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La nuit de l'ile d'Aix

La nuit de l'ile d'Aix

Titel: La nuit de l'ile d'Aix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gilbert Prouteau
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Atténués par l’éloignement, des grands cris parvenaient jusqu’à nous. Il n’y avait pas à douter. L’hôte illustre arrivait... Nous voyions le grand petit homme. Il avait plutôt la mine d’un gros moine espagnol que du héros des temps modernes. »
    Et tandis que le grand petit homme saisit les tire-veilles des échelles de la passerelle, Maitland rayonnant se tourne vers Gambier, explose, glousse et résume d’un mot la finalité de ses manœuvres   :
    —  I have got him   » (je l’ai eu). Puis il verrouille sa jubilation pour accueillir Napoléon.
    —  Commandant, je viens me mettre sous la protection de votre prince et de vos lois.
    Dépêche du général Bekerau ministre de la Guerre
    « Rochefort, le 15 juillet 1815
    Monseigneur,
    J’ai l’honneur d’informer Votre Excellence que la mission dont m’avait chargé le gouvernement provisoire pour accompagner l’Empereur jusqu’à Rochefort a été terminée aujourd’hui en rade de l’île d’Aix, à trois heures du matin. »
    5 heures du matin
    Accoudé au bastingage, Napoléon braque encore une fois ses jumelles sur les pertuis, cerne une voile qui s’éloigne et se fond à l’horizon.
    « Le 15 juillet, le Magdalena met à la voile et quitte la rade sous les yeux de l’Empereur. Elle devait atteindre l’Amérique après une traversée courte et heureuse, sans jamais avoir été inquiétée. »

 
    ÉPILOGUE
    « Napoléon a clos l’ère du passé...
    Retomber de Bonaparte et de l’Empire à ce qui les a suivis c’est tomber de la réalité dans le néant, du sommet d’une montagne dans un gouffre. Tout n’est-il pas terminé avec Napoléon. Quel personnage peut intéresser en dehors de lui ? De qui et de quoi peut-il être question après un pareil homme ?... L’âme manqua à l’univers nouveau sitôt que Bonaparte retira son souffle : les objets s’effacèrent dès qu’ils ne furent plus éclairés à la lumière qui leur avait donné le relief et la couleur. »
    C HATEAUBRIAND
    1815 marque la fin d’un monde, mais des millions d’hommes et singulièrement les acteurs de la tragédie vont être à jamais marqués au fer dans leur chair, bouleversés dans leur cœur et enchaînés par la nostalgie de l’irremplaçable... Ceux-là ne pourront désormais que barboter dans un sillage. Leur vie garde à tout jamais l’empreinte de ces jours, de ces nuits et de ces nuées.
    Nous allons mesurer cette empreinte à travers les heurs et les malheurs, les grâces et les disgrâces des personnages de notre récit.
    Le destin de ceux qui ont été mêlés à la tourmente de l’île d’Aix va s’infléchir selon qu’ils ont donné leurs gages au pouvoir – ou leur âme au vaincu.
    Mais les rêves américains nourris par Napoléon, du bureau de la Compagnie du Sciotto à la rade de Rochefort, vont pousser leurs sèves et leurs greffes au-delà de son empire et de sa vie. Une part importante de cet héritage va s’épanouir et se ramifier aux États-Unis et donner aux songes caressés comme aux velléités ébauchées des prolongements imprévisibles...
    Examinons l’héritage et les séquelles du drame de l’île d’Aix à l’échelle nationale.
    Le 20 juillet 1815, cinq jours après la reddition de Napoléon, accompagnés de cuirassiers de Schwarzenberg, Letizia Bonaparte et le cardinal Fesch prennent de nuit la route de la Bourgogne. À 5 heures du matin à Bourg-en-Bresse, Letizia écoute une messe dans sa chambre. La nouvelle de sa venue s’est répandue et la foule qui s’était amassée autour de la voiture crie   : « Vive Madame Mère   ! » Elle remercie d’un bras lassé. Elle s’en va vers un autre destin qui sera mis en chanson.
    La noble dame en son palais de Rome Aime à filer, car bien jeune autrefois Elle filait en allaitant cet homme Qui depuis l’entoura de reines et de rois. Près d’elle assise est la vieille servante Qui, nouveau-né, le reçut dans ses bras. Au bruit de leurs fuseaux elles disaient, hélas Que la fortune est décevante.
    Lorsque Besson rentra quelques mois plus tard avec un caboteur de Rochefort, il demanda une entrevue à M. de Bonnefous pour lui exprimer son désir de se remettre à la disposition de l’administration maritime.
    —  Vous connaissez la nouvelle   ? dit M. de Bonnefous.
    —  Quelle nouvelle   ?
    —  Les Anglais ont décidé d’exiler l’Empereur à Sainte-Hélène.
    —  Sainte-Hélène... ?
    Dans la mémoire de Besson cinglait

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