Labyrinthe
faille, en train de scruter l'intérieur du souterrain, se dit-elle.
Elle ferma les yeux et se revit, mains appuyées de part et d'autre de la paroi rocheuse. C'était lisse. Le rocher était étonnamment plat, comme poli ou érodé. Un pas de plus dans l'obscurité.
Ça descendait.
Elle se mit à dessiner à traits sûrs et rapides, car les proportions étaient encore dans sa mémoire. L'ouverture, le tunnel, la chambre funéraire. Sur une autre page, elle fit un croquis de ce qu'elle avait vu plus bas, des marches à l'autel et les squelettes entre les deux. En légende, elle inscrivit tous les objets qu'elle avait observés : le poignard, le sac de cuir, le fragment d'étoffe, l'anneau. L'extérieur de celui-ci était lisse et plat, d'une épaisseur surprenante, avec une très fine rainure sur le milieu. Étrange que la ciselure se trouvât à l'intérieur, où personne, excepté celui qui le portait, ne pouvait en soupçonner l'existence. Réplique miniature du labyrinthe gravé dans la paroi au-dessus de l'autel.
Alice s'adossa à son siège, inexplicablement réticente à retranscrire le motif sur le papier. Quelle taille avait cette gravure ? Deux mètres ? Plus, peut-être ? De combien de couloirs était-il composé ?
Elle commença par tracer un cercle aussi grand que la page, puis s'interrompit. Alors, combien ? Elle aurait incontestablement reconnu le motif au premier coup d'œil si elle l'avait revu. Mais que ce fût sur l'anneau ou sur le mur, il lui était apparu trop brièvement pour se le rappeler exactement.
Dans le dédale de son esprit, la réponse à ce qu'elle recherchait se trouvait quelque part. Dans ses cours d'histoire ou ses leçons de latin, dans les documentaires de la chaîne BBC qu'elle regardait avec ses parents, recroquevillée sur le canapé. Dans le meuble bibliothèque de sa chambre, parmi ses livres préférés. Notamment une encyclopédie illustrée sur les mythes anciens, parmi les pages toutes cornées pour avoir été si souvent feuilletées.
Il y avait, en effet, le dessin d'un labyrinthe, se dit-elle.
Mentalement, Alice ouvrit le livre à la bonne page.
Celui-là était différent. Elle plaça les deux images côte à côte, comme dans « Cherchez l'erreur » qui figure parfois dans la page des jeux des quotidiens.
Armée de son crayon, elle réessaya, résolue à faire mieux qu'un simple cercle. Elle en dessina donc un autre, à l'intérieur du premier, en s'efforçant de les relier. Sans succès. Après plusieurs tentatives tout aussi infructueuses, elle comprit que le problème résidait non seulement dans le nombre de cercles concentriques, mais aussi dans une erreur fondamentale dans la façon de les dessiner.
Alice s'évertua. À son enthousiasme succéda bientôt une grise déception, tandis qu'autour d'elle s'accumulaient les boules de papier froissé.
« Madame Tanner ? »
Alice sursauta, au point que sa mine ripa sur la page.
« Docteur…, corrigea-t-elle machinalement en se levant.
— Je vous demande pardon, docteur. Je m'appelle Noubel. Police judiciaire, département de l'Ariège. »
Sur ces mots, l'homme produisit sa carte de police. Alice feignit d'y jeter un regard, tout en se hâtant de ranger son carnet dans son sac. Il était exclu que le policier vît ses croquis ratés.
« Vous préférez parler anglais ?
— Oui, merci. »
Noubel était accompagné d'un policier en uniforme au regard inquisiteur, assez jeune pour passer pour un collégien. Il ne lui fut pas présenté.
Le gros homme prit place sur le siège de camping. Il y était tellement à l'étroit que ses cuisses débordaient de chaque côté de l'assise de toile.
« Eh bien, madame. Votre nom, je vous prie.
— Alice Grace Tanner.
— Date de naissance ?
— Le 7 janvier 1976.
— Mariée ?
— Quel rapport ? se cabra-t-elle.
— Seulement pour information, docteur, répondit-il d'un ton affable.
— Non.
— Adresse ? »
Alice lui donna celle de l'hôtel de Foix où elle était descendue, puis celle de son domicile en Angleterre, qu'elle dut épeler.
« N'est-ce pas un long chemin pour venir tous les jours de Foix ?
— Il n'y avait plus de place dans la maison allouée aux archéologues, alors…
— Bien. J'ai cru comprendre que vous étiez bénévole, n'est-ce pas ?
— C'est vrai. Shelagh… le docteur O'Donnell est une de mes vieilles amies. Nous étions ensemble à l'université avant que… » Contente-toi de répondre à ses
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