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L'ange de la mort

L'ange de la mort

Titel: L'ange de la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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tous les deux jouaient le jeu. Corbett se demanda jusqu’à quand sa vie ne serait qu’un jeu. Cela continuerait-il toujours ainsi ? À la fin, son esprit se lassa de tourner en rond, de pourchasser des ombres, de ressasser des souvenirs : il s’endormit d’un sommeil agité.
    Le lendemain, regrettant son oisiveté de la veille, il se leva et s’activa fébrilement. Il réveilla Ranulf et l’envoya à Westminster avec deux lettres : l’une pour le roi, l’autre pour un messager royal qui la remettrait à Maeve – il l’espérait – dans les semaines suivantes. Il lui ordonna de le retrouver à l’ Étendard dans Cheapside. Ranulf dévala l’escalier et Corbett vaqua à d’autres tâches. Il lui fallait acheter des provisions et régler diverses affaires. Finalement, s’étant habillé et armé, il s’emmitoufla dans une lourde cape militaire et sortit dans Bread Street.
    La ville était encore noyée d’un épais brouillard qui transformait les silhouettes des passants en fantômes de cauchemar. Le sol était dur et glissant. Tout en s’efforçant de ne pas déraper sur le caniveau central verglacé, Corbett prit soin de marcher au milieu de la rue pour éviter les paquets de neige qui tombaient encore des toits. Se déplacer était devenu une entreprise fort risquée ! À un moment donné, il dut s’arrêter pour porter secours à l’épouse d’un marchand de draps ; la brave femme, à la croupe avantageuse, n’en revenait pas de se retrouver les quatre fers en l’air et serait restée là, toute la sainte journée, sous la risée des garnements, si Corbett n’était pas venu l’aider. Le clerc, enfin, remonta nonchalamment Cheapside et tournant à droite, pénétra dans St Mary-le-Bow.
    Il se rappela l’époque où les portes et baies de l’église étaient bouchées par des fagots de ronces et le grand portail barricadé. L’endroit avait été excommunié par l’archevêque de Cantorbéry pour avoir servi de quartier général aux membres d’une secte satanique qui avaient comploté contre le roi. Les souvenirs assiégèrent sa mémoire lorsqu’il franchit le seuil : le temps d’un éclair, il revit leur chef, Alice, dont il avait été profondément amoureux. Il repensa à son visage au teint mat et à son regard énigmatique, et comprit douloureusement que le temps n’avait pas vraiment guéri sa blessure. St Mary-le-Bow avait bien changé depuis : propre, fraîchement repeinte, dotée d’une école reconnue, elle était dirigée par un nouveau recteur. C’était l’église paroissiale de Corbett qui faisait partie de la confrérie de Corpus Christi. Cette association regroupait des échevins, des drapiers, des marchands et des commerçants qui l’avaient créée pour des raisons d’ordre social et religieux. Tous les ans, Corbett faisait dire une messe pour le repos de l’âme de son épouse, de sa petite fille et – sans que personne le sût – d’Alice-atte-Bow, le chef de cette secte satanique.
    Corbett bavarda avec le prêtre, s’assura que tout était en ordre et engagea une courte discussion avec l’un des échevins de la paroisse. Londres était divisé en paroisses, au nombre de douze, dirigées chacune par un échevin qui contrôlait la plupart des affaires religieuses et laïques de son quartier. Chaque paroissien devait payer une taxe. Bien qu’il en eût les moyens, Corbett s’y était toujours opposé parce qu’une ordonnance royale stipulait que les clercs, au même titre que la haute et petite noblesse, en étaient exempts. L’échevin, en revanche, exigeait que Corbett payât pour Ranulf, mais le clerc tourna la difficulté en assurant que celui-ci étant un apprenti clerc, il devait lui aussi être exempté de cette taxe. L’échevin en convint à regret. Corbett, cependant, se garda bien de préciser que Ranulf connaissait surtout les lois pour pouvoir mieux les enfreindre et il ne fit pas mention, non plus, de la nouvelle âme que Ranulf avait fait acquérir à la paroisse.

 
    CHAPITRE XIII
    Corbett quitta St Mary-le-Bow et redescendit Cheapside pour regagner Poultry. Il vit que la cité s’efforçait de reprendre vie malgré les intempéries. Les cours de justice, elles, n’avaient pas fait relâche : on emmenait à la prison de la Tun à Cornhill une longue file de criminels et de prostituées. Les filles en coiffes rayées portaient des verges blanches, et les piloris étaient peuplés de boulangers et de poissonniers contraints

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