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La vengeance d'isabeau

La vengeance d'isabeau

Titel: La vengeance d'isabeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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depuis quelques heures seulement et régnait sur le lieu avec une prestance qu’aucune autre, pas même Antoinette, n’avait eue. Marie le troublait, par son regard droit et fier, gris acier, par sa grâce et sa sensualité naissante qui l’auréolait tout entière. Un instant, l’idée lui vint qu’il pourrait tout aussi bien l’épouser lui-même, qu’elle ne déparerait point à son bras. Mais il chassa aussitôt cette perspective incestueuse. Il avait récupéré Marie pour s’allier un riche et précieux parti. Il lui fallait s’en tenir à son argument. Mais sang dieu ! Qu’il regrettait qu’elle fût sa fille !
    —  Huc s’en est allé, je l’ai vu, annonça Marie en repoussant son assiette. Vous avez tenu promesse, il me faut m’acquitter de la mienne. Si vous êtes prêt, je le suis aussi.
    François se leva aussitôt, sans laisser seulement le temps au page de reculer sa chaise. Marie se plia quant à elle de bonne grâce à cette coutume, pour bien marquer qu’elle était capable de s’adapter en tout lieu, puis le précéda par le couloir qui ramenait vers les écuries.
    —  Je croyais devoir faire ton instruction, ne put s’empêcher de lâcher François, admiratif, il semble que j’aie eu tort. Tu as fort peu à apprendre.
    —  On peut vivre à la cour des Miracles et savoir singer les grands ! Riposta Marie avec humour.
    François se contenta d’un sourire qui se perdit dans le balancement sensuel des hanches de la jouvencelle. Il serra les poings sur la vague de désir qui le submergea. En un instant, sa décision fut prise. S’il ne pouvait l’épouser, il pouvait bien la prendre. Il ne serait pas le premier père à faire ainsi l’éducation de sa fille. Elle n’en serait que plus gaillarde à l’heure de ses noces. Cette idée apaisa à peine le bouillonnement de ses sens et, lorsqu’ils franchirent tous deux le pont-levis en direction de Saint-Jehan-du-Passet, il était bien davantage obsédé par sa proximité que par celle de cette pierre philosophale tant rêvée.
    Ils attachèrent leurs montures à un chêne planté sur la colline au milieu de tant d’autres, puis Marie le guida derrière l’autel. À des lieues à la ronde il n’y avait âme qui vive. Elle alluma une lanterne avec une pierre à feu et s’avança sans faillir vers le souterrain rocheux qui plongeait dans les entrailles de la montagne.
    François se laissa conduire en silence. L’odeur humide du lieu l’écœurait un peu, mais son désir de posséder l’alkaheist autant que la jouvencelle lui donnait de l’allant.
    Il dut très vite renoncer à se repérer dans ce dédale qui s’enfonçait de plus en plus profondément. Marie semblait savoir où elle le menait. Il la suivait sans méfiance, peut-être parce qu’elle lui ressemblait mais n’avait, elle, aucune confiance en lui. Sa réaction à l’égard de Huc tantôt l’avait confortée dans son sentiment. Elle avait tout intérêt désormais à le servir.
    Le boyau s’arrêta soudainement en cul-de-sac. François fronça les sourcils. Marie se tourna vers lui, annonçant :
    —  Nous y sommes. Mais vous me devez une faveur, cher père. Tante Albérie m’a refusé de goûter au contenu de la fiole, prenant pour prétexte stupide que la pierre ne devait avoir qu’un maître. Ce jourd’hui les choses ont changé. Je veux ma part de pouvoir. Je veux être votre égale.
    François se sentit piqué au vif. Il hocha mécaniquement la tête, mais son regard avide trahissait bien son sentiment. Jamais il n’accepterait qu’une femme soit son égale, pas même sa fille. Il lui coûtait bien assez de savoir que ces sorcières avaient joui de ce privilège avant lui. Marie se contenta de ce signe d’assentiment et dirigea ses pas vers une roche qui saillait parmi d’autres. Elle frotta à deux endroits distincts, fit apparaître le mécanisme d’ouverture, puis appuya sur plusieurs signes sculptés qui s’enfoncèrent tour à tour.
    Elle avait à peine achevé qu’une large pierre se disjoignait pour leur livrer passage. Marie s’y engouffra, Chazeron sur ses traces. François dut se frotter les yeux pour s’assurer qu’il ne rêvait pas. Dans le flamboiement de la torche, l’or resplendissait partout où ses yeux se portaient. Avide, il s’avança et tomba à genoux au milieu des pièces qu’il fit glisser entre ses doigts.
    —  L’alkaheist est là, annonça Marie en le frôlant pour s’approcher de la fiole qui

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