L'Anneau d'Atlantide
personnellement ? Pauvre, pauvre Adalbert ! Si seulement…
Elle s’arrêta net : un doigt posé sur ses lèvres, Aldo lui faisait signe de se taire et, de l’autre, désignait le plafond ajouré en fer forgé. Elle se le tint pour dit jusqu’à ce que l’on fût à l’abri de leur appartement :
— Il ne court pas plus de danger que la dernière fois. C’est Lassalle et moi qui avons concocté cette mise en scène.
— Lassalle ? Vous n’êtes pas sérieux ?
— Je suis très sérieux, au contraire. Il m’a téléphoné tout à l’heure pour me prévenir que Béchir est mort et que Keitoun allait rappliquer pour arrêter Adalbert. Nous avons monté le coup ensemble ! Un peu au pied levé, évidemment, mais ça n’a pas si mal marché…
— C’est toi qui t’es arrangé de la sorte ? déplora M me de Sommières.
— En partie, oui ! Mais je crois qu’il était temps puisqu’en revenant j’ai trouvé Keitoun installé.
Cependant, Marie-Angéline ne se départait pas de son air méfiant :
— Vous direz ce que vous voudrez, je n’arrive pas à faire confiance à cet homme…
— Vous préféreriez qu’Adalbert finisse la nuit dans les prisons de ce gros porc ?
— N… on ! Pourtant il me semble…
— Ça suffit, Plan-Crépin ! Il serait temps que vous cessiez de vous prendre pour le juge suprême de l’humanité ! Aldo a un urgent besoin de prendre une douche et nous d’aller au lit ! Je suis convaincue que, là où il est, le cher garçon est en parfaite sécurité !
Pendant ce temps Abdul Aziz Keitoun, après avoir ramené ses hommes à leur base, recommençait à moudre ses pistaches. Au lieu de ne penser à rien comme cela lui arrivait fréquemment, il était entré en méditation. Ce nouvel enlèvement le rendait perplexe. Il y avait quelque chose ce soir qui avait cloché et il se sentait dépassé par l’événement.
Après un délai de réflexion stérile, il posa la main sur le téléphone mais se ravisa, sachant que « l’on » n’aimerait pas cette initiative ! La seule issue à ce dilemme était d’aller aux renseignements à la source. Aussi, abandonnant à regret son cher fauteuil, il quitta son bureau, avertit le policier de garde qu’il sortait puis se rendit au garage où il s’inséra – non sans peine ! – derrière un volant, ce qui représentait une manière d’exploit pour un homme habitué à s’étaler sur les coussins de la large banquette arrière. Là où il se rendait, il ne voulait aucun témoin, ayant la certitude qu’on le lui reprocherait.
Il mit la voiture en marche, alluma les phares et gagna la sortie.
Une demi-heure plus tard, un serviteur déférent l’amenait en présence d’Ali Assouari. Renversé plutôt qu’assis dans un immense fauteuil chippendale recouvert de cuir, celui-ci suivait les volutes bleues d’un cigare et n’avait aucune envie d’être dérangé. Son accueil s’en ressentit :
— Que veux-tu ? ronchonna-t-il sans bouger, sans regarder son visiteur et bien entendu sans lui proposer de s’asseoir.
Il eût montré peut-être plus de considération à un domestique. Ce qui n’arrangea pas l’humeur du policier pour qui la position verticale était la plus inconfortable qui soit. Sa réponse en découla :
— Savoir pourquoi vous avez fait enlever l’archéologue sans daigner m’en avertir ?
L’effet fut magique : Assouari non seulement se redressa mais se leva, indifférent aux cendres qu’il répandait autour de lui. Son œil noir lançait soudain des éclairs :
— Si c’est une plaisanterie, elle n’est pas drôle. Tu devrais savoir que je déteste qu’on se moque de moi ?
— Je ne dis que la vérité : vous avez subtilisé cet homme presque sous mon nez. Pourquoi ?
— Je n’ai subtilisé personne !
— Alors si ce n’est pas vous, c’est quelqu’un d’autre… mais qui ?
— Dis-moi ce qui s’est passé !
— Oh, ce sera rapide : je venais d’arriver à l’hôtel avec mes hommes quand ce Morosini a fait irruption, saignant et couvert de poussière en braillant que, pendant qu’ils faisaient leur promenade d’après dîner, des hommes en voiture les avaient attaqués et après l’avoir assommé avaient enlevé l’autre sans plus d’explications. Voilà ! C’est tout ! Qu’en pensez-vous ?
Assouari ne répondit pas. Il alla s’asseoir
Weitere Kostenlose Bücher