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La Perle de l'empereur

La Perle de l'empereur

Titel: La Perle de l'empereur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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même, quand Adalbert vint dîner – il avait dormi toute la journée ainsi d’ailleurs que Marie-Angéline assommée de fatigue par sa nuit d’aventures ! –, il put embrasser une longue jeune femme brune, belle et pâle dans une robe de crêpe georgette bleu glacier dont le drapé en écharpe autour du cou faisait ressortir la rare couleur violet foncé des yeux.
    — C’est assez surprenant, dit-il en tenant Lisa à bout de bras pour mieux l’examiner, mais c’est loin d’être laid. Et cette couleur vous va à ravir ! Je me demande ce qu’en dira Aldo ?
    — Nous le saurons demain. Je ne veux pas attendre plus longtemps pour le voir. C’est moi qui devrais être auprès de lui. Pas des infirmières inconnues !
    — Cela n’arrangerait rien. Je suis passé à la clinique avant de venir : la fièvre ne cède pas et il est toujours inconscient… C’est assez… impressionnant, même maintenant qu’on l’a débarrassé de sa crasse. Marie-Angéline qui l’a vu quand on l’a ramené au jour a failli s’évanouir…
    Lisa eut un petit sourire et prit par le bras l’intéressée, qui devint toute rouge :
    — Elle a fait preuve d’un courage extraordinaire, n’est-ce pas ? Pourtant je lui en voulais tellement lorsque je me suis retrouvée dans la salle de bains du Continental, ligotée avec des ceintures en éponge. À présent je ne sais que faire pour l’en remercier !
    — Oh ! Je n’en mérite pas tant ! J’ai toujours adoré jouer la comédie, me déguiser, changer de personnage. Celui de Mina Van Zelden me plaît bien…
    — Oui, eh bien vous vous contenterez dans l’avenir immédiat de celui de Plan-Crépin ! intervint la marquise. Il me suffit tout à fait, à moi : la comédie d’hier a bien failli tourner au tragique. Passons à table, en attendant, pour célébrer au champagne  la gloire de notre héroïne !
    — Au champagne ! s’offusqua Marie-Angéline. Alors qu’Aldo est entre la vie et la mort ?
    — Boire de l’eau ne le ramènera pas plus vite à la santé. Nous devons avoir des pensées constructives et, pour moi, le champagne en fait partie presque autant que les prières ! Nous boirons aussi à sa santé. Je suis sûre d’ailleurs qu’il va s’en sortir.
    Et, prenant le bras d’Adalbert, l’indomptable vieille dame se dirigea vers la salle à manger ; mais il y avait des larmes dans ses yeux.
     
    Ceux de Lisa étaient secs mais inquiets lorsque, le lendemain après-midi, elle franchit, accompagnée d’Adalbert, le seuil de la clinique du Pr Dieulafoy. L’infirmière-chef qui les reçut était grande, maternelle et compétente. Elle les emmena dans son bureau où elle offrit à Lisa un siège et une cigarette.
    — Vous pensez que j’ai besoin de réconfort ? murmura celle-ci avec un regard incertain.
    — On en a toujours besoin. La fièvre a baissé. Pas suffisamment encore et le malade reste faible, à peu près inconscient. Le professeur s’est montré plus optimiste ce matin mais, quand il s’agit d’un cas… préoccupant comme celui-là, j’ai l’habitude d’offrir aux proches, quand ils arrivent à la clinique, une halte entre la rue et la chambre. Cela leur permet d’aborder leur malade avec plus de sérénité et cela me donne parfois l’occasion de… modifier leur comportement, leur tenue aussi, car il faut songer à l’impression que ressentira celui qu’ils viennent voir.
    — Que voulez-vous dire ? demanda Adalbert.
    — Qu’un visage défiguré par les larmes, des cheveux en désordre, des vêtements déjà endeuillés sont d’un effet déplorable. Grâce à Dieu ce n’est pas le cas de Madame, ajouta-t-elle avec un sourire en détaillant l’ensemble de velours noir et de satin bleu clair-de-lune qui habillait si élégamment Lisa ; un turban où s’entrecroisaient les deux tissus casquait étroitement sa tête, ne laissant dépasser en haut du front que la racine des cheveux foncés. Elle est… parfaite !
    — Vous n’exagérez pas un peu ? fit Adalbert en riant.
    — Pas le moins du monde ! J’ai eu une malade qui au lendemain de son opération est tombée en syncope en voyant pénétrer dans sa chambre la soutane noire d’un prêtre. Un ami pourtant, mais elle a cru qu’il venait l’administrer ! Venez à présent !
    Derrière elle, Lisa et Adalbert suivirent une galerie blanche qui sentait la cire et le désinfectant mais au bout de laquelle une baie vitrée donnait sur le jardin.

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