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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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pas !
dit-il avec sévérité. Et n’oublie pas le Bodhisattva Nagarjuna, qui détestait – je
veux dire : craignait – les femmes autant que les craignait le
Bouddha. Même lui est allé jusqu’à faire l’éloge de quatre types de femmes :
les sœurs obéissantes, les compagnes aimantes, les bonnes mères et les
servantes soumises. Il n’avait que leurs vertus à la bouche, et conseillait aux
hommes de prendre de telles femmes pour épouses.
    — Des sœurs obéissantes, des
compagnes aimantes, de bonnes mères et des servantes soumises... Je vois que
tout cela concourt à l’avantage des hommes.
    — Eh bien, c’est assez
naturel, non ? L’Inde ancienne honorait les hommes plus, et les femmes
moins, que le Japon. Quoi qu’il en soit, j’aimerais te citer le conseil que
Nagarjuna donnait aux femmes.
    — Quel conseil ?
    — Il disait : « Femme,
n’épouse pas un homme »...
    — C’est ridicule !
    — Laisse-moi finir. Il disait :
« Femme, épouse la vérité. »
    Otsū le regarda sans
comprendre.
    — Ne vois-tu pas ?
dit-il avec un geste du bras. « Epouse la vérité » signifie que tu ne
devrais pas t’éprendre d’un simple mortel, mais rechercher l’éternel.
    — Mais, Takuan, demanda Otsū
agacée, qu’est-ce que « la vérité » ?
    Takuan laissa tomber ses deux bras
le long de ses flancs, les yeux à terre.
    — A vrai dire, répondit-il,
songeur, je ne le sais pas bien moi-même.
    Otsū éclata de rire, mais
Takuan n’en tint aucun compte.
    — ... Il y a quelque chose
dont je suis sûr. Appliquée à ta vie, l’honnêteté conjugale signifie que tu ne
devrais pas songer à partir pour la grand-ville et à mettre au monde des
enfants faibles, poules mouillées. Au lieu de quoi, il faut rester à la campagne,
où est ta place, et élever une belle famille saine.
    Otsū leva sa faucille avec
impatience.
    — Takuan, cria-t-elle,
exaspérée, es-tu venu ici m’aider à cueillir des fleurs, oui ou non ?
    — Bien sûr que oui. Je suis
là pour ça.
    — Dans ce cas, cesse de
prêcher, et prends cette faucille.
    — Très bien ; si tu ne
veux vraiment pas de moi pour guide spirituel, je ne m’imposerai pas, dit-il en
feignant d’être vexé.
    — Pendant que tu es occupé,
je cours jusque chez Ogin, voir si elle a terminé l’obi que je dois porter
demain.
    — Ogin ? La sœur de Takezō ?
Je l’ai rencontrée, hein ? Ne t’a-t-elle pas accompagnée un jour au temple ?
    Il lâcha la faucille.
    — ... Je vais avec toi.
    — Dans cette tenue ?
    Il fit semblant de ne pas
entendre.
    — Sans doute nous
offrira-t-elle le thé. Je meurs de soif.
    A court d’argument, Otsū
acquiesça faiblement de la tête ; ensemble, ils se mirent en route le long
de la berge.
    Ogin était une femme de vingt-cinq
ans ; bien qu’on ne la considérât plus comme étant de la première
jeunesse, elle était loin d’être laide. Même si la réputation de son frère
avait de quoi rebuter les prétendants, il n’en manquait point pour la demander
en mariage. Sa dignité, ses bonnes manières sautaient aux yeux. Elle avait
refusé toutes les demandes, jusque-là, pour l’unique raison qu’elle voulait s’occuper
un peu plus longtemps de son frère cadet.
    La maison qu’elle habitait avait
été bâtie par leur père, Munisai, alors qu’il dirigeait l’entraînement
militaire pour le clan Shimmen. En récompense de ses excellents services, on l’avait
honoré du privilège de prendre le nom de Shimmen. La maison dominait la rivière ;
entourée d’un haut mur en terre, élevé sur des fondations de pierre, elle était
beaucoup trop vaste pour les besoins d’un simple samouraï campagnard. Autrefois
imposante, elle tombait en ruine.
    Des iris sauvages poussaient sur
le toit, et le mur du dōjō où Munisai enseignait autrefois les arts
martiaux était complètement maculé de déjections blanches d’hirondelles.
    Tombé en disgrâce, ayant perdu son
rang, Munisai était mort dans la pauvreté, ce qui se produit souvent aux
époques troublées. Peu après sa mort, ses serviteurs étaient partis ; mais
comme ils étaient tous originaires de Miyamoto, beaucoup d’entre eux revenaient
faire de petites visites. En ce cas, ils apportaient des légumes, nettoyaient
les pièces qui ne servaient pas, remplissaient d’eau les jarres, balayaient l’allée,
et de mille autres manières entretenaient la vieille demeure. En outre, ils
bavardaient

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