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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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Malgré d’évidents efforts de discrétion, cette escouade se laissait aller par moments à des jurons et autres cris... en espagnol !
    — Ennemi en vue... murmura l’abbé.
    Saint-Vallier n’eut pas le cœur à plaisanter : la présence de soldats impériaux dans un fief du connétable ne lui inspirait rien de bon. Il n’en dîna pas moins copieusement, avant de prendre congé de ses compagnons de voyage. Et, dans la soirée, c’est le rose aux joues et le sourire aux lèvres qu’il franchit le pont-levis du château.

    Une volée de pages l’accueillit ; tous ne portaient pas la livrée des Bourbons. Conduit droit chez le connétable, Jean de Saint-Vallier dut pourtant y patienter près d’une heure. Il s’était même assoupi quand un page vint le chercher pour l’introduire dans un vaste cabinet dont les boiseries, trop sculptées, trop dorées surtout, contrastaient avec la sévère architecture du donjon.
    Le duc Charles, dont les cheveux étaient devenus fort longs, arborait une mine de circonstance.
    — Mon bon Saint-Vallier, que nous vaut ?
    La chaleur de cet accueil se trouvait démentie par un ton où messire Jean, lucide, perçut une pointe d’agacement.
    — Monseigneur, je m’en voudrais de vous importuner...
    — En rien, cousin, tu es ici chez toi.
    Saint-Vallier s’inclina, la main posée sur le cœur. Le connétable lui demanda, pour la seconde fois, quel était l’objet de sa visite ; mais, sans même prendre la peine d’écouter la réponse, il se saisit d’un coffret très ancien, orné d’émaux en champlevé, et vint fixer son visiteur dans les yeux.
    — Mon bon, commença-t-il, notre intention première était de te tenir à l’écart de tout cela. Mais, puisque aussi bien, la Providence t’a conduit, en ce jour, en ce lieu, je m’incline devant ses arrêts. Nous allons donc te mettre dans le secret.
    Le gentilhomme toussota, vaguement inquiet. Il lui sembla que sa fièvre augmentait – mais ce n’était peut-être qu’une impression. Le duc de Bourbon se montrait résolu.
    — Après tout, lâcha-t-il, que tu découvres cela maintenant ou plus tard...
    — Mais de quoi s’agit-il ?
    En lieu de réponse, le duc tendit à son vassal le petit coffret reliquaire. Il se signa plusieurs fois d’affilée et prit son air le plus grave.
    — Ceci, dit-il, est une relique des plus sacrées ; cette petite nef contient un morceau de la Vraie Croix. Tu vas donc me jurer sur ce Saint Objet de ne jamais, sous aucun prétexte, révéler ce que tu vas apprendre ce soir.
    Jean de Saint-Vallier se sentait à présent partagé entre un malaise de plus en plus vif, et la plus forte curiosité. Il se signa à son tour. Puis, d’un geste hésitant, il posa la paume, bien à plat, sur le sommet du reliquaire, et jura. Alors seulement, le connétable le prit par les épaules.
    — Parfait ! À présent, cousin, suis-moi.

    Ils empruntèrent une coursive mal éclairée, puis une autre ; descendirent deux longues volées d’escaliers, s’enfoncèrent, à ce qu’il semblait, dans les entrailles de la forteresse. Quand ils furent enfin à proximité d’une vaste salle basse, couronnée d’ogives, une rumeur se fit entendre. Le duc Charles et son invité rejoignaient une assemblée tenue en ces lieux sombres.
    À la lueur des torches, il était ardu de distinguer les visages et les expressions ; mais Saint-Vallier n’en repéra pas moins plusieurs princes de l’Église, serrés vers le fond, parmi lesquels, notamment, l’évêque d’Autun et celui du Puy, frère du maréchal de La Palice... Il reconnut aussi des familiers des Bourbons, tel le sieur de Saint-Bonnet, homme de confiance du connétable. De brefs saluts furent échangés.
    Charles de Bourbon prit la parole.
    — Messeigneurs, annonça-t-il, laissez-moi présenter à ceux d’entre vous qui ne le connaîtraient pas, notre ami et féal Jean de Saint-Vallier, seigneur de Poitiers. C’est un homme de confiance et qui, comme nous tous, vient de prêter serment sur la Vraie Croix.
    L’atmosphère, à ces mots, parut se détendre. Le duc fit les honneurs de l’intrus au second chambellan et légat de l’empereur, Adrien de Croÿ, seigneur de Beaurain. Puis, se détournant de Saint-Vallier, il pria Château, le secrétaire de Beaurain, de reprendre au début la lecture qu’il avait dû interrompre.
    Le petit homme déroula cérémonieusement sa peau d’âne et, d’une voix éteinte, se mit à récapituler les

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