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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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dont vous aurez besoin. Je
vais sur l’heure avoir l’honneur de prendre d’assaut le château paternel ou de
mourir.
    — Monsieur !
Monsieur ! cria le frère aîné en donnant quelque signe d’émeuvement,
serez-vous le Caïn de l’Histoire Sainte ?
    — Non,
Monsieur ! cria Rosny, nous prendrons à rebours ladite Histoire. Je serai
l’Abel justicier du Caïn barbare et turc que je vois chattemitement soupirer au
fenestrou que voilà. Messieurs ! poursuivit-il en se tournant vers sa
suite, serez-vous avec moi en ce chamaillis ?
    À quoi, en
notre ire, tant l’esprit partisan de l’aîné des Rosny nous avait indignés, nous
poussâmes une hurlade tant forte et sauvage qu’elle vous eût débouché un sourd.
Et M. de Rosny, nous ayant déployés, fit mettre incontinent son petit canon en
batterie, et ordonna à une douzaine d’arquebusiers d’aller quérir des échelles au
village de Rosny, lequel était fort proche. En même temps, ayant démonté et
confié les chevaux aux pages et nous-mêmes nous étant reculés, nos écuyers
allumèrent les mèches de nos arquebuses, afin qu’elles fussent prêtes à la
mousqueterie, si le commandement nous en était baillé.
    Cependant, ces
préparations et la résolution de M. de Rosny firent quelque effet sur le sire
du lieu, lequel apparaissant derechef au fenestrou dit, se frottant le chef, et
d’une voix qui n’était plus tant quiète et sereine :
    — Monsieur
mon cadet, c’est folie ! Allez-vous mettre à sac le château de nos
pères ?
    — Nenni,
dit Rosny d’une voix forte, je le prendrai et ne toucherai pas un cheveu à vos
gens de pié. Je les renverrai hors, dès que je serai dedans. Quant à vous,
Monsieur mon frère aîné…
    — Quant à
moi ? dit l’aîné relevant la crête, comme s’il s’attendait à quelque
braverie…
    — Je
respecterai, quoique j’en aie, votre droit d’aisnage et me ramentevant des
liens que vous oubliez, je vous renverrai à votre conscience.
    Il chut alors
entre les deux Rosny un long silence, durant lequel j’admirais la considérable
habileté du huguenot, qui offrait tout ensemble à son frère papiste la guerre
et la clémence.
    — Monsieur,
dit l’aîné des Rosny, je n’aurais garde d’oublier les liens dont vous parlez et
serais bien marri que les circonstances de nos civiles luttes soient telles que
je me verrais obligé à les rompre. Le monde verra-t-il le désolant tableau de
deux Rosny, nés de mêmes père et mère, s’entregorgeant à Rosny ?
    — Le
monde, dit incontinent le huguenot, verra-t-il le désolant spectacle de l’aîné
des Rosny interdisant à son frère cadet l’entrant du logis où son épouse se
meurt ?
    À quoi, nous
(j’entends la suite de Rosny) crûmes bon, pour appuyer ce propos, de gronder
comme dogues à l’attache, de serrer les poings, de jeter rageusement nos
chapeaux à terre et de faire telles furieuses mimiques qui ne laissent aucun
doute sur notre résolution d’en découdre avec ce barbare.
    — Monsieur,
dit à la parfin l’aîné des Rosny, si je vous baille l’entrant, comme mon cœur
n’a cessé de m’en aviser depuis que j’ai jeté l’œil sur vous, promettez-vous,
une fois dedans, de ne point molester mes gens, de me rendre tel respect que
vous devez à mon droit d’aisnage et de me remettre ès poings le château de nos
pères au lieu de le tenir pour Navarre et de vous y remparer.
    — Tel
n’est pas mon propos, Monsieur, dit Rosny. Dès que j’aurai rendu mes devoirs à
mon épouse, j’irai rejoindre le roi de France et le roi de Navarre en leur
victorieux combat contre les rebelles.
    L’aîné des
Rosny, qui était précisément un de ces rebelles, avala tout ensemble, et la
promesse, et la couleuvre, comme si elles eussent été l’une et l’autre petits
pains de même farine.
    — Monsieur
mon cadet, dit-il contrefeignant le plus serein contentement, vous me donnez là
toute satisfaction : votre parole me suffit et de la mienne me dégage.
Portier, abaisse incontinent le pont-levis, lève la herse et déclos l’huis.
Monsieur mon frère, vous êtes ici chez vous.
    Ce qui,
certes, était vrai, mais qui avait demandé, pour être reconnu comme tel, un
canon, des échelles et des arquebuses allumées. Bel exemple de cette cruelle
division que le zèle strident des ligueux avait introduite en toute ville, tout
quartier, toute rue, et même toute famille, tant est que père et fils, frère et
frère, oncle et

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