La Prison d'Édimbourg
partirent de toutes parts. – Au gibet le meurtrier, au gibet ! à la place de Grassmarket ! Et les mêmes acclamations furent répétées au loin.
– Que personne ne le touche ! s’écria le même orateur. Qu’il tâche de faire sa paix avec Dieu, s’il le peut. Nous ne voulons pas tuer son âme avec son corps.
– Quel temps a-t-il donné aux autres pour se préparer à la mort ? il faut le traiter comme il a traité les autres ! s’écria-t-on.
Mais l’opinion du harangueur était plus d’accord avec le caractère de ceux à qui il s’adressait, caractère plus opiniâtre qu’impétueux, et ils avaient résolu de donner une apparence de justice et de modération à un acte de vengeance et de cruauté. Pour un moment ce chef laissa le prisonnier, dont il confia la garde à des hommes dont il était sûr, et après avoir dit que Porteous pouvait remettre à qui bon lui semblerait son argent et ses autres effets. Un prisonnier pour dettes reçut ce dernier dépôt de la main tremblante de la victime, à qui l’on permit même de faire quelques courtes dispositions avant sa mort prochaine. Les criminels et tous ceux qui voulurent déserter la prison se virent alors libres de le faire. Ce n’est pas que leur délivrance fût entrée pour quelque chose dans le projet des factieux, mais les portes se trouvant brisées, elle en était la conséquence nécessaire, et presque tous se hâtèrent d’en profiter. Il ne resta dans la prison qu’un homme d’environ cinquante ans, une fille de dix-huit ans, et deux ou trois prisonniers pour dettes, qui probablement ne voyaient aucun avantage à tenter de s’échapper. Les personnes que nous avons mentionnées restèrent alors dans la salle de la prison que tous les autres détenus avaient quittée. Quelqu’un qui avait été leur compagnon d’infortune, s’adressant à l’homme de cinquante ans, d’un ton de connaissance, l’invitait à s’échapper.
– Eh bien, Ratcliffe, prends donc le large, la route est libre.
– Cela se peut bien, Willie, répondit Ratcliffe avec calme, mais j’ai une idée de quitter le métier, de devenir homme de bien.
– Eh bien, reste, vieux fou ! s’écria l’autre, reste pour te faire pendre comme un vieux diable imbécile ! Et au même instant il descendit l’escalier de la prison.
Pendant ce temps, la personne que nous avons distinguée comme un des plus actifs conspirateurs s’était rendu dans la chambre de la jeune fille. Il n’eut que le temps de lui dire : – Fuyez donc, Effie, fuyez donc ! Elle se retourna vers lui, et le regarda d’un air de crainte, de tendresse et de reproche, mêlé de surprise et de stupeur.
– Fuyez, répéta-t-il, au nom de tout ce qui vous est cher !
Elle jeta les yeux sur lui sans avoir la force de lui répondre.
En ce moment un grand bruit éclata, et l’on entendit appeler Wildfire à plusieurs reprises.
– Je viens, je viens ! répondit celui qui était désigné par ce nom. – Effie, dit-il encore, pour l’amour du ciel, par pitié pour vous, pour moi, fuyez, ou vous êtes perdue ! Et au même instant il se précipita hors de la chambre.
Elle le suivit des yeux un moment, et puis murmura à demi-voix. – Mieux vaut perdre la vie, puisque l’honneur est perdu ! Et elle resta aussi insensible, en apparence, qu’une statue, au milieu du tumulte qui avait lieu autour d’elle.
Ce tumulte passa alors de la prison au dehors. La populace avait déjà fait descendre la victime jusqu’à la porte, et n’attendait plus que son chef pour la conduire au lieu où l’on avait décidé de consommer le sacrifice ; c’était pour cela que les cris impatiens de ses compagnons l’avaient appelé.
Dès qu’il arriva près de Porteous : – Je vous promets cinq cents livres, lui dit celui-ci à voix basse en lui serrant la main, cinq cents livres sterling, si vous me sauvez la vie.
L’autre répondit sur le même ton de voix et en serrant sa main avec une étreinte également convulsive : – Cinq quintaux d’or monnayé ne vous sauveraient pas. – Souvenez-vous de Wilson. – Après cinq minutes de silence, Wildfire ajouta d’un ton plus calme : – Faites votre paix avec Dieu : où est l’ecclésiastique ?
On amena Butler, pâle, tremblant et interdit, qu’on avait retenu près de la porte de la prison, tandis qu’on cherchait Porteous dans l’intérieur. On lui donna ordre de marcher à côté du prisonnier et de le préparer à la
Weitere Kostenlose Bücher