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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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paraissait bel et bien égaré. Cette constatation l'angoissa. Il se sentit glacé en revivant l'épisode d'Ailly-le-Haut-Clocher. Sur le coup, rien ne lui avait semblé avoir été dérobé. Il ne parvenait pas à se souvenir de la dernière fois qu'il avait tenu le trousseau en mains. Était-ce après son ultime incursion rue de Verneuil ? Il fit un effort de mémoire ; durant cette terrible nuit, il était revenu rue Montmartre, la porte étant ouverte, comme de coutume, lorsque M. de Noblecourt recevait à souper. Au fond, les clefs s'étaient peut-être égarées lors de son errance la nuit du crime, dont les détails lui échappaient toujours, ou encore lors de ses chutes sur le chemin de Calais à Paris ? Soudain, un détail lui revint. Durant la mise en scène organisée pour passer de son demi-fortune à sa berline de voyage dans la rue Neuve-des-Petits-Champs, il avait craint de perdre l'objet et sa main l'avait serré dans sa poche pour l'empêcher de glisser. Cela réduisait les hypothèses à son voyage en Angleterre. Il demanda à Poitevin de laisser la clef du petit escalier menant à sa chambre dans l'angle d'une fenêtre où personne ne songerait à la trouver. Il ne voulait pas, en effet, le réveiller quand il rentrerait fort tard de Vaugirard.
    Sa voiture le ramena au Châtelet. Le mauvais temps connaissait une accalmie, alors que s'allumaient les lumières de la ville. Sanson en habit vert et Bourdeau en gris souris l'attendaient sous le porche, devisant avec Rabouine. Celui-ci avertit Nicolas qu'il poursuivait ses recherches concernant Müvala, dont rien n'indiquait qu'il avait franchi les limites du royaume. La voiture s'ébranla et emprunta l'itinéraire habituel que Nicolas parcourait plusieurs fois par mois depuis sa première rencontre avec Semacgus. Défilèrent le Pont-Royal, la masse imposante des Invalides et la barrière de Vaugirard. Quelques étoiles commençaient à scintiller dans les trouées du ciel. Les hauteurs de Meudon demeuraient comme murées par une accumulation de nuages bas, bleu sombre comme une encre. Ce ciel d'ardoise semblait s'étendre et gagner peu à peu les faubourgs de l'ouest. La neige ne tenait pas et les roues du fiacre éclaboussaient, en de longues giclées noires, les rares passants qui se hâtaient pour rentrer au logis.

    La massive demeure de Semacgus surgit comme un havre de paix. L'extérieur était éclairé de lanternes. Au travers des vitrages, on devinait l'activité d'une maisonnée dans l'attente de visiteurs. La haute silhouette du chirurgien de marine s'encadra dans la porte de l'office. Les hennissements des chevaux lui avaient signalé leur arrivée. Il avait tombé l'habit et portait un tablier. Sanson fut chaudement accueilli et sortit aussitôt du mutisme qu'il avait observé tout au long du chemin.
    — Je prêtais la main à Catherine et à Awa, dit Semacgus.
    — Et pour quelle opération ? demanda le bourreau qui se penchait, curieux, sur les plats en préparation.
    — Ah ! pour la délicate opération qui consiste à pocher des boudins de foie gras et de chapon ! Cela se doit combiner dans du lait, lequel ne doit pas bouillir, mais clapoter tout doucettement sans détruire l'harmonie des ingrédients et, surtout, sans crever le délicat boyau qui les contient.
    — Voilà qui promet, dit Bourdeau, les narines largement ouvertes et la tête levée comme un chien à l'arrêt. Et que disposez-vous dans ces fragiles merveilles ?
    — Un quarteron coupé bien menu de panne de porc, un hachis de foie gras et de chair de chapon en quantités égales, fines herbes, ciboule, sel, poivre, muscade, clous pilés, six jaunes d'œuf crus. Je mêle le tout et l'introduis dans des petits boyaux de porc.
    Semacgus les entraîna dans son cabinet de travail, où la table était dressée. Ils prirent place autour du feu qui ronflait dans une grande cheminée de pierre blonde. La pièce était encombrée des curiosités glanées par leur hôte dans ses périples outre-mer. Il y avait là de multiples objets, animaux exotiques naturalisés, minéraux, tissus barbares, herbiers et autres vestiges. Nicolas se sentait toujours transporté bien loin dans cette pièce : elle offrait un dépaysement identique à celui procuré par la lecture des récits des voyageurs et des navigateurs et éveillait en lui la soif du grand large.
    Catherine apporta une bouteille de ratafia qu'elle se mit en devoir de servir à chaque invité.
    — Cela nous

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