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La ville qui n'aimait pas son roi

La ville qui n'aimait pas son roi

Titel: La ville qui n'aimait pas son roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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moindre recoin ou sur les bornes de pierre gênaient continuellement la circulation en interpellant et en retenant
     les passants. Parfois, à cause d’un troupeau de moutons que l’on conduisait à la Grande boucherie, ou d’un charroi de matériaux
     ou de fourrage, l’encombrement provoquait un tel engorgementqu’ils devaient emprunter une sombre ruelle transversale où les encorbellements et les enseignes basses obligeaient les cavaliers
     à baisser la tête.
    Malgré cela Cassandre était heureuse de retrouver cette grande ville si vivante. Les cris et les complaintes perpétuels des
     boutiquiers attiraient son attention et elle s’arrêtait souvent pour examiner les gâteaux, les châtaignes, les rubans ou les
     rabats pour cols.
    Olivier s’approchait alors d’elle. Ils échangeaient quelques mots en riant comme des enfants pendant que Caudebec surveillait
     les larrons et les coupeurs de bourse qui rôdaient.
    Deux ans après son départ, Olivier ressentait à quel point combien cette ville sale, bruyante, violente, ingrate et intolérante
     lui avait manqué. Il songeait à ce que lui avait dit son ami Montaigne :
    « Paris a mon cœur, je l’aime tendrement jusqu’à ses verrues et à ses taches. » Il connaissait maintenant une grande partie de la France, mais c’est Paris qu’il aimait, et il observait avec bonheur le plaisir de son épouse. Intérieurement, il se jurait que la paix revenue – car elle reviendrait! – ils vivraient ici.
    Enfin ils arrivèrent à la poterne ruinée qui marquait la limite de l’antique enceinte de Philippe Auguste. Ils tournèrent
     dans la rue Mauconseil pour longer l’église et l’hôpital Saint-Jacques qui hébergeait les pèlerins de Compostelle.
    Sur leur droite, entre des maisons à pignons, des potagers et des vergers, se dressaient les tours ruinées de l’enceinte du
     Moyen Âge ainsi que le corps de bâtiments de l’hôtel de Bourgogne avec son grand donjon de plus de dix toises de haut. C’était
     sur cette parcelle envahie de plantes folles et de lierre que Diego de Mendoza avait édifié son hôtel devenu l’ambassade d’Espagne
     depuis qu’il était habité par son cousin Bernardino, l’ambassadeur de Philippe II.
    Les trois cavaliers passèrent sous l’enseigne de l’hôtellerie de la Sainte-Reine qui représentait une femme couronnée dont certains assuraient qu’elle était la mère de Saint Louis, et d’autres la comtesse Mahaut. À la porte de l’auberge, décorée de branches de buis – fête des Rameaux oblige! – une pancarte indiquait en gros caractères : Dîner du voyageur : huit sols, coucher du voyageur : vingt sols, cheval douze sols.
    Dans cette rue boueuse, puante, bordée de ruines et de terrains en friche, l’hôtellerie avait bonne apparence, jugea Olivier.
     Sans doute était-elle fréquentée par les visiteurs de l’ambassadeur d’Espagne, aussi songea-t-il à y prendre leurs chambres.
    Ils passèrent encore devant quelques étroites maisons en encorbellement et hauts pignons pointus avant d’arriver devant l’hôtel
     de Mendoza. Un coche peint en rouge tiré par quatre chevaux arrêté devant gênait le passage. Prenant le temps de le contourner,
     ils observèrent la façade à colonnades. Les fenêtres étaient protégées par d’épaisses grilles et la porte était ferrée. Plusieurs
     hommes en livrée avec hallebarde et morions montaient la garde. Olivier remarqua que le coche, dont les rideaux de cuir étaient
     tirés, avait l’air vide. Sans doute attendait-il quelqu’un.
    Au carrefour suivant, ils empruntèrent la rue Neuve-Saint-François, une voie non pavée aux profondes ornières emplies de déjections.
     C’est là que les Confrères de la Passion avaient fait construire leur théâtre, bâtiment en équerre autour d’une cour avec
     une autre entrée rue Mauconseil. Ils s’arrêtèrent devant une porte en retrait, au fond d’un grand porche peint en vert dont
     les poteaux de bois aux extrémités sculptées en têtes de saints soutenaient un étage. Au-dessus, une enseigne représentait
     Joseph portant Jésus sur ses épaules. De l’autre côté de la rue s’élevaient quelques masures appuyées sur un vieux mur affaissé
     ainsi que trois maisons en construction. On apercevait, dépassant des arbres, des morceaux de tour couverts de vigne vierge
     et surtout la masse imposante du donjon de Jean sans Peur.
    — François, dit Olivier à Caudebec, attends-nous

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