La Vallée des chevaux
avait cru comprendre que le procédé
employé supposait l’utilisation de certaines huiles de poisson. Les Shamudoï
avaient donc tout intérêt à conserver des liens avec les Ramudoï. Et
réciproquement. Les Ramudoï avaient besoin de chêne pour fabriquer leurs
embarcations, de hêtre et de pin pour les assemblages, et pour river les longs
madriers placés sur les flancs de leurs bateaux ils se servaient d’if et de
saule. Pour se procurer les arbres adéquats, ils faisaient appel aux Shamudoï
qui, à force d’y chasser, connaissaient parfaitement la forêt.
Au sein de la tribu des Sharamudoï, chaque famille shamudoï
était jumelée avec une famille ramudoï. Entre ces deux familles existaient des
liens de parenté complexes, bien qu’elles ne soient pas obligatoirement
parentes par le sang. Ainsi, quand Jetamio serait devenue la compagne de
Thonolan, Jondalar allait soudain se retrouver une ribambelle de
« cousins » shamudoï et ramudoï, même si Jetamio n’avait pas de
famille à proprement parler. Cette union impliquait un certain nombre
d’obligations mutuelles qui se résumeraient, pour Jondalar, à employer des
titres de respect quand il s’adresserait à certains membres de sa parenté.
Étant célibataire, il serait libre de s’en aller s’il le
désirait, mais personne ne le pousserait à partir. Les liens entre les deux
groupes étaient si forts que lorsque la place manquait et qu’une famille
shamudoï décidait de fonder une nouvelle Caverne, la famille ramudoï avec
laquelle elle était jumelée était obligée de partir avec elle.
Des rites particuliers étaient prévus pour échanger les liens de
parenté quand une famille jumelée ne voulait pas partir et qu’une autre famille
était prête à le faire à sa place. Néanmoins, les Shamudoï étant maîtres à
terre, ils pouvaient obliger leurs parents ramudoï à les suivre. Mais les
Ramudoï étant maîtres sur le fleuve, ils pouvaient alors refuser de transporter
leurs parents sur leur embarcation et ne pas les aider à trouver un nouveau
lieu de vie. Dans la pratique, la décision de fonder une nouvelle Caverne était
donc presque toujours prise d’un commun accord.
Entre Shamudoï et Ramudoï s’étaient développés des liens
supplémentaires, à la fois pratiques et rituels, qui n’avaient fait que
renforcer la collaboration des deux groupes, en particulier pour tout ce qui
concernait les bateaux. Toutes les décisions touchant à l’usage des bateaux
étaient prises par les Ramudoï. Mais ces mêmes bateaux appartenaient également
aux Shamudoï. Ils avaient donc droit à une part sur ce que rapportaient les
bateaux, calculée en fonction des services rendus aux Ramudoï. Dans la
pratique, les litiges étaient rares, chaque groupe respectant tacitement les
droits de l’autre et n’empiétant pas sur son domaine.
La construction des bateaux était le résultat d’un travail en
commun les Shamudoï apportaient leur connaissance de la forêt et les Ramudoï
leur pratique du fleuve. Cela permettait aux Shamudoï de revendiquer un droit
sur les bateaux utilisés par les Ramudoï. Un homme qui n’aurait pas su se
prévaloir de ce droit ne pouvait espérer s’unir avec une femme appartenant à
l’un des deux groupes. Avant de prendre Jetamio pour compagne, il fallait donc
que Thonolan participe à la construction ou à la remise en état d’une
embarcation.
Jondalar attendait ce moment avec impatience. Les bateaux des
Sharamudoï l’intriguaient beaucoup et il se demandait comment ils étaient
fabriqués. Même s’il n’était pas enchanté que Thonolan ait choisi de prendre
pour compagne une femme shamudoï, depuis le début ces gens l’intéressaient au
plus haut point. La facilité avec laquelle ils se déplaçaient sur le large
fleuve et pêchaient les énormes esturgeons dépassait les capacités de toutes
les tribus dont il avait entendu parler.
En plus, ils faisaient preuve d’une ingéniosité exceptionnelle.
En hiver, lorsque le passage qui reliait la terrasse au fleuve était gelé et
que les Ramudoï n’étaient pas encore montés rejoindre leurs parents shamudoï
sous le surplomb rocheux, les échanges entre les deux tribus se faisaient au
moyen de longues cordes et de monte-charge en vannerie. Suspendus par-dessus le
rebord de la terrasse, ces paniers pouvaient être descendus jusque sur le
ponton flottant ou remontés selon les besoins.
Le jour de l’arrivée de Thonolan et de Jondalar,
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