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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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l’exécutif et le législatif vont nécessairement se heurter, se combattre, s’entre-détruire au profit des factieux. »
    Or, dans le temps même que Claude devenait ainsi décidément républicain, l’idée de république rétrogradait partout. Les Cordeliers avaient fait amende honorable aux Jacobins. Ceux-ci s’épuraient, ils ne songeaient qu’à en finir avec les Feuillants auxquels Robespierre, à l’Assemblée, venait de porter le coup de la mort. À la joie délirante de la droite qui se suicidait avec frénésie en piétinant ses ultimes alliés, Maximilien, dans un discours d’une ironie sanglante, avait écrasé les constituants sous le poids de leur propre constitution. Il l’admettait néanmoins, il en exigeait seulement l’application formelle. Danton, revenu d’Angleterre, le 9, plus assagi encore que ne l’escomptait Claude, semblait vouloir effacer tout souvenir de ses violences. Il passait son temps à l’Évêché, où siégeait l’assemblée électorale, et s’efforçait de se faire envoyer à la Législative. Desmoulins, renonçant au journalisme, déclarait « rentrer dans le silence ». Électeur de la section du Théâtre-Français, mais frappé d’ajournement, il s’inclinait en annonçant à Claude qu’il entendait désormais vivre simplement heureux. Il ferait des vers.
    Les jours passaient, ramenant tout à coup un très beau temps d’arrière-saison. On attendait encore la réponse de Louis XVI. Il hésitait devant l’alternative : acceptation ou abdication. N’eût été le devoir de conserver un trône au Dauphin, il eût refusé dès lecture des articles : rien, là-dedans, ne donnait espoir de régner ni même de gouverner. Les conseillers apparemment sages inclinaient pourtant à l’acceptation. Consulté par la Reine, Barnave la suppliait de dire oui. Malgré Robespierre, malgré la défection de la droite qui, ne voulant plus de Louis XVI, mettait sa confiance dans la révolte religieuse, dans Monsieur soutenu par les armées étrangères, il espérait encore un rétablissement monarchique. Louis se résigna. Dieu ferait peut-être un miracle.
    Le 13, revêtu de sa simarre pourpre de garde des Sceaux, le ministre de la Justice se présenta, suivi de tous ses collègues. Les huissiers ouvrirent la barre. Le ministre s’avança vers Thouret – de nouveau président – auquel il remit une lettre royale cachetée d’une large empreinte de cire rouge. Thouret, debout, la rompit et donna lecture du message. Le Roi disait avoir soigneusement examiné la Constitution. Il déclarait l’accepter, tout en formulant des réserves sur les vices évidents du système. Mais, ajoutait-il, « puisque les opinions sont aujourd’hui divisées sur cet objet, je consens que l’expérience en demeure juge ». Il terminait en demandant une amnistie générale pour tous les faits relatifs à la Révolution. Enfin, dans un post-scriptum, il fixait au lendemain, sur le midi, sa visite au Manège pour l’acceptation solennelle.
    La lettre fut applaudie, l’amnistie votée immédiatement. On envoya au château une nouvelle délégation de soixante membres pour remercier le Roi et lui faire part du décret que l’on venait de rendre. Louis XVI s’en déclara heureux. Montrant aux députés sa famille :
    « Voilà, dit-il, ma femme et mes enfants qui vous en savent gré comme moi.
    — Oui, dit Marie-Antoinette, nous partageons tous les sentiments du Roi. »
    L’instant d’après, triste, amère, elle confiait à sa chère Campan : « Ces gens ne veulent point de souverains, ils démolissent la monarchie pierre par pierre. »
    Lise le 13, se rendit au Manège avec Dubon, sa femme et les Roland pour assister à cette séance dans laquelle, pensait-on généralement, la Révolution allait trouver son apothéose et son terme. Les loges, les tribunes, les galeries étaient combles. Les huissiers faisaient la chasse aux citoyens qui se glissaient parmi les banquettes laissées vides par les ultra-royalistes rompant avec le roi constitutionnel. Tout en haut, derrière les fenêtres ensoleillées, on apercevait le ciel couleur de myosotis.
    Un peu avant midi le canon tonna, annonçant le départ du cortège. Le peuple aussi grondait, mais de joie, d’espérance. On entendait cette heureuse clameur grossir, s’approcher au passage des carrosses sortis par la rue de l’Échelle, avançant au long de la rue Saint-Honoré. Ils entrèrent avec la garde dans la cour

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