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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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abandonna dans le canot qui l’avait amené. Earl et Mary donnèrent la voile, tandis que les autres s’activaient au cabestan à remonter l’ancre, et le sloop quitta le port sans être inquiété.
     
    Au matin suivant, La Revanche et Le William s’étaient éloignés des côtes et filaient de concert dans une brise légère.
    Ann s’éveilla, la bouche pâteuse et l’esprit embrumé. Elle bondit en découvrant les voiles du sloop par bâbord arrière.
    — Crève Dieu ! jura-t-elle.
    Le rire de Mary Read éclata à côté d’elle, dans celui de Rackham.
     
    Quelques heures plus tard, après avoir inspecté son navire laissé au commandement de Fertherston, Ann rejoignait Mary sur la hune de La Revanche, le cœur léger.
    — Sans rancune ?
    — Je ne t’en avais pas gardé.
    — J’avais besoin de toi. Je n’ai pas admis que tu me repousses, avoua Ann.
    — Je ne l’ai pas fait. Ma tendresse est sincère, Ann. Tu devras t’en contenter.
    — Cela me suffit bien. A une condition.
    — Laquelle ? demanda Mary en tirant sur sa pipe.
    — Ne m’abandonne jamais, murmura Ann. Je ne pourrais pas le supporter.
    — Jamais, répéta Mary, le cœur serré, en songeant à tout ce que cette promesse impliquerait.
     
    *
     
    Baletti laissa la barcasse qui l’avait conduit à Cuba contre la coque du Sergent James. Fidèles à leurs engagements, les Vanderluck l’attendaient au port.
    — Où est Mary ? demanda aussitôt Hans, le voyant paraître seul.
    — Auprès d’Ann. Elle a préféré y rester.
    — Venez, lui dit Hans, vous avez l’air épuisé.
    Baletti l’était. Ils se refit en dévorant le souper qui venait d’être servi, leur racontant leur séjour sur La Revanche.
    — Ann sera difficile à apprivoiser, acheva-t-il. Je crains que Mary ne s’abîme à essayer de la récupérer.
    — Un seul pourrait raviver sa mémoire, déclara Hans en se frottant la barbe.
    — Junior ?
    — Junior. À présent que nous sommes certains de l’identité réelle d’Ann Bonny, je crois que nous pouvons tenter de le prévenir.
    — Et Emma ? demanda Baletti.
    — Disparue, envolée, se lamenta James.
    Baletti blêmit.
    — Comment ça, envolée ?
    — Elle a quitté Cuba avant notre arrivée. Ses gens n’ont pu nous en apprendre davantage. Je suis navré, marquis.
    — Il est vraisemblable qu’elle ait regagné la Caroline-du-Sud. Il faut donc me résigner, soupira celui-ci.
    — Occupons-nous d’Ann et de Mary. Emma ne disparaîtra pas, cette fois. Nous connaissons ses points de chute, lança Hans.
    — C’est vrai. D’autant que je n’aime pas savoir Mary à la merci de ce Rackham.
    Vanderluck éclata de rire.
    — Allons donc, marquis. Elle sait mieux se défendre que dix hommes. Vous êtes jaloux, voilà tout.
    — De Rackham, certainement pas, objecta Baletti.
    — Mais d’Ann ?
    Baletti fronça le sourcil.
    — Ne dites pas de sottises, Vanderluck.
    — Vous craignez que Mary ne préfère demeurer auprès d’elle qu’à vos côtés. Avouez-le.
    Baletti porta les mains à ses tempes. Elles le tiraillaient d’une migraine.
    — Je voudrais que tout cela se termine, Hans. Sans elle, une part de moi cesse d’exister, c’est vrai.
    — Elle reviendra, n’ayez crainte.
    Baletti s’adossa au fauteuil et reposa sa serviette sur la table.
    — Combien nous faudra-t-il de temps pour rallier la Tortue ? demanda-t-il seulement.
     
    *
     
    La dispute entre Ann et Rackham forçait les parois de bois du brigantin et les marins n’en perdaient rien, tout en vaquant à leurs quarts. Mary avait achevé le sien. Brown, Fenis et Harwood disputaient une partie de cartes avec elle, au milieu des hommes qui dormaient dans les branles. Au-dehors, une pluie fine battait le pont.
    Ce 30 août 1720 était glacé.
    — Elle l’aura à l’usure, s’amusa Harwood en abattant son jeu.
    Il avait encore gagné.
    — Elle l’a toujours à l’usure, rectifia Brown.
    — Et au ventre, ricana Fenis. Elle a le feu au giron, cette garce.
    Mary jeta son pécule au centre du cercle avant de se lever, de s’étirer et de regagner son branle, épuisée. Elle n’avait aucune envie de les écouter s’en moquer.
     
    Le lendemain, Mary découvrait Ann qui donnait ses ordres pour que La Revanche colle au flanc du William.
    — Que fais-tu ? lui demanda-t-elle après l’avoir rejointe.
    — On change de navire.
    — On quoi ? s’étrangla Mary.
    — J’ai dit à Rackham que je

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