La ville qui n'aimait pas son roi
maintenant, il y a des plumes, de l’encre et des feuillets dans ce bureau….
— Nous avons déjà trop défié la chance, madame, répliqua Venetianelli. Il vaut mieux partir, ou alors les emporter.
— Nous n’emporterons rien, intervint Olivier, et nous n’utiliserons ni les plumes ni les feuilles du bureau! Nous savons quand arrivera le convoi d’or, et par où il vient, cela suffit. C’est une chance unique de nous en emparer. Si Moreo découvre qu’on a fouillé chez lui, il changera ses plans. None a sonné depuis longtemps. (Il regarda sa montre pendue à une chaîne autour de son cou.) Nous avons tout juste le temps de nous préparer pour notre dîner chez le marquis d’O…
— Ce n’est pas possible d’abandonner toutes ces informations! protesta Cassandre.
— Tu les as eues en main, lui dit Olivier. Venetianelli te fera aussi un résumé de ce qu’il a lu. Tu rassembleras tout cela dans un mémoire en rentrant.
Il remit les papiers dans les cartons, à peu près dans l’ordre où ils les avaient trouvés. Venetianelli rangea tout dans le
placard, remit le coffret à sa place, puis referma la porte du coffre et celle à secret. Ils balayèrent la pièce des yeux,
vérifiant qu’ils n’avaient rien dérangé et sortirent. Venetianelli manipula la serrure et ils rejoignirent Caudebec. En bas,
ils rencontrèrent le portier.
— Nous ne pouvons attendre plus! lança Venetianelli avec colère, la main sur son épée. Juan Moreo a dû nous oublier, mais moi, je ne l’oublierai pas!
Sur ces mots menaçants, ils traversèrent lentement le jardin, sortirent, retournèrent rapidement au parvis de l’église puis
filèrent vers l’écurie.
— Simuler la colère a l’avantage de faire peur aux domestiques, leur expliqua l’Italien dans un fou rire dès qu’ils furent éloignés. Le portier ne parlera pas de notre visite à Moreo, car ce serait lui rappeler son impolitesse!
— Mais il se souviendra que don Moreo n’est pas revenu…
— Il ne dira rien, croyez-moi. Ce serait se mêler d’une querelle qui lui attirerait des ennuis.
Ils reprirent leur monture et quittèrent l’enclos sans échanger d’autres paroles. C’est dans la rue du Templequ’Olivier raconta brièvement à Caudebec ce qu’ils avaient découvert et ce n’est qu’à la tour qu’il expliqua ce qu’il avait
en tête.
— Ce convoi arrivera soit par la porte Saint-Denis, soit par la porte Saint-Martin. Aux premiers jours de mai, nous nous installerons là-bas pour surveiller toutes les entrées dans Paris.
— Il peut prendre une autre porte, objecta Caudebec qui, nous l’avons dit, détestait les fastidieuses surveillances.
— Venant de Picardie, la route directe est le chemin du roi Dagobert qui passe par Saint-Denis. Ce n’est que dans le faubourg que le chemin se sépare vers les deux portes.
— D’accord, grimaça Caudebec, mais si nous restons plusieurs jours, nous serons repérés.
— Devant ces deux portes, il y a suffisamment de cabarets et d’hôtelleries pour qu’on ne nous remarque pas. Il suffira que Venetianelli nous grime un peu.
— C’est possible, en effet, reconnut l’Italien. Admettons maintenant que ce convoi arrive, comment le reconnaîtrons-nous?
— Il sera escorté par des gardes espagnols, ou des chevaliers hospitaliers… Le plus probable est que ce seront des Espagnols. Un gros chariot avec des hommes d’armes ne pourra nous échapper.
— Et ensuite? demanda Cassandre.
— J’avoue ne pas avoir de réponse, répondit son mari. Cela dépendra de l’endroit où le chariot sera conduit. À un moment, son contenu passera aux mains du duc de Guise. Nous n’aurons qu’à saisir une occasion.
— Nous sommes trois, ironisa Caudebec, quatre avec Mme de Saint-Pol. Et nous nous attaquerions à une escorte espagnole?
— Nicolas pourra nous aider, suggéra Olivier. Il y a aussi mon valet d’armes chez M. Sardini. Guise ne voudra pas se faire remarquer avec cet or, donc il cherchera à être discret.
— Peut-être, dit Caudebec en faisant la moue. Vous semblez aussi oublier que d’après M. Poulain la Ligue soulèvera Paris dans huit jours. Ne devions-nous pas partir avant?
— Après ce que nous avons découvert, nous ne pouvons plus partir, répondit Olivier en secouant la tête.
1 En décembre 1591. L’épitaphe de Louchart, détruite, se trouvait au second pilier à droite en entrant par la nef.
2 Là où se trouve
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