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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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Il y en a un lot pendu dans le coin, là-bas. Prenez-en autant
que vous en voulez.
    A grandes enjambées, il gagna l’angle.
Comme il en tirait deux ou trois, les autres tombèrent sur le banc, en dessous.
Tendant la main pour les ramasser, il vit les deux jambes étendues sur le banc.
Ses yeux montèrent lentement des jambes au corps, puis au visage. Le choc lui
fit l’effet d’un coup violent au plexus solaire.
    Musashi le regardait fixement,
droit dans les yeux.
    Kojirō sauta d’un pas en
arrière.
    — Hé là, hé là, fit Musashi
avec un large sourire.
    Sans hâte, il se leva et se rendit
près de Kojirō où il se tint silencieux, avec l’expression d’amusement de
celui qui sait. Kojirō tenta de lui rendre son sourire, mais ses muscles
faciaux refusaient d’obéir. Il se rendit compte aussitôt que Musashi devait
avoir surpris les moindres mots qu’il avait prononcés, et sa gêne était d’autant
plus intolérable qu’il sentait que Musashi se moquait de lui. Il ne lui fallut
qu’un instant pour recouvrer son aplomb habituel, mais durant ce bref
intervalle sa confusion fut évidente.
    — Tiens, Musashi, je ne m’attendais
pas à vous trouver ici, dit-il.
    — Je suis content de vous
revoir.
    — Oui, oui, moi aussi.
    Regrettant ses paroles au moment
même où il les prononçait, bien que pour une raison quelconque incapable de se
retenir, il continua :
    — ... Je dois avouer que vous
vous êtes vraiment distingué depuis la dernière fois que je vous ai vu. L’on a
peine à croire qu’un simple être humain ait pu se battre ainsi que vous l’avez
fait. Permettez-moi de vous féliciter. Vous ne paraissez pas même en avoir
souffert.
    La trace d’un sourire encore aux
lèvres, Musashi répondit avec une politesse exagérée :
    — Merci d’avoir, ce jour-là,
joué le rôle d’arbitre. Merci également de la critique que vous venez d’exprimer
de ma performance. Il ne nous est pas souvent permis de nous voir comme les
autres nous voient. Je vous suis bien reconnaissant de vos commentaires. Je
vous certifie que je ne les oublierai pas.
    Malgré la douceur du ton et l’absence
de rancœur, cette dernière déclaration fit frissonner Kojirō. Il la
reconnut pour ce qu’elle était : un défi qu’il faudrait relever un jour ou
l’autre.
    Ces hommes, tous deux fiers, tous
deux opiniâtres, tous deux imbus de leur propre rectitude, devaient
nécessairement s’affronter tête baissée, tôt ou tard. Musashi acceptait d’attendre,
mais lorsqu’il déclarait : « Je n’oublierai pas », il ne faisait
qu’énoncer la simple vérité. Il considérait déjà sa plus récente victoire comme
un jalon dans sa carrière d’homme d’épée, un point fort dans sa lutte en vue de
se perfectionner. Il ne fermerait pas indéfiniment les yeux sur les calomnies
de Kojirō.
    Bien que ce dernier eût enjolivé
son discours en vue d’impressionner ses auditeurs, il considérait en réalité l’événement
presque tel qu’il l’avait décrit, et son opinion sincère ne différait pas
substantiellement de ce qu’il avait déclaré. Il ne doutait pas non plus un seul
instant de l’exactitude fondamentale de son appréciation de Musashi.
    — J’ai plaisir à vous l’entendre
dire, répliqua Kojirō. Je ne voudrais pas vous voir oublier. Je n’oublierai
pas non plus.
    Musashi souriait toujours en
exprimant d’un hochement de tête son accord.
     
     
     
Branches entrelacées
     
    — Otsū, me voici de
retour ! cria Jōtarō en s’engouffrant sous le porche rustique.
    Otsū, assise au bord de la
véranda, accoudée à une table basse à écrire, regardait le ciel depuis le
matin. Sous le pignon, une plaque de bois portait, en caractères blancs, l’inscription :
« Ermitage de la Lune de montagne. » Cette petite chaumière
appartenant à un membre du clergé du Ginkakuji avait été prêtée à Otsū,
sur la requête du seigneur Karasumaru.
    Jōtarō se laissa tomber
sur une touffe de violettes en fleurs, et se mit à éclabousser des pieds dans
le ruisseau pour en laver la boue. L’eau, qui coulait droit du jardin du
Ginkakuji, était plus pure que de la neige fraîche. « Cette eau est glacée »,
remarqua-t-il en fronçant le sourcil, mais la terre était chaude et il se
sentait heureux d’être vivant, dans ce bel endroit. Les hirondelles chantaient
comme si elles aussi se réjouissaient de ce beau jour. Jōtarō se
leva, s’essuya les pieds dans l’herbe, et se

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