Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Perle de l'empereur

La Perle de l'empereur

Titel: La Perle de l'empereur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
s’appelait Édouard VII. Il faut te dire que Jagad Jit Singh de Kapurthala, ce petit rajah de rien du tout, est habité par une vaste intelligence, une grande ouverture d’esprit et qu’il fait de son État un modèle du genre. Il est venu très tôt en Europe où il a conquis presque tous les souverains, à commencer par la peu commode reine Victoria, et noué une véritable amitié avec le roi Georges de Grèce. Mais c’est en France, où il n’y a plus de rois cependant, qu’il a reçu l’illumination.
    — Shiva lui est apparu ?
    — Non. Louis XIV. En 1900 il est venu comme tout le monde voir l’Exposition ; il séjournait à Versailles, à l’hôtel des Réservoirs, et il a longuement visité le château. Ce sont d’abord les glaces de la fameuse galerie qui lui ont révélé son obésité mais la splendeur du lieu l’a émerveillé. Rentré chez lui, il a maigri de cinquante kilos en trois ans – c’est un sage ! – et il a entrepris la construction d’un palais à la française qu’il voulait digne du modèle, car il avait l’impression que Louis XIV se réincarnait en lui…
    — Notre Roi-Soleil aurait pu plus mal choisir…, chuchota Aldo, car leur tour approchait, en contemplant le fin visage empreint d’une grande noblesse et d’une grande douceur qu’éclairaient un sourire charmant et de magnifiques yeux sombres. Un homme bien séduisant en vérité !
    Son impression devint conviction quand les phalanges princières serrèrent les siennes et que Jagad Jit Singh se déclara vraiment très heureux et très honoré de le recevoir :
    — M. Vidal-Pellicorne et moi nous connaissons depuis longtemps et je sais quelle belle amitié est la vôtre, et c’est une joie d’accueillir avec lui ce soir celui en qui s’incarnent non seulement la grande histoire mais aussi la splendeur de Venise. J’espère que tout à l’heure nous pourrons parler un peu…
    Cela dans un français irréprochable servi par une voix ferme et bien timbrée qui donnait toute sa valeur au compliment auquel Morosini répondit – chose rarissime chez lui car il avait appris à se méfier des mouvements de son cœur – avec la chaleur d’une sympathie spontanée. Il ne savait pas pourquoi mais cet homme lui plaisait.
    Un peu plus loin, une très belle jeune femme brune drapée dans un sari couleur d’aurore, un véritable déluge de perles autour du cou et aux oreilles, recevait à son tour les invités de son beau père : la princesse Brinda était en effet l’épouse du prince héritier Karam Jit Singh qui évoluait quelque part dans la foule des invités. Elle reçut l’hommage des deux amis avec l’aisance d’une parfaite maîtresse de maison parisienne jointe à la grâce innée des grandes dames indiennes. Aldo apprit ainsi que sa réputation était allée jusqu’aux Indes…
    Tandis que le lent défilé se poursuivait – le maharadjah tournait un petit discours courtois à chacun de ses invités – Aldo et Adalbert se réfugièrent près des grandes compositions florales qui formaient le fond des salons. En saluant le maharadjah, le premier avait remarqué sur sa poitrine la plaque de la Légion d’honneur.
    — Rien de plus normal, le renseigna Adalbert ! Outre qu’il est un ami personnel de Clémenceau, Jagad Jit Singh, qui est aussi un juriste de première force, a représenté l’ensemble des princes indiens à la Société des nations pendant les quatre ans de guerre, ce qui lui a valu de signer le traité de Versailles. Il faudra tout de même que j’aille un jour à Kapurthala. Il paraît qu’il a fait de son pays, grand comme le Grand-duché de Luxembourg, l’État le plus moderne et l’un des plus riches des Indes…
    — En tout cas, s’il est habité par Louis XIV, il a du se tromper de roi. C’est du Louis XV ici ?
    — Parce qu’il préfère les modes du Bien-Aimé. Là-bas il arrive que la Cour porte des costumes de l’époque et des perruques blanches par quarante-cinq degrés à l’ombre ! Et alors on parle français…
    — Incroyable ! fit Morosini amusé. Quoi qu’il en soit, moi je me trouve bien chez lui… Que de jolies femmes !
    — Ça, il les adore…
    En effet, mêlées à des diplomates dont le plus important était l’ambassadeur d’Angleterre, quelques-unes des plus belles dames de Paris, françaises ou étrangères, réunissaient autour d’elles, dans les vastes salons, des petits cercles admiratifs. Il y avait la ravissante

Weitere Kostenlose Bücher