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Labyrinthe

Labyrinthe

Titel: Labyrinthe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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Sajhë.
    « Le soleil se lève tard sur les montagnes en cette époque de l'année. »
    Guilhem observa un instant de silence.
    « Comment entendez-vous procéder ? s'enquit-il, soucieux de respecter les prérogatives de son compagnon en ces lieux.
    — Nous devons de prime panser les chevaux, puis nous chercherons un logis pour nous abriter. Je doute qu'ils puissent arriver avant le matin.
    — Vous n'entendez point…, commença Guilhem en regardant la maisonnette.
    — Que non, pas là-bas. Je connais une femme qui nous procurera le gîte et le couvert. Demain, nous monterons plus haut et dresserons un campement quelque part près de la grotte pour guetter leur arrivée.
    — Vous pensez donc qu'Oriane contournera le village ?
    — Elle se doute de l'endroit où Alaïs a dissimulé le Livre des mots . Elle aura eu du temps en suffisance pour étudier les deux autres livres au cours des trente dernières années. »
    Guilhem lui coula un regard de biais.
    « Est-elle dans le vrai ? Est-il toujours dans la grotte ?
    — J'ignore par quelle rouerie Oriane a pu convaincre Bertrande de la suivre, dit-il, ignorant la question de Guilhem. Je lui avais pourtant recommandé de ne point départir sans moi. D'attendre mon retour. »
    Guilhem ne répondit rien parce qu'il ignorait comment dissiper les craintes de Sajhë. Ce dernier ne tarda pas à s'abandonner à son courroux :
    « Pensez-vous qu'Oriane ait emporté avec elle les deux autres livres ? demanda-t-il brusquement.
    — Elle ne prendrait point un tel risque. J'incline à penser que les livres sont plutôt en sûreté dans ses coffres, quelque part à Évreux ou à Chartres.
    — L'aimiez-vous ? »
    Guilhem se sentit désarçonné par la brutalité avec laquelle la question lui fut posée.
    « Je la désirais, certes. J'étais envoûté, imbu de mon importance. Je…
    — Il s'agit d'Alaïs et non d'Oriane », le corrigea abruptement Sajhë.
    Guilhem eut l'impression qu'une bande d'acier lui enserrait le gosier.
    « Alaïs… reprit-il, plongé dans ses souvenirs jusqu'à ce que l'intensité du regard que Sajhë faisait peser sur lui le ramenât à la réalité.
    « Après… Après la chute de Carcassona, je ne l'ai vue qu'une fois, et nous demeurâmes ensemble trois mois durant. L'Inquisition s'était saisie d'elle et…
    — Je sais tout cela ! vitupéra Sajhë. Je sais… » reprit-il d'une voix éteinte.
    Décontenancé par l'attitude de son compagnon, Guilhem fixait obstinément l'horizon, quand il se prit à sourire.
    « Oui, assurément. Je l'aimais plus que tout au monde. Je n'avais seulement pas compris à quel point l'amour est précieux, combien il est fragile. Jusqu'à ce qu'il se brise entre nos doigts.
    — Est-ce pourquoi vous l'avez laissée partir, après Tolosa, et qu'elle est revenue au village ?
    — Après ces semaines passées ensemble, Dieu sait combien il me fut douloureux de me tenir loin d'elle. J'eusse aimé la revoir, ne fût-ce qu'une fois. J'espérais que, la guerre finie, nous pourrions… Mais, à l'évidence, elle vous a trouvé. Et ce jour d'hui… »
    La voix de Guilhem se brisa. Des larmes jaillirent de ses yeux, que le froid rendait brûlantes. Près de lui, il sentit Sajhë s'agiter et, l'espace d'un instant, l'atmosphère changea entre eux.
    « Pardonnez-moi de m'abandonner ainsi en votre présence. » Guilhem inspira longuement. « La prime qu'Oriane avait mise sur la tête d'Alaïs était substantielle, tentante même pour ceux qui n'avaient nulle raison de lui vouloir de mal. J'ai soudoyé ses espions pour lui faire parvenir de fausses informations. Durant près de trente ans, cela contribua à lui sauver la vie. »
    Guilhem se tint coi, alors que, pareille à un intrus, lui revenait à l'esprit l'image du livre serré contre la cape rouge dévorée par les flammes.
    « J'ignorais que sa foi fût si grande ou que sa volonté de ne voir point le Livre des mots tomber entre les mains d'Oriane pût la conduire à pareille extrémité. »
    Il se tourna vers Sajhë en espérant y voir la vérité qu'il celait au fond de son regard ambré.
    « J'eusse préféré qu'elle ne choisît point de périr, poursuivit-il. Pour vous, l'homme qu'elle a choisi, pour moi, pauvre fol qui la perdit, et surtout, pour le bien de votre fille. Pour connaître Alaïs…
    — Pourquoi nous prêtez-vous assistance ? l'interrompit Sajhë. Pourquoi êtes-vous venu ?
    — À Montségur ? »
    Sajhë secoua impatiemment

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