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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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différents points de ce que Saint-Vallier identifia au premier mot comme un accord diplomatique. Avant toute chose, le duc de Bourbon s’y engageait à épouser l’une ou l’autre des sœurs de Charles Quint : Éléonore, veuve du roi de Portugal, ou bien l’infante Catherine !
    Le nouveau venu n’en croyait ni ses yeux, ni ses oreilles.
    La dot était fixée à deux cent mille écus, qui viendraient « en avance des dépenses de guerre ».
    Des dépenses de guerre !
    À ces mots, Messire Jean réalisa que les rumeurs circulant sur le connétable n’étaient que trop fondées. Oui, Bourbon trahissait. Oui, Bourbon s’alliait bel et bien avec l’empereur Charles et le roi Henry, « envers et contre tous, sans exception de personne » – autrement dit : même et d’abord contre François I er  !

    Saint-Vallier avait dû prendre sur lui de ne pas tituber ; devait-il s’effrayer plutôt, ou bien s’émerveiller d’assister, au premier rang, à de si grands bouleversements ? À mesure que Château détaillait les modalités du traité, ses tremblements firent place à une envie très forte, bientôt irrépressible, de rire. Mais il parvint à surmonter son désarroi.
    Les félons avaient convenu par écrit d’attendre le passage de François I er en Italie, à la mi-août, pour envahir ses États. L’Espagnol y entrerait par Narbonne, l’Anglais par la côte normande ; quant au connétable, appuyé par dix mille lansquenets allemands, il attaquerait partout où il le pourrait, et ce au cœur même du royaume... Après quoi l’on se partagerait la dépouille de la France : Charles Quint prendrait pour lui la Bourgogne, la Picardie et Paris ; Henry VIII la Champagne, la Normandie, le Poitou ; Charles de Bourbon, la Provence, avec une option sur la succession impériale, non seulement en France, mais aussi à Aix-la-Chapelle ! C’était écrit, là, de la ferme graphie des chancelleries : si jamais Charles Quint venait à mourir sans postérité, le connétable monterait à sa place sur le trône impérial !

    — Mon Dieu, murmura Saint-Vallier pour lui-même, c’est un songe et je vais m’éveiller.
    Un songe ? Les applaudissements qui ponctuèrent cette lecture paraissaient bien réels, tout comme les accolades qui la conclurent. Château proclama solennellement la date : le 18 de juillet 1523. L’un après l’autre, solennellement, les représentants des souverains apposèrent leur paraphe au bas des deux exemplaires de l’incroyable document. Charles de Bourbon signa le dernier, d’un geste mécanique, longuement mûri sans aucun doute.
    Cette fois, le pas était franchi.
    Château d’Argentan.
    D ans les communs de son château d’Argentan, sur les bords de l’Orne, le duc d’Alençon avait fait aménager des écuries où il veillait lui-même à l’entretien de chevaux de selle et de trait parmi les plus fringants du royaume. Ce matin-là, très tôt, entouré de ses commis, il inspectait quelques destriers spécialement préparés en vue de la campagne d’Italie. Les stalles aux parois rouge sang, jonchées de foin frais, s’ornaient des trophées remportés par leurs occupants successifs, au cours de tournois de chevalerie.
    Le duc d’Alençon entra dans la plus décorée ; flattant vigoureusement la croupe d’un étalon bai, il se répandit en compliments.
    — Si le roi veut mon avis, c’est sur cette bête-là qu’il franchira les monts !
    Le petit groupe approuva, quoique tout le monde sût fort bien que le roi ne solliciterait jamais, sur rien, l’avis de son beau-frère...
    — Coisay ! s’étonna le duc d’Alençon en ressortant. Vous voilà bien matinal.
    Le jeune écuyer s’inclina, visiblement nerveux.
    — Votre Altesse Royale, commença-t-il, connaît déjà mon jeune frère, Simon.
    Le prince avisa Simon.
    — Et comment ! C’est vous qui, naguère, à Compiègne, chevauchiez à demi-mort... Eh bien, vous paraissez remis sur pied !
    Le visage balafré du jeune homme s’illumina d’un agréable sourire. Son demi-frère poursuivit.
    — Monseigneur, j’ai parlé à Simon de notre prochain départ pour le Milanais, aux côtés de Sa Majesté. Simon est brillant cavalier, meilleur sans doute que moi-même. Aussi...
    — Je sais vos talents d’écuyer, Coisay, et ne doute pas de ceux de votre ami.
    — Simon est mon frère...
    Le prince disparut dans une stalle, fort peu soucieux de telles précisions familiales.
    — Navré,

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