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La Volte Des Vertugadins

La Volte Des Vertugadins

Titel: La Volte Des Vertugadins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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nez !
    — Cela dépend, Monsieur le Chevalier, de la façon de
l’approcher. Si vous lui dites que le commerce de Paris est grandement effrayé
pour ce qu’il redoute sa ruine, le Roi n’étant pas impiteux, cela le touchera
peut-être. De grâce, Monsieur le Chevalier, touchez-lui mot !
    — J’y vais songer, dis-je en me levant et demander, de
prime, l’avis de mon père et, s’il n’y est pas opposé, je le ferai.
    Elle me fit là-dessus de grands mercis et une gracieuse
révérence, mais au moment de me quitter, et la main déjà sur la poignée de
l’huis, elle se retourna et me dit, baissant la voix et sa langue touchant à
peine les mots, comme si elle mettait entre parenthèses ce qu’elle allait
dire :
    — On me dit, Monsieur, que vous avez une nouvelle
soubrette…
    — En effet, dis-je sur le même ton.
    — Et en êtes-vous content, Monsieur ? reprit-elle
après un silence.
    — Je le suis, mais je ne t’ai pas pour autant oubliée,
si c’est là ce que tu veux savoir.
    — Je vous remercie de me le dire, dit-elle avec
gravité.
    Et elle s’en fut.
    Dès que mon père fut de retour, je lui contai cet entretien
et, son clair visage se rembrunissant, il me dit :
    — Comment donner tort à Toinon ? Cet édit sur les
monnaies, personne n’en veut dans le royaume. Il est injuste, pernicieux,
onéreux au peuple et ruineux pour tous.
    — Pour vos coffres aussi, Monsieur mon père ?
    — S’il ne s’agissait que d’eux ! Mais les sommes
que j’ai confiées à mon honnête Juif pour qu’il leur donne du ventre vont
maigrir d’autant. Et aussi mes loyers de ville et mes fermages des champs. Pour
ceux-ci, par bonheur, j’en ai peu, ménageant mes terres moi-même avec mes gens
et il se peut que la guerre venant, mes blés renchérissent, ce qui sera
compensation, mais petite et incertaine, vu les difficultés et les dangers
qu’il y aura à les transporter.
    — Et mon bon oncle de La Surie ? dis-je.
    — Votre bon oncle de La Surie, dit La Surie en entrant
dans la salle, subira le même prédicament, mais à moindre échelle. Toutefois ne
vous effrayez pas, mon beau neveu, nous ne sommes pas encore réduits à aller
pêcher des bûches chez nos voisins !
    Cette allusion à notre petite couseuse de soie ne fut guère
du goût de mon père et le voyant sourciller, je changeai de sujet.
    — Monsieur mon père, dis-je, pensez-vous que je doive
approcher le Roi, comme me le demande Toinon ?
    La question était heureuse, puisqu’elle le fit rire.
    — Toinon, dit-il, toute futée qu’elle soit et adroite
boutiquière, est naïve de croire que votre démarche y pourrait rien
changer ! D’autant qu’elle fut faite déjà. Et par quelqu’un, à qui son
âge, son caractère et ses services donnaient infiniment plus de poids que vous
n’en pourriez avoir !
    — Et par qui donc ? dit La Surie.
    — Le Maréchal d’Ornano.
    — Ah ! dis-je, je m’en ressouviens, vous me l’avez
montré lors du mariage du Duc de Vendôme ! C’est ce gentilhomme vieil et
le cheveu neigeux, mais si noir de sourcil et de peau qu’on le croirait
maure !
    — D’Ornano est un Corse, et plus vaillant et fidèle
soldat, vous n’en pourrez trouver. Il a servi Henri II, Charles IX,
Henri III et notre Henri avec une adamantine loyauté et seul en la cour il
a osé parler au Roi à la franche marguerite, lui représentant comment, du fait
des édits qu’on lui mettait sus, le peuple endurait beaucoup et n’en pouvait
plus. « Sire, a-t-il osé dire, vous n’êtes plus aimé de votre peuple,
telle est la vérité ! On n’a jamais autant médit et détracté
d’Henri III qu’à s’teure de Votre Majesté. Et je craindrais fort, à la
parfin, un désespoir et une révolte. »
    — Et que dit le Roi ?
    — Le Roi se mit de prime très en colère mais, ayant
réfléchi quelque peu là-dessus, il remercia d’Ornano, lui donna une forte
brassée, le caressa, et le loua devant toute la cour de sa franchise.
    — Et, dis-je, tint-il compte de sa remontrance ?
    — Assez peu. Toutefois, il révoqua les édits les plus
méchants.
    — Et l’édit des monnaies ?
    — Celui-là, par malheur, il n’est pas près de le
retirer, tant Sully et lui-même paraissent y tenir.
     
    *
    * *
     
    Bassompierre fut fort discret au sujet de notre gageure et
comme de mon côté, je n’en pipai mot à personne, mon père l’eût ignorée jusqu’à
la fin des temps si Mariette, à la

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