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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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elle n’avait osé espérer
l’existence, Otsū se rappela le passage extatique du poème de Po Chü-i où
l’âme défunte de Yang Kuei-fei se réjouit d’un message d’amour de son empereur
affligé.
    Elle lut et relut le bref message.
« En cet instant même, il doit m’attendre. Il faut que je me dépêche. »
Bien qu’elle crût prononcer à haute voix ces paroles, elle n’émit pas un son.
    Fébrilement, elle griffonna des
mots de remerciement au propriétaire de la chaumière, aux autres prêtres du
Ginkakuji, et à tous ceux qui avaient été bons pour elle au cours de son séjour.
Elle avait rassemblé ses affaires, attaché ses sandales, et se trouvait dehors,
dans le jardin, avant de s’apercevoir que Jōtarō, resté assis à l’intérieur,
boudait toujours.
    — Allons, Jō !
Dépêche-toi !
    — Vous sortez ?
    — Tu es encore en colère ?
    — Qui ne le serait ?
Vous ne pensez jamais qu’à vous. La lettre de Musashi est-elle à ce point
secrète que vous ne puissiez me la montrer, même à moi ?
    — Pardon, dit-elle d’un ton d’excuse.
Il n’y a aucune raison pour que tu ne la voies pas.
    — N’en parlons plus.
Maintenant, ça ne m’intéresse plus.
    — Ne sois pas si pénible. Je
veux que tu la lises. C’est une lettre merveilleuse, la première qu’il m’ait
jamais envoyée. Et c’est la première fois qu’il me demande de venir le
rejoindre. Je n’ai jamais été aussi heureuse de ma vie. Cesse de bouder, et
viens avec moi à Seta, je t’en prie.
    Sur la route du col de Shiga, Jōtarō
garda un silence maussade, mais finit par cueillir une feuille pour s’en servir
comme d’un sifflet, et fredonna quelques airs populaires afin de conjurer le
silence nocturne. Otsū, elle aussi, prompte à se réconcilier, finit par
dire :
    — Il reste des bonbons de la
boîte envoyée avant-hier par le seigneur Karasumaru.
    Mais il fallut attendre l’aube,
et, quand les nuages rosirent au-delà du col, l’enfant redevint lui-même.
    — Ça va, Otsū ?
Vous n’êtes pas fatiguée ?
    — Un peu. Le chemin n’a pas
cessé de monter.
    — A partir de maintenant, ça
va être plus facile. Regardez, vous pouvez voir le lac.
    — Oui, le lac Biwa. Où donc
est Seta ?
    — Par là-bas. Musashi ne
serait pas là d’aussi bonne heure, n’est-ce pas ?
    — Je n’en sais vraiment rien.
Cela nous prendra une demi-journée pour y arriver nous-mêmes. Nous
reposerons-nous ?
    — Bon, répondit-il, ayant
retrouvé sa bonne humeur. Asseyons-nous sous ces deux grands arbres, là-bas.
     
    La fumée des premiers feux de
cuisine du matin s’élevait, filiforme, pareille aux vapeurs qui montent d’un
champ de bataille. A travers la brume qui s’étendait du lac à la ville d’Ishiyama,
les rues d’Otsu devenaient visibles. En approchant, Musashi se protégea les
yeux de la main pour regarder autour de lui, heureux d’être de retour parmi les
humains.
    Près du Miidera, alors qu’il
commençait à gravir la pente du Bizoji, il s’était vaguement demandé quelle
route prendrait Otsū. Auparavant, il avait imaginé que peut-être il la
rencontrerait en chemin, mais ensuite, il s’était dit que c’était peu vraisemblable.
La femme qui avait porté sa lettre à Kyoto lui avait appris que, bien qu’Otsū
ne fût plus à la résidence Karasumaru, sa lettre lui serait remise. Comme elle
ne l’aurait pas reçue avant le soir tard, et comme elle aurait différentes
choses à faire avant de partir, il paraissait probable qu’elle attendrait le
matin pour se mettre en route.
    En passant devant un temple orné
de beaux vieux cerisiers – sans nul doute célèbres, se dit-il, pour
leurs fleurs printanières –, il avait remarqué un monument de pierre,
dressé sur un monticule. Bien qu’il n’eût fait qu’apercevoir le poème inscrit
dessus, il lui revint quelques centaines de mètres plus bas sur la route. Ce
poème était extrait du Taikeiki . Se rappelant que le poème avait trait à
un conte qu’il avait autrefois appris par cœur, il se mit à se le réciter
lentement.
    — « Un vénérable prêtre du
temple de Shiga – appuyé sur un bâton de six pieds, et si vieux que
ses sourcils chenus se rejoignaient sur son front en visière de neige – contemplait
la beauté de Kannon dans les eaux du lac lorsqu’il aperçut par hasard une
concubine impériale de Kyogoku. Elle revenait de Shiga où se trouvait un grand
champ de fleurs ; quand le

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