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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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mien comme il est le vôtre – je mets sous les pieds
toute idée de vengement ou d’intérêt particulier, et j’en ferai autant avec
vous, Monsieur, quand vous serez rentré dans votre devoir !
    — Monsieur
de Châtillon, ôtez-vous de là, dit le Gascon en lui prenant familièrement le
bras et en le tirant dans la tranchée, ces pendards vont vous tirer sus !
Il n’y a pas à se fier à ces Guiseux qui font cette nuit les chattemites et
nous voudront massacrer demain. Un ligueux loyal est bête plus rare que putain
qui file, ou curé qui laboure !
    Saillie qui
fit rire nos gens à gueule bec, comme bien on pense, et les remit du bon du
cœur à l’ouvrage et d’autant qu’il était devenu bien visible par l’échange des
propos avec l’autre bord que les ligueux n’étaient pas si ravis à la pensée
d’avoir à se frotter à eux au matin.
    Les nôtres
continuèrent à se remparer encore deux grosses heures après le départ de M. de
Châtillon, et Rosny, s’estimant à la parfin satisfait, posta des sentinelles.
Et dans la tranchée qu’ils avaient creusée, sans retirer morion ni corselet,
les arquebusiers s’écroulèrent dans le sommeil, tant ils étaient las d’avoir
galopé tout le jour et peiné la moitié de la nuit, d’aucuns se plaignant
d’avoir soif et faim, mais sans aigreur aucune, en gens habitués à ne se
remplir le ventre qu’au hasard des occasions, bonnes ou mauvaises, qui se
pouvaient encontrer.
    Pour moi, je
ne m’ensommeillais pas, tant m’agitait l’émeuvement de mon premier combat, car
je ne comptais pour rien les embûches, duels et périls où j’avais été jusque-là
en mon aventureuse vie. La mort, de ce jour, devenait quotidienne, et celle à
laquelle j’avais réchappé ce matin me pouvait atteindre demain. Cependant, si
navrant que fût pour moi le pensement d’abandonner ce monde que tant j’aimais,
cette vie dont j’étais raffolé, ces êtres qui tenaient si fort à mon cœur, je
voyais une si pressante, urgente et contraignante nécessité à battre la Ligue
pour établir la paix et la liberté des consciences, que j’acceptai la
possibilité de ma personnelle annihilation comme prix à payer pour cet
incommensurable bienfait. En ces dispositions si résolues et si fortes, et
m’étant en elles recueilli, j’adressai une ardente prière au Seigneur pour
qu’il permît que ce but fût atteint, et cependant, la vie des miens préservée,
et la mienne, s’il lui plaisait. La pensée, tandis que j’achevai mes oraisons,
me frappa que les meilleurs des ligueux – ceux qui ne se ruaient pas pour
lors à la picorée ni au forcement des filles – étaient se peut, à’steure,
occupés, eux aussi, à réciter leur chapelet. Hélas, c’était le même Dieu, mais
non pas la même prière, car en leur farouche et fanatique zèle ces malheureux
demandaient au Seigneur l’extirpation par le fer et le feu des hérétiques,
tandis que nous voulions, nous, que les Français naturels pussent vivre côte à
côte, qui allant à messe, et qui au culte, et sans qu’aucun fût molesté.
    Cependant, je
dus m’assoupir, car me désommeilla Miroul à la pique du jour, me cornant à
l’oreille en me secouant :
    — Le
roi ! Voici le roi !
    Pourtant, ce
cri, que d’aucuns des sergents et des sentinelles çà et là répétèrent, eût
failli à ébranler les arquebusiers de leur profond endormissement, si une voix
gasconne que je commençais à bien connaître n’avait dit :
    — Cap
de Diou, il apporte pain et vin !
    Ces mots
«  pain  » et «  vin  » frappèrent les ouïes
ensommeillées plus fort que n’avait fait le mot « roi », et
cornedebœuf ! quel tohu-vabohu ce fut dans les tranchées – corselets
et cuirasses se toquant et s’entrechoquant comme enclumes dans le remue-ménage.
qui s’y fit – quand nos ventres-creux se levèrent, et joyeusement
s’ébrouèrent, la salive jà en bouche !
    Le roi, dès
qu’il eut mis pied dans l’île, ordonna que l’on déchargeât de l’embarcation qui
l’y avait mené les subsistances que j’ai dites et qu’elles fussent tout de gob
équitablement distribuées aux cinq cents arquebusiers qui se trouvaient là.
Pendant ce temps, nous ayant gracieusement présenté la main à Rosny et à moi,
Sa Majesté voulut voir les remparements que les écharpes blanches avaient
construits, et fit le tour de l’île avec Rosny et moi-même, se faisant
expliquer la raison des créneaux

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