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La Volte Des Vertugadins

La Volte Des Vertugadins

Titel: La Volte Des Vertugadins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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longue, ne lui en eut touché mot. Il ne
laissa pas, alors, de me questionner et je lui fis le conte qu’on a lu.
    — Ah bien ! dit-il en me jetant un regard
pénétrant, croyez-vous qu’il y eût là magie ?
    — Je le crois et le décrois, dis-je, quelque peu
vergogné de m’avouer crédule.
    — Fi donc ! dit mon père en riant, décroyez-le
tout à plein !
    Et dites-vous que le hasard, qui fait parfois si mal les
choses, les fait parfois assez bien. Observez, je vous prie, l’enchaînement des
faits : vous voyez Philippote cinq minutes en l’église
Saint-André-des-Arts. Vous lui donnez le bel œil. Fille se souvient de ces
rencontres. Et sa sœur étant désoccupée, elle vous l’envoie. Où est le
miracle ? Je ne vois là que coïncidence.
    — Toutefois, Monsieur mon père, Bassompierre croit à la
vertu de la bague et à sa fée allemande.
    — Il y croit, parce qu’il est joueur et que le hasard
est son dieu. Il y croit aussi, parce que la légende est pour lui flatteuse et
qu’il la conte avec esprit. Il y croit enfin pour ancrer dans l’esprit des
dames de la cour son irrésistibilité… Et tant mieux que vous y ayez cru
vous-même dans le chaud du moment, puisque la bague vous a donné l’audace de
prendre tout de gob la main de Louison.
    — Jour du ciel ! Comment savez-vous cela ?
    — Louison l’a dit à Mariette. Mariette me l’a répété.
    — Et qu’est-ce que Louison a pensé de cette
effronterie ?
    — Que voulez-vous qu’elle en pensât ? Les femmes
pardonnent toutes les audaces à un homme dès lors qu’il leur plaît.
    La fin novembre vit deux événements survenir dont le premier
était prévu et aurait dû être estimé heureux, si la cour de France n’avait pas
été imbue, depuis deux siècles, d’un préjugé salique : la Reine accoucha
en son Louvre d’une fille qui fut prénommée Henriette-Marie et à qui on ne fit
pas grand accueil, car le Roi, la Reine, la cour et le peuple eussent voulu un
garçon. Henriette-Marie, sur la seule vue de son sexe, ne parut pas valoir la
grosse cloche du Louvre, ni la poudre d’un seul coup de canon, ni un seul feu de
joie sur les places publiques, ni la plus mesquine fête de cour et la
sage-femme fut bien punie d’avoir osé mettre au monde une pisseuse : on ne
lui donna pas les huit mille écus qu’elle avait reçus pour chacun des frères de
la pauvrette. Henriette devenue femme, on eût pu croire que le destin allait
lui sourire enfin, puisqu’elle maria le Prince de Galles et, peu après, devint
reine. Mais elle perdit roi et trône en 1649, quand son mari, le roi
Charles I er , périt sur l’échafaud.
    Le surlendemain de cette naissance, en début d’après-midi,
le Roi me manda au Louvre et, s’étant enfermé au bec à bec avec moi en un petit
cabinet, me dicta une lettre à Jacques I er d’Angleterre, à
charge pour moi de la traduire en anglais. Cette missive, où – ce n’est
aujourd’hui un secret pour personne – le Roi demandait à Jacques de le
soutenir en hommes et en pécunes dans la grande guerre que notre Henri
préparait contre les Habsbourg d’Autriche et les Habsbourg d’Espagne, était
rédigée dans les termes les plus aimables, mais avant que de me la dicter, le
Roi soulagea oralement sa bile contre le souverain anglais dont on lui avait
rapporté, le concernant, de fort méchants propos.
    — Sais-tu, mon petit cousin, ce que ce gros balourd a
osé dire de moi ? : « Ce n’est pas amour, mais vilenie de
vouloir débaucher la femme d’autrui. » Ventre Saint-Gris ! Ce
malitorne [60] , qui n’a pas même la puissance de
débaucher sa propre femme, est bien avisé de me faire la morale ! Sa mère,
après avoir laissé assassiner son mari, épousa l’assassin ! Quand je veux
une leçon de morale, je me confesse au père Cotton et n’ai que faire des
homélies de ce Godon ! Pourquoi diantre souris-tu, mon petit cousin ?
    — Pour ce que, Sire, vous dites « Godon »
comme Jeanne d’Arc pour désigner un Anglais. Or Jacques I er n’est pas Anglais, mais Écossais.
    — Bien le sais-je, mais depuis qu’il a assis son gros
cul sur le trône d’Angleterre, ce lourdaud a contracté l’antique manie anglaise
de ne penser qu’à soi ! Il a été bien aise que j’envoie des troupes pour
aider les vaillants Hollandais à repousser l’Espagnol ! L’Espagnol
installé en Hollande, ç’eût été la mort de son royaume et bien le
savait-il ! Mais

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