Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
Vom Netzwerk:
fille qu’il
lui procurait.
    Geli changea de sujet en lui faisant remarquer
qu’elle serait à deux pas de chez Henny Hoffmann, que des restaurants quatre
étoiles bordaient la grande avenue, qu’elle habiterait sous les feux des
lumières du magnifique Prinzregenten Theater, lequel, lui dit-elle d’un ton
pédant, était spécialisé dans les opéras wagnériens et construit sur le modèle
du théâtre du Festival de Bayreuth.
    — La belle affaire ! répondit-il.
    Et il gara la voiture.
    L’immeuble de cinq étages de
Prinzregentenplatz était en granit couleur sable, avec des bordures bleues et
blanches. Deux séries de fenêtres à encorbellement encadraient de larges
balcons au premier, deuxième et troisième étages. Une frise de pierre grise
représentant Wotan surplombait l’entrée ; des carreaux verts et gris
recouvraient les murs du grand escalier menant aux étages supérieurs, où l’éclairage
au gaz venait d’être remplacé par l’électricité.
    Emil actionna la sonnette près des deux
grandes portes de chêne du premier étage.
    — Tu es impressionnée ?
    — La résidence des Raubal à Vienne
ressemblait beaucoup à ça.
    — Rats et cafards compris ? sourit Emil.
    — Des tas d’animaux domestiques.
    Le Haushofmeister apparut, souhaita la
bienvenue à Fräulein Raubal et à son vieil ami Emil, et les invita à entrer. Georg
Winter, jeune homme blond à l’ossature fine, approchant la trentaine, avait été
l’ordonnance du général Franz Xaver Ritter von Epp, à présent député
national-socialiste au Reichstag. Winter était un membre du parti zélé, ironique,
et à l’humour souvent désabusé. Il portait une chemise blanche empesée, un
costume noir de maître d’hôtel et un nœud papillon, ainsi qu’un insigne rouge
et noir avec une croix gammée. Après avoir pris sans rien dire le manteau de
Geli et la cage des canaris, il s’en fut, suivi par Emil, et elle resta là à
fixer le parquet de chêne à chevrons de l’entrée et des couloirs, et le lambris
fraîchement peint de blanc des murs.
    Tout en ôtant un grand tablier blanc et en
époussetant des traces de farine sur sa courte robe noire, Anni Winter arrivait
du fin fond de l’appartement, sans doute de la cuisine. Elle fit une révérence
à la nièce d’Hitler, mais se présenta familièrement comme Anni, et en quelques
minutes s’arrangea pour que Geli sache qu’elle avait été dame de compagnie de
la comtesse Törring, qu’elle était une cuisinière internationalement connue, et
qu’elle pensait que cet emploi était au-dessous d’elle, si ce n’était la chance
de côtoyer Hitler de si près.
    — Et quel âge a mademoiselle ?
    — Vingt et un ans.
    — J’en ai moi-même vingt-quatre, dit Anni
Winter.
    Elle semblait penser qu’elle devait endosser
le rôle d’une sœur aînée, et l’autorité qui va avec.
    — Nous devrions bien nous entendre, alors,
dit Geli.
    Anni se contenta de la dévisager.
    — Il peut s’avérer difficile de
travailler pour des personnes qui n’ont pas grandi avec des domestiques. Il y a
tant de choses à leur apprendre.
    — Je suis sûre que vous serez le plus patient
des professeurs.
    Anni eut un sourire affecté. Elle lui montra
un salon éclairé de quatre fenêtres à encorbellement où un lampadaire à franges
jaunes trônait à côté d’une grande table ronde en acajou, sur un tapis de
William Morris à motifs de vigne et de grenades. Six chaises à l’assise moelleuse
entouraient la table. Elles étaient de couleur bordeaux, lui apprit Anni. Un
salon encore plus imposant lui fut présenté comme « la bibliothèque »,
bien qu’il ne contînt que neuf petites étagères avec les livres préférés d’Hitler,
dont six exemplaires de Mein Kampf, Le Juif international d’Henry Ford, et
la collection des westerns de Karl May. Un portrait coûteux de Bismarck par le
Munichois Franz von Lenbach lui-même avait été suspendu juste au-dessus du
secrétaire. Un tapis Wilton à motif de tulipes et lis recouvrait le sol, et
deux sofas fleuris flanquaient un fauteuil de cuir souple en face d’une porte
arrondie menant au balcon. Le Bechstein blanc qu’elle avait vu dans le
vestibule du 41, Thierschstraße se blottissait contre le mur opposé à la
manière de sa tante Paula.
    — Il y a ici des choses appartenant à
Frau Reichert ? demanda-t-elle.
    — Mon mari et moi n’avons pas été
informés des détails de leur arrangement, répondit

Weitere Kostenlose Bücher