La ville qui n'aimait pas son roi
qui disait de lui : Il fait toujours le mal , et son frère le cardinal de Guise qui lui trouvait l’esprit lourd et le jugeait plus brave qu’intelligent.
— Que s’est-il passé, Catherine? demanda Henri avec douceur.
Elle serra les lèvres, l’esprit toujours en pleine confusion, tandis que les deux autres se rapprochaient, inquiets de l’agitation
de leur sœur.
— Dans la cour… à l’instant…
» J’étais avec vos gentilshommes, Henri, et mon nouveau capitaine des gardes, quand j’ai vu arriver par le grand escalier, venant de chez le roi, cette femme… Cette Cassandre de Mornay! cracha-t-elle avec fureur.
Les trois frères savaient ce qui s’était passé à Saint-Brice. Henri de Guise avait donné à sa sœur son accord pour l’assassinat d’Henri de Navarre. Il lui avait même indiqué un assassin exceptionnel : Maurevert. Or, Catherine avait tout raté : Maurevert était mort, et elle avait été maltraitée. Seulement, à travers elle, c’étaient les Guise qui avaient été humiliés, tout cela parce que sur les conseils de son stupide frère Charles, elle s’était mis en tête d’enlever la fille de Mornay!
Voici ce que pensait Henri de Guise tout en affichant un visage faussement aimable.
— Donc vous avez vu Mlle de Mornay. Vous la haïssez tant pour être aussi agitée?
— Elle s’appelle Mlle de Saint-Pol, remarqua Mayenne. C’est la fille bâtarde de Louis de Condé.
— Je sais, mon frère, dit Henri, agacé.
— En vérité elle est mariée avec un petit bourgeois parisien nommé Hauteville, précisa Catherine d’une voix emplie de fiel. Cet homme, un commis d’écriture, a rejoint Navarre qui l’aurait anobli. Il était à Paris durant les barricades, j’ai failli le faire saisir, mais sans succès.
— Dommage! dit le duc de Guise qui connaissait les grandes lignes de l’affaire par Mayneville, qui les avait entendues lui-même de Le Clerc. Mais Mlle de Saint-Pol a sans doute rencontré le roi pour régler des affaires de famille. En quoi cela vous inquiète-t-il?
— Non! glapit la duchesse. Elle était avec son mari, ce Hauteville, avec Poulain, ce félon, et surtout avec Rosny!
— Poulain? Le prévôt qui a trahi la Ligue? demanda Guise.
— Rosny est ici? s’inquiéta le cardinal.
— Oui! Mais ce n’est pas cela l’important! ragea-t-elle. Vous savez qu’après l’échec de Saint-Brice, j’ai envoyé à Nérac un homme que le curé Boucher m’avait présenté. Il s’appelait Pierre de Bordeaux.
— C’était inutile! fit le cardinal de Guise en haussant les épaules. J’avais moi-même envoyé un assassin qui avait été pris. Vous auriez dû m’en parler!
— Peut-être… Quoi qu’il en soit, je n’ai rien su de ce qui s’était passé, sinon que Navarre était toujours vivant. Or ce Bordeaux avait un cousin nommé Clément, un jeune sot plus réputé par ses rodomontades et son ivrognerie que par son courage. Il voulait venger son parent mais il ne parlait pas gascon et n’avait aucune chance. Je l’oubliai jusqu’aux journées des barricades où le curé Boucher me rapporta que ce jeune coq avait été au premier rang durant les émeutes, ne craignant pas d’affronter la mort et s’attaquant même aux Suisses sur le pont Notre-Dame.
Charles de Mayenne marqua son impatience en tapotant la poignée de son épée. Il avait trouvé détestable cette rébellion du
peuple de Paris contre l’ordre établi et n’avait aucune envie d’entendre les exploits de la populace.
— Selon Boucher, Clément semblait haïr notre bougre de roi plus que l’Antéchrist. Il me vint donc l’idée qu’il pourrait nous en débarrasser…
— Je vous arrête, ma sœur! déclara le duc de Guise. Le roi est intouchable et je ne me résoudrai jamais au régicide.
— Laissons Catherine poursuivre, suggéra le cardinal de Guise qui n’avait pas les mêmes scrupules que son frère.
La duchesse les regarda à tour de rôle, et reprit légèrement calmée.
— Après les barricades, le curé Boucher retrouva Clément qui voulait devenir religieux. Je proposai qu’il entre aux jacobins et quand le curé Boucher partit pour Blois, je suggérai qu’il l’accompagne pour me le présenter.
— Votre Clément n’a aucune chance! lâcha Mayenne. Les quarante-cinq sont toujours autour du roi, sans compter Larcher et Bellegarde. Il devrait les tuer tous pour l’aborder!
— Mais le roi accepte facilement que des
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