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La Reine Sanglante

La Reine Sanglante

Titel: La Reine Sanglante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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se demanda si le roi ne jouait pas avec lui un jeu effrayant.
    « Sire, bégaya-t-il, je ne comprends pas !
    – Mais, moi, je comprends ! s’écria Louis, triomphant. Bigorne m’a tout dit : cette fille, Valois, ce n’est pas seulement une sorcière, c’est aussi une fée.
    – Bigorne !… une fée !… murmura Valois, effaré, en passant sa main sur son front mouillé de sueur.
    – Eh bien, répéta Louis Hutin, une fée ! c’est-à-dire un de ces êtres qui ont le pouvoir de prendre toutes les formes, afin, sans doute, de pouvoir échapper à la vengeance des chrétiens. Au surplus, ajouta-t-il en se levant brusquement nous allons la voir ensemble ; mais qui sait la nouvelle figure qu’elle aura prise ! En tout cas, je la défie bien de t’apparaître jeune et jolie en même temps qu’elle m’apparaîtra vieille et laide. Viens, Valois ! nous allons la voir et contrôler l’une par l’autre notre double vision.
    – Elle est donc ici ? balbutia Valois épouvanté.
    – J’ai donné l’ordre à Trencavel de me l’amener. Elle doit être ici depuis cette nuit. »
    En même temps, le roi se précipita vers sa chambre à coucher, suivi de Valois, titubant, vacillant et se demandant déjà à quelle catastrophe il marchait.
    Dans l’antichambre, le roi s’arrêta un instant. Là, Hugues de Trencavel, l’épée nue, se tenait devant la porte et douze gardes montaient la faction avec lui.
    « Tu as mis la sorcière dans ma chambre ? demanda le roi.
    – Non, Sire, répondit Trencavel, j’ai cru mieux faire en la mettant dans le cabinet où il n’y a ni portes ni fenêtres par où elle puisse s’échapper.
    – Tu as bien fait, mon brave Trencavel. »
    Et le roi, toujours suivi de Valois, qui se raidissait, pénétra dans la chambre à coucher. Là, il y avait six gardes sous le commandement d’un officier.
    Les six gardes étaient placés en rang devant la porte du cabinet où avait été enfermée Mabel.
    Le roi les écarta d’un geste et ouvrit la porte du cabinet.
    « Je suis perdu ! » murmura Valois.
    À ce moment retentit un grand cri.
    Ce cri, c’était le roi qui venait de le pousser en entrant dans le cabinet. Tous se précipitèrent pour lui porter secours, et tous purent constater que le cabinet était vide !…
    « Vide ! » cria le roi, d’une voix qui tremblait.
    « Vide ! » répéta en lui-même Valois, avec le rugissement de joie du condamné qui se voit sauvé à la dernière minute.
    Et alors, tandis que le bruit de cet incroyable événement se répandait à travers le Louvre avec la rapidité de l’éclair, tandis qu’on accourait de toutes parts pour constater que la sorcière avait été bel et bien enlevée par quelque diable, le roi, simplement, disait à Valois :
    « Je te l’avais bien dit que cette fille n’est pas seulement une sorcière, mais aussi une fée ! »

II
 
LES ÉMERAUDES
    Vers le moment même où Lancelot Bigorne, Guillaume Bourrasque et Riquet Haudryot, ces deux derniers déguisés en ours et le premier dans la peau d’un singe, apparaissaient au Suisse qui veillait à la porte du roi, tandis que les trois compères entamaient avec Louis X l’entretien auquel nous avons assisté, Marguerite de Bourgogne allait et venait dans sa chambre.
    Vêtue d’une robe de laine blanche aux plis harmonieux, les cheveux dénoués, la figure pâle, la démarche lente et silencieuse, elle eût pu elle-même passer pour une de ces fées dont nous parlions.
    Puis, brusquement, elle se relevait, respirait violemment dans une cassolette contenant des parfums destinés à la calmer, mais qui, en réalité, ne faisait que la surexciter.
    Puis elle frappait, avec un marteau d’argent, sur une sorte de petit tambour en métal qui rendait un son frémissant. À cet appel, accourait alors une jeune fille aux yeux malicieux, légère, svelte comme une anguille. Cette servante possédait les secrets et la confiance de sa maîtresse. C’était la Stragildo femelle du Louvre – avec la méchanceté en moins. C’était Mabel avec la jeunesse en plus.
    « Juana, dit la reine, le jour vient-il enfin ? Cette longue nuit s’achève-t-elle ? Lève ces rideaux et dis-moi si tu surprends enfin quelque sourire dans le ciel !…
    – Hélas ! madame, fit la jeune fille en secouant sa tête brune, le visage du ciel est fermé encore. Les nuits semblent longues à qui rêve tout éveillé. L’aurore est encore loin. »
    La reine poussa un

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