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Lacrimae

Titel: Lacrimae Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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portaient par-dessus une chemise.
    2 - Épaisse soie.

XXII
    Forêt de Montlandon, novembre 1306
    U ne pluie fine et glaciale tombait depuis le milieu de la nuit sans toutefois ralentir l’allure de la haute silhouette maigre, enveloppée dans les pans de son mantel noir doublé de fourrure, dont la capuche était rabattue bas sur le front. Une buée d’effort filait entre les lèvres de la femme qui marchait depuis des heures, piquant l’humus recouvert d’un tapis de feuilles mortes du bout ferré de son long bâton sculpté, une arme bien plus qu’une béquille. Elle tenait de l’autre main un panier d’osier tressé.
    Elle connaissait l’épaisse forêt dans laquelle se succédaient des vagues de chênes, de peupliers et de châtaigniers aussi bien que la paume de sa main, et aurait pu s’y orienter les yeux bandés. Elle en savait par cœur chaque parfum, chaque bruissement, chaque craquement. Aussi avait-elle progressé de nuit, sans aucune inquiétude, sans même s’éclairer d’une esconce, tout juste guidée par la lueur de la lune.
    L’aube s’était peu à peu levée. Elle retrouvait son domaine avec autant d’aisance que si elle l’avait quitté la veille.

    Elle perçut soudain une odeur plus âcre, celle qu’elle attendait, la fumée d’un feu de bois. Encore une vingtaine de toises, la végétation se fit plus dense, d’épais arbustes d’épineux barrant la route. Un choix, un écrin protecteur.
    La chaumière, nichée derrière un rideau d’arbres, apparut. Un autre son, limpide, joyeux : le petit ru qui coulait non loin. La femme sans âge, à qui l’on aurait tout aussi bien pu donner vingt que quarante ans, s’immobilisa, bouche entrouverte, exhalant un long soupir de contentement.
    Elle rabattit la capuche de son mantel, révélant une conquérante chevelure brune très frisée, un visage émacié et d’étonnants yeux presque jaunes. Elle leva le visage vers le ciel bas et gris et accueillit, telle une bénédiction, la pluie qui dévalait sur son front, le long de ses joues, trempait ses paupières closes.

    Chez elle. Elle était enfin chez elle ; du moins dans un de ses lieux, alliés et propices, d’où renaîtrait sa force. S’adressant au panier, elle annonça d’une voix enfantine qui contrastait avec son inquiétante allure :
    — Nous voilà rendus, mon cher Arthur.
    Le panier bascula vers l’avant et un croassement bas lui répondit.
    Elle avança vers la porte et heurta le panneau du pommeau de son bâton. Quelques instants s’écoulèrent et une ravissante jeune fille blonde, aux yeux d’un noir profond, aux cheveux nattés en couronne, entrouvrit et considéra l’arrivante avec méfiance. Soudain, elle la reconnut et la serra à l’étouffer :
    — Igraine… on t’attendait. Ça fait si longtemps qu’on t’attend, balbutia-t-elle avant de fondre en larmes contre la grande femme presque maigre.
    Prise d’une bourrasque d’énergie, la jeune fille se recula et débita à toute vitesse :
    — Entre donc, viens te réchauffer, il fait froid. As-tu faim ?
    Elles pénétrèrent dans la salle commune où régnait une chaleur bienvenue. Igraine reconnut toutes les odeurs de sa jeunesse. Son regard balaya les bottes de fleurs et de simples qui pendaient aux poutres du plafond, huma celle, puissante, du poisson ou du gibier mis à sécher dans l’âtre, celle douçâtre mais forte de la liqueur d’angélique. De minces châtaignes 1 achevaient de rôtir sur une grille.
    — Non pas, mais Arthur sans doute, expliqua Igraine en désignant d’un regard le panier d’osier… Mon compagnon.
    — Mabyn… Elle… Elle avait promis que tu nous reviendrais dès qu’elle devrait partir, mais tu as tant tardé, murmura la jeune fille.
    — J’en suis désolée, Avéla. Son message a peiné à me parvenir. Je me suis mise en route dès que j’ai pu. Je suis là, maintenant. Où se trouve Negan ?
    Avéla sourit à la mention de son frère aîné.
    — Il braconne, à l’habitude. Il est parti hier. Ne t’inquiète pas. Il est plus malin qu’un renard 2 . Les gens du seigneur ne l’attraperont jamais. Il les sent venir avant même qu’ils ne se mettent en route.
    — Oh, je ne m’inquiète pas…, répondit Igraine en ouvrant la cage d’osier.
    Aussitôt Arthur voleta sur son épaule et considéra la jeune fille avec le plus grand sérieux, ouvrant son puissant bec noir sans proférer un son, inclinant la tête d’un côté et de

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