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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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faiblesse de profiter de la présence de ce jeune homme qui ne m'est rien et qui est le moins fait pour que je vous manquasse. Quel que soit le sort que vous me réservez, tant m'a effrayée votre réaction dans laquelle j'ai lu toute la tendresse que vous me vouez, soyez assuré que je ne me croirai jamais assez punie car, j'en conviens, il n'est rien de plus insupportablement odieux qu'une femme coquette sans raison. Venez, je vous en supplie, dès que vous pourrez, on ne peut s'élever au-dessus de ceux qui vous manquent qu'en leur pardonnant. Votre Julie aimante et fidèle. » Cette voix lui parvenait par-delà le tombeau. Il aurait dû être ému mais, la préciosité du style le gênait comme une incongruité. Sans réfléchir, il tendit la lettre à Bourdeau. Celui-ci la parcourut, regarda l'adresse, la retourna dans tous les sens et médita un moment.
    — En vérité, dit-il enfin, les questions les plus intrigantes se multiplient. Que de présomptions, mais que d'incertitudes ! Soyons clair et direct. Les physiques, tout d'abord, celles relevées – avec doute, d'ailleurs – par nos amis lors de l'ouverture du corps de Mme de Lastérieux. Sauf à prétendre que cette femme continuerait à mentir – ce que, ne l'oublions pas, elle n'a cessé de faire tout au long de votre vie commune, en vous dissimulant sa tâche secrète – cette lettre offre un éclairage différent sur la soirée du 6 janvier et son déroulement. Étrange, en effet, de l'avoir écrite et remise à Casimir en présence de Müvala. En outre, je m'interroge sur le destin de ce pli. Selon le serviteur, il a été mis à la boîte la nuit même ; la première chose à vérifier est de savoir où se trouve la plus proche.
    Il ouvrit un tiroir du bureau et, après un tri rapide de papiers, il tira une petite affiche imprimée.
    — Voyons... C'est un avis dont la publication avait été autorisée par M. de Sartine en date du 13 octobre 1761 afin d'informer le public des usages de la poste. Le bureau... Ah ! Voilà. Le bureau correspondant au domicile de Mme de Lastérieux intéresse tout le quartier du faubourg Saint-Germain, et sa boîte est située rue du Bac entre la rue de l'Université et la rue de Verneuil. Sur chaque lettre doivent apparaître trois timbres. Le premier est une lettre qui distingue les différents bureaux et les boîtes qui en dépendent.
    Il montra du doigt une mention au-dessus de l'adresse.
    — Voici la lettre F, qui correspond effectivement à celle du quartier. Le chiffre suivant indique le facteur qui a reçu la lettre et sert principalement au bureau pour les recherches que l'on est quelquefois obligé de faire car, comme vous le savez, on met souvent sur le compte de la poste des fautes qu'elle n'a pas commises. Combien ne voit-on pas passer dans ses bureaux de billets d'invitation qui n'y sont apportés qu'après l'heure où la cérémonie devait se faire ? Combien de personnes disent, pour s'éviter une tracasserie, qu'elles ont chargé la poste de lettres qu'elles n'ont même pas écrites ? Combien d'autres ont des raisons de nier d'en avoir reçu ?
    Nicolas se pencha par-dessus l'épaule de Bourdeau.
    — Et les autres indications ?
    — On trouve le quantième du mois sur les lettres qui ne sont pas du quartier. Toutes celles levées dans un même cercle marquées par la même lettre sont remises au plus tard deux heures – et même souvent une demi-heure – après, à leurs destinataires. Les autres passent au triage, mais le délai de remise n'excède pas quatre heures. Or que voyons-nous ? F, quartier de la rue de Verneuil, 7, la date et 1 soit la première des neuf levées quotidiennes. Celle-ci est faite à six heures du matin. Par conséquent, la correspondance de Mme de Lastérieux aurait dû parvenir au plus tard à midi rue Montmartre. Pour quelles raisons n'a-t-elle pas atteint l'hôtel de Noblecourt ? Je remarque que votre amie a, sans doute machinalement, souligné la partie de l'adresse stipulant « commissaire au Châtelet » . L'œil du tri a été trop rapide et la lettre mal dirigée s'est retrouvée ici. Inutile d'épiloguer. Je pense que vous avez hâte de rendre compte à M. de Sartine. Je vous laisse. Rendez-vous à cinq heures. Sanson nous aura rejoints et nous accompagnera à Vaugirard. Une voiture vous attend en bas.
    Nicolas fit un geste qu'arrêta Bourdeau.
    — Non, vous y allez seul ; les secrets doivent demeurer secrets.
    Nicolas, après

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