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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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l’aurait pensé.
    — Ce M. de Baletti me semble fourmiller d’idées ! Me le ferez-vous connaître ?
    — Vous aimeriez ?
    — J’aimerai tout ce que vous aimerez, consentit Mary.
    — Le marquis de Baletti a des goûts un peu particuliers. Mais il n’est pas impossible que vous lui plaisiez.
    — Ne me jugez-vous point trop effrontée ?
    — Si, avoua-t-il. C’est ce qui m’a troublé hier. Le fait que ce soit vous qui me choisissiez. Je vous avais repérée depuis longtemps, mais vos prétendants étaient nombreux et certains haut placés… Il eût été logique que vous les préfériez.
    — Le regrettez-vous ? demanda Mary en laissant le drap de soie lui échapper.
    Le valet faillit s’en étrangler.
    — Ce que j’aurais regretté, mon ange, c’est que vous perdiez cette repartie fort… seyante, ajouta-t-il en effleurant son ventre de son visage pour ramasser l’étole à ses pieds.
    Il la lui tendit, mais Mary ne s’en couvrit pas comme précédemment. Pour atteindre son but, il fallait que Boldoni la garde. Elle jeta l’étole négligemment sur ses épaules et le devança dans l’escalier, dans une indécente nudité. Ce que Maria Contini osait, Mary Read ne l’aurait jamais imaginé. Il fallait que ce fût Venise pour qu’elle abandonne ainsi sa pudeur. Le rire émoustillé de Boldoni répondit à son impudence, et sa robe s’attarda encore un peu à sécher.

8
     
     
    S eptembre 1701 n’amena qu’une légère douceur sur la Sérénissime. L’été n’en finissait pas d’être brûlant. S’il n’y avait eu cette petite brise marine qui créait un peu de fraîcheur, Venise s’en serait étouffée.
    Hennequin de Charmont reçut Giuseppe Boldoni, le front mouillé et les mains moites. Ce dernier en fut gêné. L’ambassadeur avait la sueur forte qu’il couvrait d’eau parfumée. Le mélange était d’une fragrance hautement discutable. Il accepta donc de demeurer à l’ombre d’un cerisier, malgré ces relents douteux que les eaux de Venise charriaient. Il y était davantage habitué.
    — Que me vaut votre visite, mon cher ? s’enquit Hennequin de Charmont après avoir demandé qu’on leur serve une citronnade.
    — Que pensez-vous de cette guerre pour la succession d’Espagne ? demanda Boldoni abruptement.
    — En ma qualité d’homme ou d’ambassadeur ?
    — Les deux.
    — Mon suzerain ne peut désavouer sa descendance. Son petit-fils est le successeur légitime du trône d’Espagne vacant. Il ne peut que le soutenir. Evidemment, les Impériaux n’ont pas tort en exigeant qu’il ne puisse prétendre aussi à la couronne de France. On ne saurait réunir sous une même tête ces deux pays. L’équilibre de l’Europe en serait bouleversé. Seule la France y trouverait son compte.
    — Mais si vous étiez ce bon Louis de France ?
    — Je ferais ce qu’il a fait. Jouer sur les deux tableaux et tenir tête au reste du monde. Mais cela ne nous concerne pas, mon cher. Dans ce conflit, Venise garde sa neutralité et nous continuons, vous et moi, à jouir de cette situation privilégiée, même si, je l’avoue, nos trafics sont quelque peu perturbés du fait de l’accroissement des bâtiments de guerre aux abords des eaux territoriales.
    Hennequin de Charmont claqua dans ses doigts boudinés. Il était en nage. Aussitôt, deux esclaves noirs, des enfants, apparurent, chacun d’eux portant péniblement un large éventail de plumes. Ils se placèrent de part et d’autre de la tonnelle et se mirent à les agiter. Un vent salvateur amena un sourire replet sur le visage de l’ambassadeur.
    — Je détesterais être privé de nos petites affaires, mon cher. J’aime les esclaves, vous le savez.
    Boldoni ne tenait pas à goûter ses confidences. Son ton se fit plus sec pour ne pas les encourager.
    — Je vous en laisse le plaisir, j’ai pour ma part d’autres vices.
    — Les religieuses, oui, on me l’a rapporté. Cette Maria Contini est fort charmante, il est vrai. J’espère que vous nous en ferez profiter.
    Boldoni imagina un instant ces mains grasses sur la peau soyeuse de Maria. Il chassa aussitôt cette idée, réprimant un haut-le-cœur. Il n’avait aucune envie de la partager. Pour l’instant, tout au moins. S’il s’en lassait, il aviserait. Il porta la limonade à ses lèvres. Ce vent artificiel avait le bon goût de le rafraîchir mais le mauvais de lui ramener le déplaisant parfum de son hôte. Il ne désirait pas

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