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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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dire que leur pétition n’avait plus d’objet, le vote étant acquis depuis un instant.
    Lorsque, la séance levée, les représentants sortirent du Manège, la foule houleuse les hua sans distinction de personne.
    « À notre tour de faire l’expérience de l’impopularité, dit Claude à Robespierre qui le tenait par le bras. Voilà bien la première fois que nous n’avons plus l’approbation populaire.
    — Expérience pénible quand on a conscience d’avoir accompli tout son devoir.
    — Pour aboutir à de pareilles sottises ! À tout prendre, la discussion reste ouverte au sujet de Louis lui-même. La question du régime est réglée, mais on n’a rien statué sur le Roi. »
    Ce fut le thème que Robespierre développa amplement, le soir, aux Jacobins, tandis que la foule mécontente courait les rues, faisant fermer les théâtres en signe de deuil. Claude, pas tellement content, lui non plus, de voir Maximilien exploiter une idée dont il n’était point l’auteur, prit la parole après lui et mit avec beaucoup de chaleur, trop peut-être, son cachet personnel sur les conséquences de sa remarque. Il fut brillant, mais, entraîné, il dépassa ses intentions, et il vit Lise, M me  Roland, M me °Brissot, dans la tribune des femmes, en manifester quelque surprise tout en l’applaudissant avec vigueur. En fait, il avait involontairement tendu une perche que l’auteur des Liaisons dangereuses s’empressa de saisir. Grimpant vivement dans la chaire des orateurs, il loua « les lumières et le zèle démocratique de notre frère Mounier-Dupré », puis, ainsi couvert, tendit son piège : il fallait ouvrir, à Paris et en province, une pétition pour la déchéance de Louis XVI. « Il y aura, dit-il, j’en réponds, dix millions de signatures. Nous ferons signer aussi les femmes. » Danton appuyait fortement la motion. « Pas les femmes, trancha Robespierre, trop d’entre elles jugeraient avec leur sensibilité. Du reste, je n’aime pas cette trop vaste pétition de tout un peuple, mieux vaut une adresse envoyée à nos frères des sociétés affiliées. » Laclos se trouva une fois de plus réduit à quia.
    Là-dessus, – il était dix heures –, la salle fut brusquement envahie par la foule la plus mêlée, venant évidemment du Palais-Royal. On reconnaissait ses motionnaires habituels, ses aboyeurs et ses « coureuses », comme le dit M me  Roland. Un orateur de cette députation annonça que l’on avait résolu d’aller le lendemain au Champ-de-Mars « jurer de ne jamais reconnaître Louis XVI pour roi ». On délibéra dans le tumulte, jusqu’au moment où Antoine, présidant le club, rétablit un peu de calme. Laclos en profita pour reprendre son idée d’une pétition nationale et en proclamer la nécessité. « Vous voyez : le peuple est ici, il la veut ! » Une de plus, une de moins, cela n’avait pas grande importance, à tout prendre. Claude laissa faire, étant entendu que ladite pétition serait simplement envoyée aux sociétés de province, après avoir été signée au Champ-de-Mars. Ainsi conciliait-on le désir du « peuple » et la prudence de Robespierre. Cinq commissaires, dont Brissot et Danton, furent désignés pour rédiger ce texte. On décida de venir demain, 16, à onze heures du matin, afin de le lire. Antoine leva la séance.
    Claude, fatigué par la chaleur et la tension de cette journée, avait hâte de se mettre au lit. En passant avec Lise, les Roland et M me  Brissot, le portail monumental de la cour, serré entre les maisons de la rue Saint-Honoré, il eut la surprise de voir, en face, un peu plus bas, Montaudon, remonter la rue avec quelques-uns de leurs collègues – des fayettistes – comme s’ils sortaient ensemble de l’Assemblée. Il l’appela pour le questionner.
    « D’où viens-tu donc ? Il n’y avait pas séance de nuit au Manège, que je sache ?
    — Non, non, dit René en saluant les dames. Nous nous sommes simplement réunis, quelques-uns, aux Feuillants, pour parler un peu de la situation.
    — Parler un peu ! Le club n’est-il pas à cette fin ?
    — Oh ! le club ! Pour entendre les insolences de Legendre ! Je ne pense pas que nous y retournions. C’est justement afin d’en discuter que nous nous sommes retrouvés, ce soir.
    — Ah ! Eh bien ?
    — Eh bien, répondit Montaudon d’un air vague, rien n’est encore très arrêté. »
    Il s’en alla rejoindre les fayettistes, de l’autre

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