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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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son attitude reflétait une sincérité dont il était difficile de douter. Se pouvait-il…
    — Fermez-vous votre chambre à clé, monsieur Decroix ?
    — À quoi cela servirait-il ? Les doubles abondent et les filles de charge balaient tous les jours.
    — Veuillez me rappeler ce que vous avez fait durant la nuit où le vicomte de Trabard a été tué.
    Decroix soupira.
    — Faut-il toujours se répéter ? Je n’ai rien à voir ni de près ni de loin avec ce qui s’est passé ici.
    — Ce n’est pas ce que je vous demande. Où étiez-vous cette nuit-là ?
    — Mais je vous l’ai dit. Vers minuit, Grégoire, le garçon d’écurie, est venu me chercher pour m’avertir de ce qui se passait.
    — Soit, mais avant minuit ?
    Nicolas avait quelque raison de poser la question. En effet il essayait de faire coïncider le déroulement de la nuit avec l’ensemble des témoignages qui en rendaient compte. Personne n’avait vu Mme de Trabard après minuit. En vain avait-on frappé à sa porte. De deux choses l’une, soit elle ne répondait pas parce qu’elle était dans la chambre de Decroix avant minuit et qu’elle y était demeurée après que Grégoire était venu quérir le maître-palefrenier, soit, si ce n’était pas le cas, où était-elle ? Que penser alors en cette occurrence des indices relevés par Nicolas, en particulier la fragrance de l’ Eau de la reine de Hongrie  ? En dépit de la contention de son esprit, toutes les hypothèses caressées se fondaient dans un diffus nébuleux ou se heurtaient à d’inattaquables impossibilités.
    Decroix fit claquer son fouet et considéra Nicolas l’air gêné.
    — Faut-il vraiment vous le dire ?
    — Je vous le conseille. Je vous rappelle vos premières déclarations : vous vous seriez promené sur les boulevards.
    — Soit. Je n’ai pas mentionné le détail. J’étais chez la Bourdeille.
    — La Bourdeille ? La maison galante de la rue des Fossés-Monsieur-le-Prince, vis-à-vis celle du Riche Laboureur  ?
    — Je vois que vous la connaissez, remarqua Decroix, l’air soudain égrillard.
    — Vous vous égarez. C’est la police et le magistrat qui la connaissent. À quelle heure y étiez-vous ?
    — Vers huit heures de relevée jusqu’à onze heures sonnées. Un fiacre m’a déposé discrètement en haut de la rue à la barrière d’Enfer.
    — Êtes-vous entré par le portail principal ?
    — Non, j’ai la clé d’une petite porte qui donne près de la carrière. Je suis allé me coucher aussitôt. Je me suis lavé à la pompe au dehors.
    — Avez-vous utilisé une cuvette ?
    — Non.
    — Celle qui se trouve dans votre chambre était donc vide lorsque vous êtes entré chez vous ?
    — Oui, je l’affirme, et propre de surcroît. Je ne l’utilise que pour me raser. Ce n’était point le jour.
    — Et comment l’avez-vous retrouvée le lendemain, après l’événement ?
    — Propre ! Le pourquoi de cette question ?
    — Peu importe. Ainsi donc vous affirmez avoir été absent de l’Hôtel de Trabard de huit heures à onze heures. Vous comprenez bien que vos déclarationsseront dûment vérifiées. Comment se nomme la fille qui a retenu votre choix chez la Bourdeille ?
    — Émeline Guillemette, une brunette très jolie avec laquelle j’ai depuis longtemps mes habitudes.
    — Soit. Je vous remercie de votre franchise, que j’espère loyale. À vous revoir, monsieur Decroix.
     
    Dans sa voiture Nicolas méditait. Tout préparé qu’il fût par l’expérience et par les rebondissements toujours vraisemblables d’une enquête, il lui semblait que d’un coup sa version du monde des Trabard venait d’être bouleversée, renversée, inversée et que, partant, sa réflexion devait s’ordonner sur d’autres propositions. Sur quelles prémisses bâtirait-il de nouvelles hypothèses ?
    Si Mme de Trabard n’était pas la maîtresse du palefrenier, que faisait-elle après minuit ? Pourquoi la cuvette de la chambre de Decroix était-elle emplie d’eau savonneuse exhalant le parfum de la dame, comme aussi le lit défait ? Que penser de l’idée de Decroix que son maître aurait pu être victime d’un conflit dans le monde des courses ? Mais alors, quid des piastres et des libelles cachés dans la mangeoire de Bucéphale ? Rien de ce que lui dictait son esprit enfiévré ne le satisfaisait. Il se convainquit d’oublier ce fatras, de faire table rase, de laisser ces informations, témoignages,

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