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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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les billes de bois entreposées sur le quai de la Gare.
    Sortir de Paris était bien plus
facile lorsqu’on longeait le fleuve. Bien sûr, ils rencontrèrent de nombreux
mariniers, menuisiers, toute une population laborieuse qui vivait des chantiers,
mais personne ne leur posa de questions. On n’était pas dans le centre de la
capitale. Là-bas, à la périphérie, on pensait surtout à survivre et à
travailler. À quoi bon se soucier des ci-devant qui se cachaient au milieu des
billes de bois. Après tout, peut-être un jour aurait-on à se dissimuler
aussi !
    Ils franchirent la Seine en
utilisant le bac. Marie-Adélaïde donna au passeur un de ses colliers.
    — Cadeau d’un riche client,
expliqua-t-elle à Gabriel. Il ne m’en voudra pas le pauvre, il a été raccourci
depuis plusieurs mois déjà.
    — Tu l’avais prédit ? lui
demanda-t-il, mi figue-mi raisin.
    Elle soupira.
    — Oui, bien sûr. Mais à quoi
bon le lui dire ? C’était un aristocrate totalement inoffensif, perdu dans
votre monde révolutionnaire. Il croyait en la Providence et en la Raison. Pour
ce que cela lui a servi !
    Pour l’heure, accoudés au
bastingage de la barge à faible tonnage qui traversait le fleuve, ils
contemplaient les eaux noires et huileuses, à peine éclairées par un croissant
de lune. En aval, c’était la capitale, ses forts, ses chemins de ronde et,
au-delà, la cathédrale, les dômes du Panthéon et des Invalides, ainsi qu’une multitude
de clochers. Mais bien peu de lumières. Paris vivait la nuit, sous le règne des
Comités, mais dans l’ombre. De l’autre côté de la rive, on apercevait la campagne ;
les maisons de plaisance, construites sur la berge par l’aristocratie du temps
du tyran, montraient leurs ombres un peu inquiétantes. Au-delà, c’était le
noir.
    — C’est beau, murmura-t-elle.
Tu crois que nous trouverons ce que nous cherchons là-bas ?
    Il sourit.
    — C’est drôle que tu me
demandes cela.
    Puis, il prit la main de
Marie-Adélaïde et la ramena vers lui. Il l’embrassa avec passion. Elle se
laissa faire mais émit un petit gloussement.
    — Pourquoi ris-tu ?
    Elle se dégagea.
    — Parce que je te trouve
soudain bien passionné.
    Il se détourna.
    — J’ignore combien de temps va
durer notre amour, alors, je profite de chaque instant.
    Elle approuva et c’est elle qui
l’embrassa.
    Il aurait voulu que cette
traversée ne finisse jamais. Pourtant, la barge finit par aborder de l’autre
côté de la Seine sur un ponton qui desservait les jardins de Bercy.
    — Nous sommes arrivés, citoyen,
lui lança le nautonier.
    Puis il ajouta après avoir
craché dans l’eau :
    Je devrais vous dénoncer auprès
de la section mais je ne le ferai pas. Vous avez deux petites têtes bien
sympathiques et ce serait dommage de les voir coupées. Il est rare de voir des
amoureux en pleine nuit le long de la Seine. Ça me rappelle le temps d’avant…
    Sénart n’avait plus un sou,
sinon il lui aurait volontiers glissé une pièce ou un assignat. Ils
débarquèrent bien vite et longèrent la Seine par le chemin de halage.
    Leur marche fut longue,
silencieuse. Marie-Adélaïde soufflait parfois mais elle marchait avec
vaillance. On n’aurait pas cru que, la veille au soir, elle s’était évanouie
devant le massacre de la loge. Au fur et à mesure de leur avancée, Sénart
s’inquiétait. Et s’il s’était trompé et s’il n’avait rien à voir dans tout
cela ?
    Il repoussa ces idées avec
dédain. L’avenir le dirait !
    Ils parvinrent enfin au
confluent de la Seine et de la Marne.
    — Nous approchons,
murmura-t-il.
    Le chemin était raisonnablement
entretenu aussi progressaient-ils rapidement. Ils étaient en pleine campagne
maintenant. Plus rien ne pourrait les arrêter. À part pour franchir la Marne.
    Le pont de Charenton datait
d’une période très ancienne. En fait, de mémoire de chroniqueur, il y avait
toujours eu un pont à cet endroit. Avant la Révolution, le droit de passage en
avait été concédé à l’évêque de Paris pour l’entretien de la cathédrale.
Maintenant, la situation était plus floue. La querelle existait entre la
commune de Charenton et Paris pour savoir qui contrôlerait cette voie de passage
obligée lorsqu’on arrivait à la capitale par l’est. D’ailleurs, depuis
toujours, la petite commune avait vu fleurir différents commerces et
hostelleries, au grand plaisir des voyageurs qui pouvaient ainsi se remettre de
leur long périple

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