissamment allongé sur une chaise longue rayée, une tasse en porcelaine
remplie d’eau minérale Apollinaris posée contre sa poitrine. Un violent coup de
pied fit rouler la balle vers lui, et il la renvoya en la faisant lentement
glisser avec une feinte. Schaub le félicita.
    Geli cala un plaid et le panier de pique-nique
dans le coffre de la Mercedes, se trouva une Spaten encore fraîche et alla
tranquillement s’asseoir à côté de son oncle sur des fougères moelleuses.
    — Ah, de la compagnie, dit celui-ci avec
un sourire.
    — Vous êtes heureux ?
    — Très.
    À la manière européenne, sa familiarité devant
la nudité de la jeune fille était contrebalancée par une raideur qui aurait
semblé guindée dans un hôtel de luxe. Il fronça les sourcils.
    — Tu as pris des coups de soleil.
    — Toutes les filles bronzent à qui mieux
mieux à présent. C’est la mode.
    — Ah bon ? J’ignorais.
    Elle hocha la tête en buvant sa bière.
    — Vous n’aviez pas envie d’aller nager ?
demanda-t-elle.
    — Oh, non ! On pourrait me prendre
en photo. Il y a peu de choses aussi affligeantes que la vue d’un homme
politique en costume de bain.
    — Mais, oncle Adolf, vous seriez
sensationnel !
    — Je trouve ton innocence tout à fait
charmante.
    Emil envoya la balle en hauteur et Léo fit une
tête qui l’expédia dans le visage de Schaub. Les yeux ronds, Schaub contempla
son cigare tout écrabouillé comme s’il venait d’exploser, comme dans un dessin
animé, et tous les autres se tordirent de rire.
    — Même dans un groupe on peut se sentir
très seul, dit Hitler en les regardant. Que ce soit par la force de son esprit,
de son caractère ou une autre caractéristique inhabituelle, on devient distant,
différent, un étranger. C’est le premier risque de

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