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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ostensiblement le dos.
    — Tu aurais pu partir avec lui.
    Mary ne releva pas, pressée de s’écarter.
    — Je suis de quart, capitaine. Puis-je me retirer ?
    Pour seule réponse, Rackham se détourna d’elle. Mary serra les dents et les poings en se disant qu’elle aurait certainement mieux fait, elle aussi, de déserter.
    — Donne-toi un mois encore, Mary, lui avait dit Baletti. Si, à la prochaine escale de Rackham sur l’île des Pins, tu n’as pas réussi à convaincre Ann, alors tu pourras la laisser à son destin. Mais je te connais. Tu ne pourras te satisfaire de n’avoir pas tout tenté. Alors va. Et pense que, si toi tu y es arrivée, Emma pourrait fort bien la retrouver aussi. De mon côté, avec Hans, je vais la surveiller.
    Mais à présent qu’elle était là, au milieu des matelots de La Revanche, face à la colère rentrée d’Ann, elle se dit que ce mois-là risquait d’être fort mouvementé.
     
    *
     
    — Je m’ennuie, soupira Ann, en regardant les gabiers s’affairer dans les hunes. Nous n’avons fait que des prises insignifiantes. Je rêve d’abordage.
    Rackham, occupé à barrer, suivit son regard. Mary Read s’activait dans la mâture. Ann et lui étaient seuls sur le gaillard d’arrière.
    — Moi aussi, je fourrerais bien son petit cul, lâcha-t-il.
    Ann se retourna, piquée par la jalousie.
    — T’avise pas d’essayer, gronda-t-elle.
    Rackham éclata de rire.
    — J’avais donc raison. C’est bien à elle que tu pensais.
    Ann ne répondit pas, et porta de nouveau son regard vers les gabiers.
    — Je ne savais pas que tu aimais les femmes.
    — Je n’aime pas les femmes. Je l’aime, elle, rectifia Ann.
    — Si tu la veux, je peux la forcer.
    Ann lui fit face.
    — Jamais. Ne fais jamais cela ou je te tuerai.
    — Comme tu voudras. Mais je déteste voir tes désirs insatisfaits.
    — Dans ce cas, donne-moi un navire.
    Rackham faillit s’étrangler.
    — Un navire ? Mais pour quoi faire ?
    — Je veux un navire. A moi.
    — Tu ne saurais pas seulement le mener, se moqua Rackham.
    — Ça m’est égal qu’un autre le mène, du moment qu’il m’appartient.
    — Très bien. Si cela t’amuse. Nous prendrons le prochain qui croisera notre route.
    — À deux bateaux, nous pourrons nous attaquer à de plus grosses prises, justifia Ann.
    — Et faire plus d’abordages… Morbleu, Ann, je n’ai jamais connu quelqu’un qui aime autant le sang que toi.
    — Si, elle.
    Elle laissa un silence douloureux lui étreindre le ventre.
    — J’aurais aimé, murmura-t-elle. J’aurais aimé qu’elle ait pu dire vrai.
    — De quoi parles-tu ?
    — J’aurais aimé qu’elle fût vraiment ma mère. Elle, au moins, ne m’aurait pas reniée aujourd’hui.
     
    *
     
    Deux jours plus tard, un sloop nerveux se profilait à l’horizon. Ils longeaient l’île d’Andros, et Ann s’excita à sa capture la journée durant. Au soir, pourtant, elle cacha sa déception en vidant un pichet de guildive. Le sloop s’était réfugié dans le port de New Providence, et elle avait invectivé Rackham de n’avoir pas su le prendre quand il avait promis de le lui donner. Elle s’endormit, ivre, adossée au mât de misaine, à côté de Harwood tout aussi éméché.
     
    — J’ai besoin de toi, Read, chuchota Rackham, la réveillant dans son hamac. Rejoins-moi sur le pont.
    Mary hocha la tête en pestant.
    Elle trouva Rackham au milieu d’une dizaine d’hommes qui s’étiraient en bâillant.
    — Ann veut ce sloop, dit Rackham. J’ai l’intention de le prendre.
    Mary écarquilla les yeux.
    — Au mouillage ?
    Rackham hocha la tête.
    — Je parie que seule une poignée d’hommes le garde, tandis que les autres festoient à terre.
    — C’est fort probable, en effet, admit Fertherston.
    — Qui en est ?
    Mary leva la main sans hésiter. Elle en avait assez de ne pouvoir approcher Ann, qui persistait à la bouder. Cet argument l’aiderait peut-être à briser ce stupide orgueil dans lequel elle s’entêtait. D’autant que Mary n’était pas dupe. Le regard de sa fille la trahissait.
    Ils descendirent un canot et s’y glissèrent, laissant Ann ronfler en cuvant sa guildive. L’hypothèse de Rackham était juste. Huit hommes seulement étaient à bord. Ils avaient mis en perce un tonnelet de rhum et n’étaient pas plus dangereux qu’Ann. A peine ouvrirent-ils un œil surpris quand ils sentirent la pointe des lames sous leur gosier.
    Rackham les

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