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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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veuille être à la parfin présent à la prise de Paris.
    Le roi, tandis
qu’il discourait ainsi, articulant soigneusement chaque mot, comme à son
accoutumée, et rythmant sa phrase comme un orateur fait de sa harangue, mais
sans rien d’apprêté cependant, cette élégance de langage lui étant comme
naturelle et coulant de source, marchait de long en large dans la chambre
royale non pas du petit pas sec, nerveux et musculeux de Navarre, mais à
longues et majestueuses enjambées, la crête haute, et à ce que je vis, fort
aminci et roboré par la vie active et guerrière qu’il menait, ayant eu plus
souvent ces trois mois écoulés la fesse sur un cheval que sur sa chaire
d’apparat. Et pour moi qui l’envisageais avec l’œil du médecin, il me parut en
meilleur point que je ne l’avais vu de longtemps, sans bedondaine aucune, le
dos redressé, la mine allante, l’œil allègre, la face ni grise ni chiffonnée,
et fraîche la main qu’il m’avait présentée.
    Il avait alors
trente-huit ans – âge dont j’avais de bonnes raisons de me ramentevoir
puisqu’il était le mien – et pour la première fois depuis que j’avais jeté
l’œil en soixante-quatorze sur Sa Majesté, je la trouvai plus jeune et verte
que son âge, son bel œil comme lustré d’espoir et brillant de l’absolue
certaineté de rentrer bientôt, triomphant, dans cette ingrate Paris qu’il avait, disait-il, aimée plus que sa propre femme et qui, quatorze
mois plus tôt, l’avait chassé hors ses murs.
    — Ha !
dit le maréchal de Biron – vrai vieux Français fidèle à sa patrie et à son
roi, même aux pires heures de Blois, comme l’avaient été ceux qui étaient là,
Du Halde, Revol, François d’O, d’Entragues, Larchant, Rambouillet et
Bellegarde – ceux-là mêmes qui avaient été dans le secret de Sa Majesté au
cours de ces sombres et pluvieuses journées de Blois où fut décidée l’exécution
du duc de Guise – Ha ! Sire ! dit le maréchal de Biron, de sa
voix rude et sonore, si vous le voulez ainsi, je donne l’assaut demain, et la
bonne ville est à vous !
    — Mon
père, dit le roi, qui par une marque d’extrême condescension et amitié était
accoutumé à appeler ainsi le vieux maréchal, vous fûtes le premier qui m’ayez
montré le métier des armes et je ne doute pas que vous fassiez brèche en la
plus forte muraille. Mais j’y voudrais des moyens plus doux, afin que d’éviter
le sac, le sang, le stupre, toutes choses que j’abhorre. Comme vous savez, j’ai
reçu quelque secrète promesse d’aucuns habitants intramuros, touchant
l’ouverture des portes de Paris du côté des faubourgs Saint-Germain et
Saint-Jacques. Attendons-en l’effet. Laissons les choses mûrir. Déjà j’ai ouï
dire par des prisonniers que nous avons faits auxdits faubourgs que la peur
s’était tellement rendue maîtresse du cœur des gens de guerre et manants de la
ville que beaucoup se dérobaient pour sortir de Paris et que les rues étaient
pleines de gémissements et de larmes.
    — Sire,
dit François d’O avec un fin sourire, l’attente a encore d’autres fruits pour
vous, et qui ne vous sont pas moins chers. Car j’ai ouï dire que d’aucuns des
grands seigneurs huguenots, jadis les plus encharnés à vous faire la guerre,
inclinaient à quitter par amour de vous leur religion et leur parti.
    — C’est
assez chucheté là-dessus, dit Henri avec un petit geste de la main, mais d’un
air fort heureux. Mon bien-aimé cousin et frère, le roi de Navarre, prendrait
se peut quelque pique, s’il apprenait que MM. de Châtillon, Clermont d’Amboise
et le vidame de Chartres, sont de ceux-là et qu’ils inclinent à caler la
voile et aller à contrainte, comme fit en son temps le baron de
Siorac.
    À quoi
François d’O, après m’avoir envisagé en riant, dit :
    — Siorac
a bien fait, et fera bien aussi de l’imiter, quand il sera votre dauphin en
votre Louvre, le roi de Navarre, lequel est bien trop avisé pour rêver qu’un
souverain protestant puisse jamais régner sur un pays catholique.
    — Ha !
Ne l’y poussons pas trop cependant ! dit le roi en levant la main :
la dignité d’une conscience doit être ménagée. La foi ne se doit bailler que
par la persuasion, et non par la contrainte et le couteau. C’est là, si vous
m’en croyez, poursuivit-il gravement, en scrutant de son bel œil noir les faces
des gens qui se trouvaient là, la grande leçon que Dieu nous

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