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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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Permettez que je considère l’affaire sous un autre angle. Vous me direz, comment une question aussi claire peut-elle susciter tant de débats ? Mais bigre, monsieur Decroix, quel personnage jouez-vous qui possédez la maîtresse du logis et chaque dimanche la fille Guillemette dans la maison de dame Bourdeille, maison galante réputée de la place ? Peut-on vous croire alors que vous mentez ? Vos affirmations sont mal ajustées et encore plus mal soutenues.
    — J’ai des témoins et des plus crédibles.
    — Certes, Mme Bourdeille a témoigné… deux fois.
    — Voilà ! Elle n’a pu que confirmer ma présence chez elle le 13 juillet au soir.
    — Posons la thèse contraire et supposons que vous avez essayé de me tromper, moi, magistrat du roi enquêtant sur un cas criminel, et croyez-vous que cela ne tirerait pas à conséquence pour vous et votre rôle dans cette affaire ? Or il se trouve qu’à son premier témoignage la femme Bourdeille en a ajouté un second, sous serment et devant témoins, et a soutenu une seconde relation des faits. Vous ne dites plus rien, frappé de la nouvelle.
    — Et qu’a-t-elle pu vous confier qui me nuise ?
    — D’abord que vous avez bien fréquenté sa maison au début de votre arrivée à Paris, mais que depuis un an vous n’y paraissiez plus. Pourquoi, medemanderez-vous ? Sans doute parce que cela correspondait au début de votre liaison avec la vicomtesse de Trabard.
    Decroix voulut, bien qu’entravé, se jeter sur Nicolas. Les exempts se précipitèrent et le maintinrent sur son banc.
    — Ah ! Monsieur Decroix, vous avez le sang chaud et, pour être aussi vif, il faut que mon propos contienne de belles et bonnes vérités. Mais il y en a d’autres que je soumets à votre considération, messeigneurs. N’étant pas allé chez la Bourdeille, il n’y avait nulle raison de le révéler, d’où une promenade sur les boulevards. Ce n’est que lorsque vous avez senti l’enquête se resserrer que vous avez trouvé cet expédient et que vous vous êtes précipité chez la Bourdeille, a posteriori , pour l’inciter à commettre un faux témoignage qui vous servirait d’alibi. Et comble d’imprudence, oui d’imprudence, vous soldez la chose avec de la fausse monnaie. D’où provient-elle selon vous ? D’une somme appartenant sans doute à votre maître que nous savons par ailleurs impliqué dans un trafic de fausses espèces étrangères…
    À nouveau la perruque de Sartine oscilla dangereusement à cette mention.
    — … Oui, il y a quelques présomptions à porter sur M. Decroix un suspicieux regard. Quel intérêt, me direz-vous, avait-il à la disparition du vicomte de Trabard ? Au-delà d’avantages matériels qui devraient être éclaircis, il y a sans doute le complot d’un amant et de sa maîtresse pour que l’époux disparût. Lequel des deux a-t-il entraîné l’autre ? Quelles promesses sa maîtresse lui avait-elle faites ? Je l’ignore, mais je suis intimement convaincu de leur culpabilité dans ce crime atroce.
    Une nouvelle fois Decroix tenta de se précipiter sur Nicolas et fut empêché par les exempts.
    — Reste devant nous la femme de chambre, Nicole Lozange. Oh, il n’est pas possible de lui reprocher le moindre écart à l’égard de sa maîtresse. C’est un rempart, cette femme, totalement dévouée. Dévouée, messeigneurs, à un point extrême. Par exemple, c’est elle qui a la haute main sur les commandes et l’ordonnancement des fioles de liqueur d’Hoffmann, si fragiles, si fragiles ! Si fragiles qu’elles se multiplient outre mesure. Nous avons dû constater au cours des interrogatoires auxquels elle a été soumise qu’elle maniait adroitement les doubles langages. Pauvre fille qui se prétendait dédaignée par le beau Diego Burgos, mais qui tombe en pâmoison à l’annonce de son trépas et d’une manière pour le coup si sincère qu’il n’y a plus à douter des liens qui existaient entre eux.
    — Cependant, objecta Sartine, ne rapportait-on pas, hum… que le vicomte de Trabard avait noué des liens particuliers avec son secrétaire ?
    — Qu’ils aient ou non existé, cela n’interdit pas la duplicité des attitudes et des sentiments. Qui nous prouve d’ailleurs la sincérité de Burgos à l’égard de la femme de chambre ? Son intérêt seul le portait peut-être à entretenir une liaison dans laquelle il voyait des avantages, en particulier ceux de faire cause commune avec le

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